XX. On a bientôt fait en divifant & fubdivifant
>tout en genres, en claffes Sc en efpeces : le vrai phi-
•lofophe rejette ces divifions puériles : un faifeur de
fyftèmes politiques qui voudra renouveller l’idée que
d’afl'ez bons efprits ont eue (féduits par la fimplicité
Sc l’unité des moyens ) , de réduire tous les impôts à
imfeul, diviferaune nation en vingt claffes; il fup-
pofera qu’il y a deux millions de contribuables ; il
aflùrera que c’eft bien affez de taxer cent mille per-
fonne à un écu, que ce n’eft pas trop d’èn taxer cent
mille autres à 750 liv. il ne verra pas qu’il impofe
plus de la moitié de la nation à plus de 400 liv. Ce
plan fera faifi avec une efpece d’enthoufiafme par
ceux qui ne font point inftruits de ce qui peut former
la finance d’un état : quelques écrivains voudront
corriger’ les vices de la première expofition du projet
; ils tâcheront, en en confervant le fonds, de le
revêtir d’une forme régulière : tous préfenteront un
total qui s’élevant à une fomme exceffive, leur fera
penfer qu’ils ont fait développer une découverte de
génie : aucun de ces réformateurs ne fe fera apperçu
qu’il ne fuit ni états ni facultés , ni reffources ; qu’il
ne diftingue ni confommation, ni utilité abfolue, ni
befoin d’opinion ; Sc qu’enfin une telle opération ne
•peut être admife dans une monarchie oit il y a dit
luxe , de l’induftrie , du commerce, une banque Sc
une diverfité de produêiion, de revenus y d ’occupa-
tions , de moyens Sc d’intérêts généraux Sc particuliers
dont le détail feroit immenfe. Il efl rifible de
confidérer tant de gens qui ont la vue foible & mau*
vaife, qui n’ont ni ordre, ni jufteffe ; qui font incapables
de fentir qu’un principe, quoique fimple, a
des réfultats compliqués, Sc qu’un enfemble régulier
eft formé d’une multitude de parties' fagement
combinées; il eft, dis-je, rifible de les voir s’échauffer
, prendre la plume, fe croire infpirés, parce qu’ils
ne peuvent fe croire inftruits , Sc s’ériger en législateurs.
Ces confidérations, continue l’auteur, n’étoient
point deftinées à v oirie jour;‘mais les circonftances
ont paru trop convenables à fa publication , pour
qu’il fe refusât de mêler fa foible voix à celle que
plufieurs bons citoyens font entendre fur les objets
relatifs à la profpérité de l’état. On ne trouvera ici
de prétention que celle de faifir le vrai : ce qui a paru
tel eft énoncé fans la déclamation qui lui nuit, Sc
avec le refpeft dû à l’adminiftration publique qui ne
l’altere pas. Le ftyle de la difcuflion n’a point comporté
la véhémence avec laquelle on s’exprime fur
les matières de finance dans un difcours couronné
par l’académie françoife ; & la délicateffe de l’écrivain
ne lui a pas même permis d’employer des traits
suffi vigoureux, que ceux qui font répandus dans l’éloge
éloquent de M. de Sully.
SUBSIDIAIRE, adj. & fubft. {Gram. & Jurifprudé)
«ft ce qui n’a lieu que comme un dernier recours,
une derniere reffource.
L’hypothèque fubjidiaire eft celle que l’on accorde
«n certain cas fur des biens , qui naturellement ne
•dévoient pas y être fujets, Sc au défaut de recours
fur d’autres biens , telle que celle de la femme pour
fa dot pour les biens fubftitués. Voye^ Hypothèque
■ & Substitution.
Les conclufions fubjîdialres font celles que l’on
prend pour le cas où l’on n’obtient pas l’adjudication
-des premières conclufions.
Les moyens fubfidiaires , font ceux que l ’on fait
valoir -dans le cas où ceux que l’on a propofés les
premiers ne réuffiroient pas. (A )
SUBSIDIAIREMENT, adj. (Gram. & Jurifprud.)
eft ce qui eft demandé ou employé au défaut d’une
-autre cnofe. Voye^ ci-devant Subsidiaire. (A )
SUBSISTANCE, SUBSTANCE , (Synonyme.) le
premier de ces mots veut dire proprement ce qui
fert à nourrir, à entretenir, à faire fubfifter dè
quelque part qu’on le reçoive. Le fécond fignïfie tout
le bien qu’on a pour fubfifter étroitement, ce qui eft
abfolument néceffaire pour pouvoir fe nourrir , Sc
pour pouvoir vivre.
