-analyfe, c’eft du charbon. On voit à prefent ce que
-c’eft que la fuie , & ce qu’elle renferme de véritablement
combuftible. Si on l’ôte de la cheminée lorf-
•qu’elle eft feche, & qu’on la mette ainli récente fur
le feu, elle brûle & elle s’enflàmme.prefqu’auffi-bien
•que toute autre matière combuftible ; c’eft ce qu’on
•n’a que trop fouvent occafion de remarquer : combien
de fois ne voit-on pas-, que fi on laiffe long-tems
’des cheminées fous lefquelles on fait ordinairement
:crand feu-fans les nettoyer, la Jiiie s’y amaffe , le
■ feu y prend, & la flamme fortant par le haut -de4a
vcheminée caufe de fâcheux incendies. (Z?. /,)
S u ie , Agriculture.^ on regarde en Angleterre là
. fuie comme très-bonne pour l?engrais des terres., on
■ droit fur-tout qu’elle elt très-propre à faire .périr les
mauvaifes herbes & les plantes aquatiques telles que
les joncs & le s rofeauxdans les prairies baffes ; on
aflure que Iorfqu’on veut les détruire, on ne fait que
le s enlever avec la bêche, & l’on répand de la fuie
par-deffus, ce qui les empêche de revenir.
S u i e , ( Teinturerie.) les Teinturiers fe fervent dè
.fuie pour faire une couleur fauve qui eft aflez belle,
il eft vrai qu’elle eft d’une très-mauvaife odéur, mais
en récompenfe elle conferve les draps & autres étoffes
de laine, contre cette efpece de vers qu’on appelle
teigne, qui les percent & le s rongent; elle eft
auflî plus propre que la racine de noyer pour faire
les feuilles mortes & couleurs de poils de boeuf, fur-
Tout quand elle eft employée dans un garançage où
il y a du terra-mérita. Les teinturiers en foie, laine
& fil, appellent la fuie, bïàznet.Diction. du commerce.
{ D . J . )
S u i e , ( Ckim. Mat. médic.') les médecins-chimiftes
. -ont dès long-tems traité la fuie par la diftillation à la
violence du feu, pour en retirer des remedes, favoir
un alkali volatil & une huile empireumatique, qui
font des produits de cette opération, & qui font
connus, dans les chimies médicinales, fous le nom
de fe l volatil de fuie ou à'ejprit de fuie , félon que
cet alkali volatil eft fous forme concrète, ou fous
liquide , & celle d’huile de fuie. Mais ces produits
n’ayant que les qualités très -génériques des
matières de leur genre refpeâif, font à peine employés
aujourd’hui, ne méritent du - moins aucune
préférence. Voye^ A l k a l i v o l a t i l fous le mot S e l
O H u i l e e m p i r e u m a t i q u e à l’article général H u i l
e . Les chimiftes du même ordre, c’eft - à - dire les
chimiftes-médecins, entre lefquels Nicolas Lemeri
mérite d’être diftingué, font mention d’un fel fixe
de fuie qu’ils croient être un alkali fixe. S’il eft tel
en effet, M. Baron a raifon de dire dans fes notes fur
Lemeri, que les propriétés médicinales de ce fel
lui font communes avec l’alkali fixe ordinaire, qui
fe prépare à beaucoup moins de frais, & qui par
cette raifon mérite la préférence. Mais c’eft vraif-
femblablement accorder trop de confiance à Lemeri
que de l’en croire fans examen fur la nature de ce
le l, dont la génération ne feroit point cependant
difficile à découvrir; mais encore un coup, avant
de s’occuper de cette recherche, il faut s’affurer li
4e fel fixe de la fuie eft un alkali.
Outre les produits dont nous venons de parler
favoir l’alkali volatil, i’huile empireumatique, &
un fel fixe lexiviel, les chimiftes qui, comme Boerhaave,
ont examiné plus foigneufement les produits
sde la diftillation de la fuie, exécutée dans des vues
philofophiques, comptent parmi ces produits un fel
-ammoniacal, &: obfervent que tous les produits dont
nous venons de parler , font précédés d’une affez
bonne quantité d’eau limpide.
