pour lier cette dorure , qui n’eft arrêtée que par la
corde; c’eft-à-dire, que dans les parties de dorure
qui font tirées, & qui ont une certaine largeur ; le
diffinateur a foin de lailier des cordes à jfon choix,
lelquelles n’étanr.pas tirées, & fe trouvant à diftance
les unes des autres , arrêtent la dorure , & lui donnent
plus de relief, parce qu’elles portent plus d’é-
loignement que le fil ordinaire qui la lie. La diftance
ordinaire. des cordes qui ne font point tirées, afin
d’arrêter la dorure , eft de 13 à 14 cordes; au lieu
que dans les liages ordinaires , elle ne pafle pas
pour les plus larges , 5 à 6 cordes. Outre le brillant
que le liage par la corde donne à la dorure , le defli-
nateur qui le marque au deffein, a encore la liberté
de diftribuer ce liage à fon choix, tantôt à droite ,
tantôt à gauche, dans une partie de dorure en rond,
quarrée ou ovale, comme il lui plaît , dans une
feuille de dorure, à former les côtés, ce qui ne fe peut
avec la lifte ordinaire. Cette façon de tirer la dorure
étant peinte fur le deflein, il n’eft pas de doute que
le deflinateur ne la diftribue d’une façon à faire briller
davantage l’étoffe, & qu’il ne la repréfente comme
une broderie parfaite.
Malgré la beauté que l’étoffe acquérera par cette
façon arbitraire de lier la dorure, il s’y trouveroit
un defaut, auquel on a voulu remédier. Trente années
ou environ fe font paffées, fans qu’on ait pu y
parvenir. La corde de la maille qui lioit cette dorure,
& qui tenoient ordinairement dans les fonds gros-
de-tours , huit fils Amples , ou quatre fils doubles ,
qui compofent la dent du peigne, étoit trop groffe,
en comparaifon des autres liages qui ne font que d’un
fil Ample, ou deux fils dans le taffetas ou gros-de-
tpurs, parce que ce genre d’étoffe eft ourdi de même,
& qu’il n’eft pas poflible de féparer le fil qui a été
double par 1 ourdiffage. Il falloit donc trouver le
moyen de diminuer la groffeur de ce liage, fans déranger
néanmoins la. variation qui lui eft donnée,
pour qu’il foit parfait ; & voici comment en eft venu à
bout un des plus habiles fabriquans de Lyon.
On a dit ci-devant, que le deflinateur peignoit
fon liage par la corde, pour lui donner l’agrément
qu il defiroit; la lifeufe laiffoit en fond cette corde
peinte, afin que n’étant pas tirée , elle formât une
découpure , qui arrêtoit ou . lioit la dorure. On a
fuivi le même ordre , quant à la façon de peindre le
deffein; mais au lieu de laiffer en fond la corde def-
tinee a lier la- dorure, il a fallu au contraire en faire
un lac particulier , & la faire lire comme les autres
couleurs.
Lorfqu’il eft queftion de fabriquer l’étoffe, on fait
tirer le lac qui contient les différentes cordes defti-
nées à lier la dorure ; ce lac étant t iré , l’ouvrier au
moyen d’une marche particulière , pofée exprès ,
fait baiffer une des quatre liftes du rabat de la chaîne ,
laquelle failant baiüer de même un des quatre fils
doubles de la maille, il paife une petite baguette de
fer ronde & bien polie dans la féparation des fils ,
que chaque maille tirée a fait le v e r , de façon qu’il
fe trouve un fil double de chaque maille deflous la
baguette de fer. Cette opération faite, il pouffe la
baguette de fer du côté, du peigne, & immédiatement
après, il fait tirer le lac de la dorure qui doit
etre hee par la corde, en laiffant aller le lac des cordes
meme , fous lefquelles la baguette a été paffée.
Ce lac étant tire, les cordes qui doivent lier relient
en fond comme à l’ordinaire ; mais la baguette qui
eft couverte des trois quarts des fils de chaque maill
e , étant levée par les autres parties de fo ie , fous
lefquelles la dorure doit être paffée ; elle leve par
conféquent les trois quarts des fils de chaque maille
dont elle eft couverte, & ne laiffe dans le fond que
le feul fil double qui a été baiffé , lorfqu’on a tire le
lac du liage qui fert feul à lier la dorure, au lieu des
quatre qui la lioient précédemment, après quoi l’ouvrier
la tiré pour paffer les autres dorures & les couleurs
dont l’étoffé eft eompofée.
