mer ou à qualifier les êtres ? Ceux qui fervent à nommer
les êtres font donc les fubfiantifs : or je le deman- '
de , quelle lumière peut fortir d’une pareille définition?
Les nomsfubfiantifs (ont ceux qui fervent à nommer
les êtres, c’eft dire, ce me l'emble, que les
noms fubfiantifs {ont ceux qui font des noms : définition
admirable ! Que peut-elle nous apprendie, fi
elle ne nous conduit à conclure, que les noms adjectifs
font ceux qui ne font pas des noms. C eft en
effet ce que j’entreprends de prouver ici.
J’ai déjà apprécié ailleurs (voyt{ G e n r e ) , les rai-
fon's alléguées par l’abbé Frcmant, Suppl, aux ch. i
iij. & iv. de la II.part, de la Gramrn. gén. en faveur
de la vieille diftinftion des noms en fubftanùfs Sc âd-
jeftifs ; Sc je dois ajouter ic i, que dans une lettre
qu’il écrivit à mon collègue 6c à moi le 1 1 Novembre
I 759 eut *e courage de nous dire du bien de cette
critique.« La critique, dit - i l , que vous avez faite
» au mot G e n r e , d’un endroit de mon fupplement,
eft philofophique 6c judicieufe ». Cette louange fi
flatteufe n’ eft corrigée enfuite ni par/£ ni par mais ;
elle eft diftée par la candeur, 6c elle eft d autant
plus digne d’éloges, qu’elle eft un exemple malheu-
reufement trop rare dans la république des^ lettres.
Je reprends donc le raifonnement, que je n’ai pour
ainfi-dire qu’indiqué au mot G e n r e , pour en montrer
ici le développement 6c les conféquences.
La nécefîité de diftinguer entre les fubfiantifs Sc
les adjeftifs pour établir les réglés qui concernent
l’ufage des genres, eft la feule raifon que j’aye employée
directement, Sc même fans trop l’approfondir
: je l’ai examinée plus particulièrement en parlant
du mot, article I . Sc les ufages de toutes les langues
, à l’égard des nombres Sc des cas, n’ont fait
que fortifier Sc étendre le même principe. L analyfe
la plus rigoureufe m’a conduit invariablement à partager
les mots déclinables en deux claffes generales ;
la première pour les noms & les pronoms, & la fécondé
pour les adjeCfifs Sc les verbes: les mots de la
première claffe ont pour nature commune , de- pre-
fenter à l’efprit des êtres déterminés ; ceux de la fécondé
claffe, de ne préfenter à l’efprit que des êtres
indéterminés. Les adjeftifs font' donc aufli éloignés
que les verbes de ne faire avec les noms qu’une leule
Sc même efpece.
Ce qui a pu induire là-deffus en erreur les Grammairiens
, c’eft que les adjeCtifs reçoivent, dans pref-
que toutes les langues, les mêmes variations que les
noms, des terminaifons pour les genres, pour les
nombres, Sc des cas même pour les idiomes qui le
comportent : la déclinaifon eft la même pour les uns
Sc pour les autres par-tout où on les décline, en
grec , en latin , en allemand, &c. Ajoutez à cela la
concordance de l’adjeCtif avec le nom, Sc de plus l’unité
de l’objet défigné dans la phrafe par l’union des
deux mots : que de raifons d’errer pour ceux qui
n’approfondiffent pas affez, Sc pour ceux qui fe
croient grammairiens parce qu’ils en ont appris la
partie pofitive Sc les faits, quoiqu’ils n’en aient jamais
pénétré les principes!
Les noms, que l’on appelle communément fubf-^
tàntifs, Sc que je n’appelle que noms, font des mots qui
préfentent à l’efprit des êtres déterminés par l’idée
précil'e de leur nature : Sc les adjeftifs font des mots
qui préfentent à l’efprit des êtres indéterminés, désignés
feulement par une idée précife qui peut s’adap-.
ter à plufieurs natures. Voye^ Mot , article /. & Nom.
C ’eft parce que l’idée individuelle de l’adjeftif peut
être commune à plufieurs natures, Sc que ie fujet en
eft indéterminé, que l’adjeftif reçoit prefque partout
les mêmes accidens que les noms Sc d’après les mêmes
réglés, afin que la concordance des accidens
puiffe fervir à constater le fujet particulier auquel on-
applique l’adjeftif, & à la nature duquel on adapte
l’idée particulière qui en conftitue la lignification
propre. Mais la manière même dont fe réglé par-tout
la concordance, loin de faire croire que le nom Sc
l’adjectif font une même forte de mots, prouve au
contraire qu’ils font néceflàirement d’efpeces différentes
, piufqu’il n’y a que les terminaifons de l’adjeftif
qui foient affujetties à la concordance , & que
celles des noms fe décident d’après les vues différentes
de l’efprit Sc les befoins de l’énonciation.