Le fel ammoniac vulgaire, eft un produit de la
diftillation à la violence du feu, de la fuie de cheminée'
où l’on brûle de la houfe de vache. Foyer Sel
AM M O N IA C .
4-ayàzVprovenue des matières animales paroît devoir,
différer de celle que fourriiffent lès matières
végétales. Peut-êtreque le fél ammoniac fourni par
cette derniere fuie , différé du fel ammoniac vulga».
re ; mais je ne fâche point que les chimiftes ayent
cherché à s’aflùrer de nette différence, non plus que
des autres principes diftinûifs de l’une & de l’autre.
Au refte , ce point de vue eft bien différent dé
celui qu’indique Boerhaave, lôrfqu’il d it, à la fin de
fes réflexions fur l’analyfe de la fuie végétale, que
la fuie qu’on ramafferoit dans les cheminées de cui-
fine feroit fort différente de celle - là , parce qu’elle
feroit fournie non-feulement par les fumées des matières
qu’on emploiroit à entretenir le feu, mais encore
par celles qui s’exhaleroient des viandes qu’oii
cuit; ce qui parait à peine pouvoiraltérerlégèrement
îa/â«; car cuire des viandes,ce n’eft pas les brûler où
du-moins on ne brûle que très - accidentellement &
très-rarement les viandes qu’on cuit dans les cuifii
nés , & les vapeurs qui fe détachent des viandes
Amplement cuites , ne font prefqüe qu’âqueufes, ou
tout-au-plus chargées de la partie aramâtiqiie de
qùelques affaifonnemens qu’on emploie à quelques-
unes de ces cuites, & d’une légère émàriation qui
conftitue l’odeur des viandes, toutes matières peu
propres à être retrouvées dans la fuie. On- peqt ob-
ferver encore que l’analyfe de la fuie que Boerhaave
donné comme fottrniffant le complément des con*
noiflànces acqtiifes déjà furies végétaux traités par
le fecours du feu dans les vaiffeaux fermés -, & qu’un
chimifte françois qui l’a àdoptée trouve décrite avec
beaucoup d’exâftitude &ç de précifion ; que cette
analyfe, dis-je , ne faùroit fournir la moindre con-
noiffance fur l’objet auquel Boerhaave la deftine *
car cet auteur fe promettant de découvrir par cette
analyfe les matières que le feu ouvert chaffe des
corps aftuellement brûlans en plein air, a très - mal
choifi fon fujet en prenant la fuie ordinaire des cheminées
, formée en partie, félon fa propre obferva*
tion, par des matières qui fe font élevées en forme
de fumée, n’eft point-du-tout un produit propre de
l’ignition à l’air libre, mais au contraire un produit
propre aux fubftances échauffées dans les vaiffeaux
fermés. La fumée qui précédé l’apparition de la flamme,
dans la combuftion à l’air libre, eftune matière
absolument identique avec les premières vapeurs
falines & huiieufes qui s’élèvent d’une matière végétale
dans le commencement de la diftillation analy*
tique : ainfi la fuie ordinaire contient pèle & mêle
des produits pareils à ceux que le feu chaffe d’un
vaiffeau dans un autre, félon les termes de Boerhaave,
& des produits propres à la combuftion dans
l’air libre, & p a r conféquent n’eft point propre à
démontrer les principes que le feu enleve d’une matière
végétale qui brûle & fe confume à l’air libre.
L’analyfe méthodique de la fuie eft donc encore
une choie intentée; & pour l’exécuter de maniéré à
mériter véritablement cet éloge d’exa&itude & dé
précifion, il faudrait préparer à deffein une fuie qui
fût fournie par des matières uniquement végétales
ou uniquement minérales, toujours enflammées,
en ne les plaçant fous la cheminée deftinée à recevoir
cette fuie qu’après qu’elles auraient ceffé de fumer
, & lorfqu’elles flarnberoient vertement.
Un principe de la fu ie , qui eft évidemment produit
par les matières combuftibles a&uellement enflammées
, c’ eft la matière colorante noire, qui n’ell
autre chofe qu’un charbon très-fubtil volatilifé, ou
pour mieux dire, entraîné parle mouvement rapide
de la flamme.