Cette baguette eft un peu plus groffe que celle qui
forme dans le velours cizelé, celui qui n’eft pas coupé
, 6c qui vulgairement eft nommé velours f i ifé; elle
a la même longueur & paffe tranfverfalement fur l’étoffe.
ï
Cette façon de lier la dorure, eft fans contredit
une des plus belles inventions qui ait été trouvée
dans la fabrique, eu égard à l’état aftuel oit elle fe
trouve.
Quelques fabriquans pour fe diftinguer ont voulu
faire des étoffes liees de même , fans fe fervir de la
baguette de fer , qui a fait donner à l’étoffe le nom
d’étoffe à la broche , parce que dans le patois de
L y o n , on appelle ordinairement broche, une petite
baguette de bois, de fer ou de laiton ; ils y-ont reuflï
en faifant ourdir un poil de 10 portées , compofant
800 fils ; mais pour faire cette opération, il falloit
800 mailles de plus , pour contenir les 800 fils de
poil, conféquemment 400 cordes de rame, & 400 à
chaque femple de plus, ce q u i, avec le fil de lac
d’augmentation , faifoit un objet de trois à quatre
cens livres de dépenl'e pour l’ouvrier, indépendamment
de l’embarras de cette quantité de cordages
qui retarde toujours la fabrication : au lieu que dans
l’étoffe à la broche, il n’y a rien à changerai! métier
ni au travail, A ce n’eft le tems de la paffer, qui n’eft
rien pour ainfi d ire, ce qui a fait donner la préférence
à la première invention!
Etoffes riches qui ne peuvent fe faire que Vendroit def-
fus. La Ruflie & quelques provinces du N ord, tirent
de la fabrique de Lyon , des gros-de-tours fans
nuances , qui font très-riches.
Les -étrangers veulent des. étoffes pour -l^iver ’
qui aient beaucoup d’apparence, & qui ne (oient
pas cheres , de façon qu’ elles ne (ont brochées qu’avec
delà lame d’or ou d’argent, qui eli l’efpece de
dorure qui a le plus de brillant , cé qui convient
parfaitement à l’un & à l’autre fexe qui ne s’habille
pour ainfi dire', que la nuit, les jours y étant trop
courts en hiver ; il eft vrai qu’on y envoyé aufli des
marchandifes très-riches’ ;,, dans le goût ordinaire ■
mais comme la firmiere favorife plus que les autres
celles qui font faites feulement avec de la lame
celles-ci ont la préférence.
La raifon qui fait que les étoffes fabriquées avec
de la lame feulement, exigent que l’endroit foit def-
fus, ne pouvant être faites aufli belles & à aufli ben
prix , fuivant la méthode ordinaire, demandent une
explication détaillée ; il faut la donner.
Les découpures qui font néceffaires pour donner
aux fleurs, feuilles & tiges, l’agrément qui leur conv
ien t, pour qu’elles foient parfaites, refteroient en
fond de la couleur de la chaîne, dès qu’il n’y auroit
qu’un lac broché Sc appauvriraient f étoffe , ce qui
eft le langage ordinaire, parce que les découpures
étant pu plus grandes ou plus petites , fuivant que
les feuilles ou les fleurs l’exigent pour leur perfection,
diminueraient leur brillant, attendu l’oppo-
lition qui fe trouveroit entre la Joie qui paroîtroit
terne, en comparaifon de la lame, & cette même
lame dont l’éclat feroit diminué ; il eft vrai que l’on
pourrait faire lire un fécond lac qui ne contiendrait
que ces découpures, 8c le brocher en frifé de la même
dorure de la lame , c’eft-à-dire o r, fi la lame
etott or ,8 c argent, fi la lame étoit de même ; pour
lors la découpure étant brochée 8c couverte par un
m iè , la fleur, la feuille ou la tige feraient également
riches , êc l’étoffe ne feroit point appauvrie. Il n’eft
pas poffible de trouver une autre méthode pour une
étoffé, dont l’endroit eft deffbus. Dans ce cas, un
lac déplus augmenterait la façon de l’otiyfage 8c lq
frile la matière , par conféquènt le prix de l’étoffe.