Les ordres mendians trouvent aifément leur fub-
Jîflance ; mais combien de pauvres honteux qui confirment
en douleur leur fubftance Sc leurs jours ? combien
de partifans qui s’engraiffent de la pure fubfi
tance du peuple, & qui mangent en un jour la fubfif
tance de cent familles ? C ’eft la Bruyere qui le di-
foit déjà des partifans du dernier fiecle. (D . J .)
S u b s i s t a n c e •, (Art milit.)i\ y a deux fortes dè
fttbjijlances : les unes fe trouvent dans le pa ys , comme
les fourrages, S i foùvent les grains pour les distributions.
Les autres fe tirent de loin , comme lé
pain, le v in , la viande, Sc les menues fournitures
de l’armée. Le bois Sc la paille font des commodités
indifpenfables. Nous parlerons de toutes ces différentes
fubjlances, dont un général a foin que fon armée
foit pourvue, parce que leur défaut a de dangereux
fes conféquences. Commençons par les fourrages.
Ils font de la derniere néceffité dans une arméeI
Sc un général a l ’attention de fe camper de telle
forte que l’ennemi ne puiffe les lui enlever, ni les lui
rendre difficiles-. Il eft de fa prudence Sc fon intérêt
de n’en pas laiffer manquer à fes troupes. Il doit en
empêcher le dégât, furtout s’il féjourne dans fon
camp un tems confidérable. La confommation des
fourrages verds eft beaucoup plus grande que celle
des fecs , mais auffi la quantité en eft beaucoup plus
grande fur la terre, parce que l’ennemi ne la peut
diminuer ; au lieu qu’il peut détourner les fecs, les
emporter, les mettre dans les places, Sc même les
confirmer par le feu.
La paille eft utile en plufieurs occafions; dans le eom«!
mencement de la campagne, elle fert pour coucher les
hommes: après la récolte on fe baraque avec de la paille
, on en fait des écuries pour les chevaux, parcè
que dans cette-faifon les jours deviennent pluvieux,
Sc les nuits plus froides. A la fin de la campagne*
quand les fourrages font éloignés des camps, où l’on
eft obligé de féjourner long-tems, ou quand les mauvais
chemins les rendent plus difficiles à être portés
en trouffe ait camp, la paille hachée pour les chevaux
, Sc mêlée avec un peu de grain eft excellente*
Il feroit même à fouhaiter qu’on leur donnât cette
nourriture pendant la campagne, il en périroit moins,
ils feroient dans un meilleur état, Sc réfifteroientplus
long-tems à la fatigue.
Il faut du bois dans les armées, tant pour chauffer
les hommes, quand les chaleurs font paffées, Sc
pour cuire, que pour les effuyer après les pluies. Oiî
doit tenir la main à ce qu’on ne diffipe pas le bois
des charpentes Sc des édifices, empêcher qu’on ne
les brûle pour le chauffage ; & obliger l’officier Sc le
foldat de prendre le bois dont ils ont befoin, dans les
bois qui font fur pié. Une armée s’en trouve mieux
dans la fuite -de la guerre. Par ce moyen , les habi*j
tans reviennent apres le départ de l’armée , ne cef-
fent pas la culture de leurs terres, & l’on les trouve
fertiles l’année fuivante , fi on y reporte la guerre.
Un général, autant qu’il eftpoffible, campe auprès
des rivières Sc des ruiffeaux pour empêcher que
la maladie ne fe mette dans fon armée ; car les eaux
coulantes font les meilleures Sc les plus faines. Lorf-
qu’on fe trouve près des ruiffeaux, on empêche qu’on
en interrompe le cours, Sc l’on prend garde qu’on n’y,
jette rien qui gâte ou corrompe l’eau. Pour les eaux
d’une riviere, on ne peut les détourner que par des
travaux immenfes. On en rend les abreuvoirs aifésj
On ne fait des puits que lorfque les eaux courantes
fe trouvent trop éloignées du camp, parce que les
eaux n’en font pas faines, & qu’elles fe troublent par
la quantité qu’on en puife.
Il y a différentes efpeces de légumes pour les fub-
fijlances ; les unes font femées ou plantées ; les autres
font produites par la terre fans beaucoup de culture.