Le noir de fumee, qui eft la fuie des matières réfî-
neufes qui brûlent avec flamme, ne différé de cette
matière colorante de la fuie vulgaire, qu’en ce que
la première eft un charbon à-peu-près pu r, & que
dans la derniere ce charbon eft mêlé à de l’eau & à
des fubftances huiieufes & falines, ( f)
S U J S U J E T , f. m. ( Gouvernement civil, ) on nomme
fujets tous les membres de l’état, par oppofition au
fouverain, foit que l’autorité fouveraine ait été déférée
à un feul homme, comme dans une monarchie,
ou à une multitude d’hommes réunis, comme dans
une république : ainfi le premier magiftrat de cette
république même, eft un fujet de l’état.
On devient membre ou fujet d’un état en deux
maniérés, ou par une convention expreflè, ou par
une convention tacite.
Si c’eft par une convention expreffe, la chofe eft
fans difficulté ; à l’égard du confentement tacite , il
faut remarquer que les premiers fondateurs des états,
& tous ceux qui dans la fuite en font devenus membres
, font cenfés avoir ftipulé que leurs enfans &c
leurs defcendans auraient, en venant au monde, le
droit de jouir des avantages communs à tous les
membres de l’état, pourvu néanmoins que ces defcendans,
parvenus à l’âge de raifon, vouluffentde
leur côté le foumettre au gouvernement, & recon-
noître l’autorité du fouverain.
Je dis pourvu que les defcendans reconnoiffent
l’autorité du fouverain, car la ftipulation des peres
ne fauroit avoir par elle-même la force d’affujettir
les enfans malgré eux', à une autorité à laquelle ils
ne voudroient pas fe foumettre ; ainfi l’autorité du
fouverain fur les enfans des membres de l’état, &c
réciproquement les droits que ces enfans ont à la
proteâion du fouverain, & aux avantages du gouvernement
, font établis fur un confentement réciproque.
Or de cela feul, que les enfans des citoyens parvenus
à un âge de dilcrétion, veulent vivre dans le
lieu de leur famille, ou dans leur patrie, ils font par
cela même fenfés fe foumettre à la puiffance qui gouverne
l’état, & par conféquent ils doivent jouir,
comme membres de l’éiat, des avantages qui en font
les fuites ; c’eft pourquoi auffi les fouverains une fois
reconnus, n’ont pas befoin de faire prêter ferment
de fidélité aux enfans qui naiffent depuis dans leurs
états.
Les fujets d’un état font quelquefois appellés citoyens
; quelques-uns ne font aucune diftin&ion entre
ces deux termes, mais il eft mieux de les diftin-
guer. Celui de citoyen doit s’entendre de tous ceux
qui ont pârt à tous les avantages, à tous les privilèges
de l’affociation,& qui font proprement membres
de l’état, ou par leur naiffance, ou d’une autre maniéré
; tous les autres font plutôt de fimples habitans';
ou des étrangers paffagers que des citoyens ; pour
les ferviteurs, le titre de citoyens ne leur convient
qu’en tant qu’ils jouiffent de certains droits, en qua-
lité de membres de la famille d’un citoyen, proprement
ainfi nommé, & en général, tout cela dépend
des lois & des coutumes particulières de chaque état.
Quant au devoir des fujets,. nous nous contenterons
de remarquer, qu’ils font ou généraux ou particuliers
, les uns & les autres découlent de leur état
& de leur condition.
Tous les citoyens ont cela de commun, qu’ils font
fournis au même fouverain, au même gouvernement,
& qu’ils font membres d’un même état ; c’eft de ces
relations que dérivent les devoirs généraux.; & comme
ils occupent les uns &c les autres différens emplois,
différens poftes dans l’état, qu’ils exercent
auffi différentes pr.ofeffions, de- là naiffent leurs devoirs
particuliers. Il faut encore remarquer que lès
devoirs des fujets fuppofent & renferment les devoirs
de l’homme confidéré Amplement comme tel, &
comme membre de la fociété humaine en général.
Les devoirs généraux des fujets ont pour objet,
ouïes conducteurs de l’état,ou tout le corps du peuple
& la patrie, ou les particuliers d’entre les concir
toyens. À l’égard des çondu&eurs de l?état, tout fu-
forjie X f ,
S U J 643
jet leur doit l’obeiffance que demande leur caraCtere.