Je crois donc avoir eu raifon de réferver la qualification
de fubfiantifs pour les feuls noms qui défi-
gnent des êtres qui on t, ou qui peuvent avoir une
exiftence propre Sc indépendante de tout fujet, ce
que les Philofophes appellent des fubfiances : tels lont
les noms être, J'ubflance, efprit, corps, animal, homme,
Cicéron , plante, arbre, pommier, pomme, armoire,
Scc. La branche de noms oppofés à ceux-ci, eft celle
des abftraftifs. Voye^ Nom .
IL Verbe fubfiantif Le verbe eft un mot qui préfente
à l ’efprit un être indéterminé, défigné feulement
par l’idée précife de l’exiftence fous-un attribut.
V o y e i V e r b e . Un verbe qui énonce l’exiftence fous
un attribut quelconque Sc indéterminé, qui doit être
enfuite exprimé à-part, eft celui que les Grammairiens
appellent verbe fubfiatitf: c’ eft en françois le
verbe être, quand on l’emploie comme dans cette
phrafe , Dieu efl jufle, où il n’exprime que l’exiften-
ce intelleftuelle, lans aucune détermination d’attribut
, puifque l’on diroit de même Dieu eflfage, Dieu,
efl tout-puiffant, Dieu efl attentif à nos befoins , Scc.
Voyc{ VE R B E .
La diftinftion des noms en fubfiantifs Sc adjeftifs,
me femble avoir été la feule caufe qui ait occafionné
une diftinftion de même nom entre les verbes; Sc
cette dénomination n’eft pas mieux fondée d’un côté
que de l’autre. Je crois qu’il y auroit plus de jufteffe'
Sc de vérité à appeller abflrait, le verbe que l’on
nomme fubfiantif, parce qu’ en effet il fait ahftrac-
tion de toute maniéré d’être déterminée ; Sc alors
ceux que l’on nomme adjectifs devroient s’appeller
concrets, parce qu’ils expriment tout-à-la-foîs l’exi-
ftence Sc la modification déterminée qui conftitue
l’attribut, comme aimer, partir, Scc.
SUBSTANTIVEMENT, adv. c’eft-à dire à la maniéré
des fubfiantifs. On dit en Grammaire qu’un adjeftif
eft pris fubfiantivement, pour dire qu’il eft employé
dans la phrafe à la maniéré des fubftantife, ou
plutôt à la maniéré des noms : « Ce qui ne peut arri-
» ver, dit M. du Marfais ( Trop. part. I I I . art. y . ) ,
» que parce qu’il y a alors quelque autre nom fouf-
» entendu qui eft dans l’efprit, par exemple, le v r a i
» perfuade, c’eft-à-dire ce qui efl vrai, l'être vrai, ou
» la vérité; le TOUT-PUISSANT vengera les F 01-
» b l é s qu'on opprime, c’ eft ^à-dire Dieu qui eft tout-
» puiffant vengera les hommes foibles ».
S i, quand un adjeftif eft employé feul dans une
phrafe, on le rapporte à quelque nom foufenrendu
qu’on a dans l’efprit, il eft évident qu’alors il eft employé
comme tous les autres ad j eft ifs, qu’il exprime
un être déterminé accidentellement par l’application
aftuelle à ce nom foufentendu, en un mot qu’il n’eft
pas pris fubfiantivement, pour parler encore le langage
ordinaire. Ainfi quand on dit, Dieu vengera les
f o i b l e s , l’adjeftiffoibles demeure un pur Sc véritable
adjeftif ; Sc il n’eft au pluriel Sc au mafeulin, que
par concordance avec le nom foufentendu les hommes
, que l’on a dans l’efprit.
Il y a cependant des cas où les adjeftifs deviennent
véritablement noms : c’eft lorfque l’on s’en fert
comme de mots propres à marquer d’une maniéré
déterminée la nature des êtres dont on veut parler,
& que l’on n’envifage que relativement à cette idée,
en quoi confifte effeftivemefit la notion des noms.