Les fabriquans de la ville de Lyon, ingénieux à
faire des étoffes , dont le bon marché leur procure
la préférence, &- fatisfaffent les perfonnes qui veulent
briller à peu de frais , ont trouvé le moyen de
faire l’étoffe aufli belle , avec un lac feul, & fans y
ajouter de frifé , en baillant l’endroit deffus.
Ils font pour cet effet defliner le deffein â l’ordinaire
, & ne font peindre que la corde qui fait le
contour des fleurs, feuilles, fruits & tiges, de même
que les découpures grandes & petites, qui fe
trouvent dans tous ces fujets , c’eft le terme; ils font
lire les parties peintes qui font d’une feul couleur
le vuide qui fe trouve entre ces parties peintes
forme le deffein, pour lors la bordure des fleurs
feuilles, fruits & tiges, de même que les découpiîr
res étant tirées pour brocher la lame, l’ouvrier fait
bailler trois liffes du rabat du gros-de-tours , au
moyen d’une marche pofée exprès pour cette opération
, les trois liffes rabattant les trois quarts de la
chaîne; le quart qui demeure levé , ayant du vuide
par la féparation des trois quarts qui baiffent, forme
un liage ferre, fous lequel la lame étant paffée elle
fait un efpece de frile , qui paroît A peu différent de
la lame ordinaire, qu’il n’eft perfonne qui ne s’y
méprenne; & comme la lame n’eft liée que parla
çorde, le liage ne fe trouvant que d’un feul fil, au
lieu de quatre, il produit le même effet que dans
les étoffés à la broche. Obfervez que le liage eft
abfôlument peint & lié avec les découpures & les
cordes qui forment le contour des fleurs , feuilles
fruits & tiges , dont le deffein eft compoféT
Cette invention , à la broche p rès, n’eft pas une
des moindres de la fabrique , on peut dire même
qu’elle a eu des admirateurs.
Il fe fabrique des étoffes , auxquelles on a donné
le nom de péruviennes, qui font faites au bouton, qui
font legeres, jolies & à bon marché.
, Elles font compofées d’urie chaîne de 50 à 60 portées
, ourdie en deux couleurs différentes ; chaque
couleur de la chaîne a un corps particulier ; les deux 1
corps donnent lieu à deux lacs différens, lefquels
fe tirent fucceflïvement l’un après l’autre ; on pafle
un coup de la même navette fous chacun des deux
lacs tirés, la couleur de la trame qui eft dans la navette
eft différente de celle des deux chaînes , de façon
que l’étoffe montre trois couleurs différentes
ce qui compcfe une étoffe aufli belle que le deffein
peut y contribuer , & qui ne revient pas chere.
Cette étoffe n’a point de liffes pour le coup de
fonds , les fils qui le forment font paffés dans les
mai! les ; on a foin de faire lire le fonds avec la figure •
de façon qu’au moyen de la tire , l’un & l’autre fe
fait enfemble.
En fuppofant la chaîne d’une étoffe femblab^e de
6.0 portées , elle contient 4800 fils. Chaque fil doit
avoir limaille de corps , afinque le fondspuiffe fe
B u | B «1 eft dans un taffetas ; favoïr un pris 8c
un laifle : il faudrait donc par 'conféquent 4800
jP.ai .“ ? c° rPs & autant d’aiguilles de plomb pour
taire baiffer la maille quand on.laiffe aller le lac tiré:
or dans cette étoffe n r fÿ ti réoaiguillesfuffifentpour
cette operation , 8c voici de quelle-façon on s’v
prend. , -,
Comme les deffeins de la péruvienne font petits
ceux qui portent 30 lacs d’hauteur ont 60 filles fo-
voir 30 pour chaque couleur de lq chaîne, plus ou
moins à prùportionde la hauteurdu deffein jlesliffes
rdns m i T / ? c>u’il s’en trouve toujours une
L e le. H B R m de deux Pouces au moins quoique
les maifles foient de hauteur égale. Cette préportènt
crue h B B I afin Sue 6° ou 80 liffeL e
portent que la moitié de la diftance que les lifleS ont
ordinairement entr’ellesç chaque liffe ne porte que
deux aiguilles, de façon qu’au moyen de cette façon