Par rapport à la patrie -, un bon citoyen-fe fait une
loi de lui faire honneur par fes talens, fâprobité, &
fon induftrie : ces devoirs particuliers font attachés
aux-différens emplois qu’il a dans la fociété.
Mais c’eft un droit naturel à tous les peuples libres,
que chaque fujet & citoyen a la liberté de fe
retirer ailleurs, s’il le juge convenable, pour s’y procurer
la fanté, les néceffités, & les commodités de
la v ie , qu’il ne trouve pas dans fon pays natal.
Les Romains ne forçoient perfonne à demeurer
dans leur état, & Cicéron appelle cette maxime, le
fondement le plus ferme de la liberté, qui eonfifte à
pouvoir retenir ou céder fon droit fans y renoncer,
comme on le juge à propos ; voici fes propres termes.
O jura praclara atque divinitiis jam indh à prin-
cipio romani nominis à majoribus no fris comparatà....
ne quis invitus civitate mutetur, neve in civitate maneat
invitus ; hcec funt enim fudamenta JirmiJJima noflroe li-
bertatis , fui quemque juris & retinendi, & dimittendi
ejje dominum. O rat. pro L. Corn. Balbo.
On ceffe auffi d’etre fujet ou citoyen d’un état,
quand on eft banni à perpétuité, en punition de
quelque crime ; car du moment que l’état ne veut
plus reconnoître quelqu’un pour un de fes membres,
& qu’il le chaffe de fes terres, il le tient quitte des
engagemens où il étoit en tant que citoyennes Jurif-
confultes appellent cette peine mort civile. Au refte ,
il eft.bien évident que l’état, ou le fouverain, ne peut
pas chaffer un citoyen de fes terres quand il lui plaît,
& fans qu’il l’ait mérité par aucun crime.
On peut enfin perdre la qualité àe fujet d’un état,
par l’effet d’une force fupérieure de la part d’un ennemi,
par laquelle on eft obligé defe foumettre à fa
domination : c’eft encore là un cas de néceffité, fondé
fur le droit que chacun a de pourvoir à fa. cônfer-
vation.
Je finis par répondre à la queftion la plus importante
qu’on faffe für les fujets, vis - à - vis des fouve-
râins. On demande donc fi un fujet peut exécuter innocemment
un ordre qu’il fait être injufte, & que
fon fouverain lui prefcrit formellement; ou s’il doit
plutôt refufer conftamment d’obéir, même au péril
de perdre la vie.
Hobbes répond qu’il faut bien diftinguer, fi le
fouverain nous commande de faire, en notre propre
nom, une aâion injufte qui foit réputée nôtre, ou
bien s’il nous ordonne de l’exécuter en fon nom êc
en qualité de fimple inftrument, & comme une a&ion.
qu’il réputé fienne. Au dernier cas, il prétend que
l’on peut fans crainte exécuter l’attion ordonnée par
le fouverain qui alors en doit être regardé comme
l’unique auteur, & fur qui toute la faute en doit retomber.
C’ eft ainfi, par exemple, que les fo.ldats doivent
toujours exécuter les ordres de leur prince,
parce qu’ils, agiffent comme inftrumens, & au nom
de leur maître. Au contraire, il n’eft jamais permis
de faire en fon propre nom une a&ion injufte, directement
oppofée aux lumières d’une confciencê éclairée.
C’eft ainfi qu’un juge ne doit jamais $ quelque
ordre qu’il en ait du printe, condamner un innocent
ni un témoin à dépofer contre la vérité.'
Mais, cette diftindlion ne leve point la difficulté;
car de quelque' maniéré qu’un fujet agiffe dans tous
les cas illicites, foit en fon nom, foit au nom dû
fouverain, fa volonté'concourt à l’aétion injufte &
criminelle qu’il exécute. Conféquemment, où il faut
toujours lui imputer en partie l’une & l’autre aèhôn ,
ou l’on ne doit lui en imputer aucune. Il eft donc
vrai que dans tout ordre du fouverain évidemment
injufte, ou qui nous paraît tel, il faut-montrer un
noble courage, refufer de l'exécuter ; & réfifter
de toutes fes forces à I’injuftice, parce qu’ il vaut
mieux obéir à Dieu qu’aux hommes, quel que foit
M M mm ij