Que je dife, par exemple, ce difcours eft f r a i ,
une VRAIE définition tfrle germe de toutes les connoif-
fanceepoffibles fur Vobjet défini /l’adjeftif vrai demeure
adjeftif, parce qu’il énoncé une idée que l’on n’envifage
dans ces exemples que comme devant faire
partie de la nature totale de ce,qu’on y appelle d f-
cours Sc définition, Sc qu’il demeure applicable à
toute autre chofe félon l’occurrence, à une nouvelle,
à un récit, à un fyftême, &c, Auffi vrai, dans le premier.
exemple, s’accorde-t-il en genre Sc en nombre
avec le nom dfeours ; Sc vraie, dans le fécond exemple,
avec le nom définition, en vertu du principe d’identité.
V o y e [ C o n c o r d a n c e , I d e n t i t é .
. Mais quand on dit, le V R A I perfuade, le mot vrai
eft alors un véritable nom , parce qu’il fert à préfenter
à l’efprit un être déterminé par l’idée de la nature
; la véritable nature à laquelle peut convenir l’a-
tribut énoncé par le verbe perfuade , c’eft celle du
vrai: & il n’eft pas plus raifonnable d’expliquer le
mot vrai de cette phrafe, par ce qui tft vrai, l ’être vrai,
la vérité, que d’expliquer le mot homme de celle-ci,
Y H O M M E eft fociable, par ce qui eft homme, l'être
homme, l'humanité ; à moins qu’on ne veuille en venir
à reconnoître d’autre nom proprement dit que
le mot être, ce qui ferait , je penfe, une autre abfür-
dité.
Dans la langue latine qui admet trois genres, on
peut ftatuer, d’après ce qui vient d’être dit, qu’un
adjeftif au genre mafeulin ou au genre féminin, eft
toujours adjeftif, quoiqu’il n’y ait pas de nom exprimé
dans la phrafe.
Il faut ici foufentendre homines, avec lequel s’accordent
egalement les deux adjeftifs bonos Sc peritos.
Mais un adjeftif neutre qui n’a, ni dans la phrafe
où il fe trouve, ni dans les précédentes, aucun corrélatif,
eft à coup sûr Un véritable nom dans cette
phrafe; Sc il n’eft pas plus néceffaire d’y foufenren-
dre le nom negotium, que de foufentendre- en français
être, quand on dit, Le vrai perfuade. Si l’ufage a
préféré dans ces occafions le genre neutre; c’eft ,° i0.
qu il falloit bien choifir un genre ; Sc z°. que l’efpece
d’etres que l’on défigné alors n’eft jamais animée-, ni
par conlequent fujette à la diftinftion des féxes.
Remarquez que l’adjeftif devenu nom, n’eft point
ce que j’ai appëllé ailleurs un nom abftracUf, voye{
Nom . C’eft un véritable nom fubllantif, dans le fèns.
que j’ai donné à ce mot ; Sc c’eft la différence qu’il y
a entre le vrai Sc la vérité; la même qu’il.y a entre
l'homme ScY humanité. D ’où il fuit que l’adverbe fubf-
tantivement peut refter dans le langage grammatical
pourvu qu’il y foit pris en rigueur. (£. R. M. B.)
, SUBSTANTION, S u s t a n t i o n , S o s t a n t i o N V
(Géog. ifiodi) ancienne petite ville ou bourgade de
la Gaule narbonnoife : elle ne fubfifte plus. Catel-
affure que de fbn tems, on voyoit encore fies ruines
à mille pas du grand chemin qui va de Montpellier à
Nifmes, Sc à pareille diftancë de Montpellier, près
des villages de Caftelnau Sc de Clapiers. Cette ville à
eu long-tems fes propres comtes, qui ne relevoiént'
d’aucun autre feigneur. (D. A)-
f SUBSTITUT,, f. m. (G ram. Jurifp.) eft un officier
établi pour en remplacer un autre en cas d’abfence ,
maladie ou autre empêchement.
On confondoit anciennement le titre de fubfiitut,
avec celui de lieutenant, & on donnoit l’un ou l’autre
indifféremment à tous ceux qui remplaçoient
quelque officier public, foit juge ou autre officier
dejuftice.