rn, T V 6'CT metler ’ ï u lleu de 4S00 aiguilles, ; ao
ou ,6oluh,iem pour faire l’étoffe. Il faut obferver
encore que ces liffes font faites de façon qu’il y a
une diftance de trente mailles chaque liffe i l’une â
1 autre fi le mener eft de do , & de 40 s’il eft de 80
afin que chaque marlie puiffe fe trouver régulière-
ment à la place du fil dans laquelle il doit être placé
pour qu il ne foit point contrarié ; Ces fortes de liffes
(ont appeüées lîjjêt à jour , par rapport à l’éloiene-
ment des mailles. Les hfferons fur lefquels,font mon-
de B § % ° n . n’ont pas plus d’une
ligne d epaiffeur, ce qui,fait que 60 liffes ne portent
guere plus de trente lignes ou trois pouces, par la
taçon dont on vient de démontrer que les iiff-c
etoient faites & attachées lorfqu’elles font ferrées *
mars comme dans le travail elles ont bèfôin d’uns
certaine diftance pour qu’elles puiffent avoir du ieu
la diftance ordinaire eft toujours de fix pouces enl
vnon. ° n évité par cette façon de monter le métier
1 embarras de deux corps , fans lefquels on ne fiuroft
f i re une étoffé, quand elle eft façonnée,, outre les
quatre piemier.esjbffes qu’on ne (aurait s’épargner
poui en faire le fonds ’ s ’ »r r 6 *
Pour que le deffein paroiffe plus long, ou aitolus
,de haute ut dans une étoffe, de Cette efpece , le deflî-
. nateur a fpm de le compofer de maniéré qu’il foit
rapete, c eft-à-dire’, qu’on jjùiffërévenir furfes pas
en tirant le bouton , ce qui .s'appelle de/Tmer
mm En confluence aulieu de paraître de 30 coups
d h;u!leiu; * lns letoffe de 60 liffes , il paroît en
avoir édl’, 8c à proportion dans lçs^ autres
.. Des fonds or guiUochés. Pour l’intelligence de cette
façon de taire des fonds or dont la dorure put par
le liage former une eipeçe de guilloché, il faut exa-
mmereequ, a été écrit fur les étoffes riches à la
proche. Voyez ci qui précédé. La façon de tra-
va,ller ies « » f t s en le fervant de la broche alon-
geort un peu le travail, il étoit néceffaire de trou-
ver un moyen qui parât à cet inconvénient 8c qui
prodttistt:eimême effet;'pouf y parvenir , on ajouta
plufieurs liffes de liage & une quantité de marïhes
équivalente à ces liffes , dont chacune doit avoir fa
marche ; dans cette quantité de marches, on en choi-
littort deux pour former un liage droit fur la lame
-n J .l“ autres 1,ffes etoient difoofées de façon
qu e fosfailoient une certaine figure dans les dorures
■ ■ hoient, neanmoins cette figure étoit toujours
la meme dans le corus du deffein , il étoit donc né-
ceffaire de trouver un moyen de diftribuer une ifaçon
de ber la dorure , qui fut différente dans toutes les
parties que 1 on vouloir qui foflèttt liées différem
m m ,ce l i n’?"roit P“ W fe fefee qu’en mettant
autant dé-lrffes 8c confequemmenf autant démarchés
que les différences du guilloché en auraient exige
, ce q u i, fur un deifein de dix dixaines, huit en
douze, arirott exige cent cnes de liage. vingt fiffes 8c autant de mar-
La méthode qui a été mife en ufage pour parvenir
il T des fonds or ou autres étoffes riches, dont le
e format des gmllochés différens dans les étoffes
a ete celle de monter dés métiersSJeux corps • faveur,
un> corps pour le poil, 8c un pour la S gM - les
premiers metle tyW été montés; favoir, to o cordes
pour la figure;, 8c 200 pour le p o il, afin de ne
point déranger l’ordre des 400 cordes, nombre ordinaire
de la plus grande quantité des métiers. Chaque
corde de rame etort attachée à deuxarcades ou deux
arcades etoient attachées à chaque corde de rame
pour faire tirer quatre mailles Je corps, ce qui foit
800 mailles a 1 ordinaire pour former la réduétion
qui eit en ufage dans la fabrique ; le fécond corps;
étoit attache de même à 400 arcades, dont deux
etoient attachées à chacune des zoo autres cordes