L ordonnance du z 3 Mars 13ôz porte, art. 2 2. que
les fénéchaux, baillifs^viguiers, vicomtes, juges Sc autres
officiers dejuftice exercerontleurs offices en per-
lonne, Sc qu’ils ne pourront commettre en leur placé
Qcsfubfiituts ou des lieutenans, qù’en cas de. nécefftté,
comme eh cas de maladie, ou qu’ils aillent au
confeil ; que dans ces fortes de cas ils prêfldfOnt
pour fubfiiiutstles perfonfleS du pays, fages St éelâi*
rées qui ne feront pas avocats, ou ffirchargésd’affai»
res, ni liés avec un trop grand nombre d’amis ; qu’ilà
feront refponfables félon droit Sc raifon du fait dé
leurs fubflitttts, Sc que ceux-ci prêteront ferment de
bien ffiire leur devom
Préfentement on ne donne le titre dé fubfiitut
qu’aux officiers établis pour aider le procureur-génc*
r a l, ou le procureur du roi dans leurs fonctions»'
Les procureurs au parlement ont auffi des fubfli*
tuts. ( A )
S u b s t i t u t s d u procureur-général d u r ô î :
anciennement il n’en avoit point d’ordinaire , Sc étj
commettoit feulement dans les occafions où c élit
étoit ncceflàire. On trouve dans les regiftres du parlement
fous la date du 1 4 Novembre i j o o , que M.
Sureau, procureur-général, ayant demandé la per-
million de s’abfenter , la cour en le lui permettant
lui ordonna de laifler un fubflicut pour l’expédition
des affaires.
La fonftion de ces fubfiitut s ne dufoit pas. plus que
la caufe pour laquelle ils avoient été commis.
Dans la fuite le procureur-général Commit plu-
fieursfubfiituis pour l’aider dans fes fonftions, Sc
ceux-ci devinrent ordinaires. En effet, lorfque le parlement
fut transféré à Poitiers-, M. Angevin , procureur
général , eut l'attention de deftituer ceux de fes
fubfhtuts^qui ne purent le fuivre. La portion du parlement
qui étoit retenue à Paris par les Anglois, corn-*
mit M. le T u é , avocat-général, pendant l’àbfence de
M. Angevin, pour exercer^l'office de ladite procure;
Lorfque la place de procureur-général VenDit à
vaquer parle décès de celui qui eh étoit pourvu, la
cour eonfirmoit les fubfiitutsqu’i 1 s’éroit choifis , SC
les commettoit pour en remplir les fonftions pendant
la vacance'.
Les chofes demeurèrent e.11 cet état jufqti’au mois
dé Mai 1^86, que les fubfiituts du procureur-général
fiirent créés en titre d’office dans toutes : les cours
fouveraines, comme ils font encore préfèntement.
Au parlement dé Parisî'ls font au nombre de 18.
Ils ont réuni à leur corps la charge d’aVocat-géhéral1
aux requêtes du palais, qu’il$ e?;çrcentpnr celui d-cn-
tre eux qui eft commis à cét effet. '
Il y en a auffi dans là plupart des autres cours ,
mais le nombre n’ en eft pas par-tout égal.
Toutes leurs fonftions font renfermées dans deux'
objets ; l’un, de foulager le prbeureur-général danj fes
fonftions, chmme de lui faire' au parquet le rapport?
des mftànces y dans lefquelléç' il doit donner fes'cpn*«'
clufions-;-l’aiifre , de le remplacer dans le cas oh i l
ne peut vaquer par lui-même à lfxpfidiijon des affairés
dont il eft chargé. ‘ "
Le procureur-général qualifié auffi dç feffubflhuts’
les! procureurs du roi desfiegés'du Veflbrt tlè 1« cotir;1
ôn en trouvé un1 exemple dès 1344, danV Ï’orddhr
fiancé de Philippe de Valois ,‘ du mois ’de Juillet de!
laditÊ-ahnée, Sc en cas d’ëmpêéhement dè leur jyart /
il commetdes^^»iïpçùrTes-reffiplà:cér,iQri’^i’iI:
n’en ont point; mais dans leur fiege Sc dàrii touâ dlt-f
très, aftes, les procureurs du roi doivent erré qualifiés
dé ce titre de procureur dii ro i, Sc non'dé éèlui,
de fubfiituts du procureur-général. ( ^ )
Subflituts. du procureur dû roi, anciennement les
procureurs du roi n’avoient pas la ficulté de fé’h’djn^
mer des fubfiituts pour exercer leurs fondions',' rrtêifiç
en leur abfence ou autre empêchement, celaii’appar-'
tenoit qu’au procuréur-géricràl. L'art. ifS de l ’ôr-,
donnance de Blois, défendit aux procureurs du roi
de commettre aucuns fubfiituts èri leur place , quand
les avocats du roi feroieift préfens.
L’Edit du mois de Mai 1586, avoit créé en titra