Celles qui font plantées ou femées font les pois , fê- j
ves Sc racines : celles que la terre produit avec peu
dé culture, font des efpeces d’herbes ou racines, qui
font recherchées par le foldat, & employées à lui
faire de la foupe. Tous ces diffërens légumes four-
niffent une grande Jubfijlance au foldat ; mais il faut
qu’il les aille chercher avec ordre, à la fuite des fourrages,
Sc avec des officiers commandés, afin d’empêcher
qu’il ne s’écarte, Sc qu’il ne forte des enceintes
du fourrage. Quand les légumes fe peuvent prendre
en-dedans des gardes de cavalerie, ou des gardes
fixes d’infanterie, on ÿ conduit les foldats , qui font
toujours accompagnés d’officiers ou de fergens.
Les pays qui font propres à la pâturé, font d’un
grand foulagement à la cavalerie ; Sc un général peut
refter beaucoup plus long-tems dans fon camp. Quand
la cavalerie eft remplie d’une quantité de jeunes chevaux
, on met, fi le fervice le permet, cette cavalerie
fur des ruiffeaux, Sc dans des prairies voifines du
lieu où l’on veut affembler l’armée, mais à couvert
des infultes de l ’ennemi. On y met tous les chevaux
à l’herbe plus ou moins long-tems- , afin de leur faire
perdre la mauvaife nourriture qu’ils peuvent avoir
pris pendant l’hiver. C ’eft le moyen de les rafraîchir,
& de les dilpofer à la nourriture du verd, avant que
de les fatiguer. Cette pâture confèrve beaucoup les
chevaux pendant la campagne.
Il y a une autre efpece de pâture qu’on donne
aux chevaux, quand on eft en corps d’armée; elle
fert à les rafraîchir de la nourriture des grains, qui
les échauffe trop, Sc épargne les fourrages. On prend
ces pâtures le long des ruiffeaux proche de l’armée,
Sc même dans les plaines fouragées, où il revient de
petites herbes ; c’eft toujours avec des gardes générales
de tout lé camp, Sc particulières de chaque
corps , qu’on couvre ces pâtures, afin que les petits
partis des ennemis, Sc même le gros, ne puiffent
pas venir enlever les chevaux lorfqu’ils paiffent.
Le pain eft une fubfijlance indifpenfable dans une
armée. La fourniture .s’en fait au parc des vivres ; &
elle eft faite d’avance au-moins pour quatre jours ,
lorfqu’on le peut avec commodité. Car fouvent l’éloignement
des lieu x, d’où l’on tire le pain , ou la
marche d’unè armée d’un pays à l’autre, force le général
à en faire diftribuer pour fix jours , Sc même
pour huit, lorfqu’il prévoit qu’on en pourra eon-
fommer une partie dans le camp , Sc qu’on eft obligé
d’envoyer les caiffons en avant pour rejoindre l’armée
dans un nouveau camp. Mais on ne fait jamais
cette diftribution fans une néceffité indifpenfable, à
caufe que les foldats vendent leur pain. On le cuit
dans les villes les plus proches, parce que les fours
y font en plus grande quantité. Il fe cuit auffi à l’armée
où on conftruit des fours , furtout lorfque les
convois font trop difficiles ; parce qu’une charrette
porte en farine le triple de ce qu’un caiffon porte en
pain.
On fournit auffi quelquefois du bifcuit au lieu de
pain frais. L’ufage en eft très-utile, Sc furtout dans
les longues-marches au-travers d’un pays ennemi. La
ration à 24 onces, félon quelques-uns, n’eft pas affez
forte au commencement de la campagne. La
terre n’a encore produit aucuns légumes ; Sc les deux
premiers mois la ration devroit peler deux livres. Le
foldat en foutiendroit mieux la fatigue ; Sc l’expérience
apprend que les jeunes foldats meurent fouvent
d’inanition.
C’eft à l’intendant de l’armée à avoir une attention
particuliere.fpr le détail ,1 a diftribution Jjèfl la
quantité de la viande. Il s’y paffe une infinité de fri-
poneries , dont le malheur tombe toujours fur le foldat,
qui par-là fe trouve privé d’une fubfijlance né-
ceffaire. On donne pour ration de viande aux foldats
une demi-livre. Outre les viandes que les entrepreneurs
fourniffent dans les armées , il y a encore une
grande quantité de boucheries particulières. On
veille à la fureté des marchands de Farinée , & de
plus à leur garde , foit dans les marches , foit pour la
pâture de leur beftiaux.
On pourvoit auffi à la fureté des marchands de vin,
d’eau-de-vie , de bierre, Sc d’autres fubfiftances , à
caufe de la quantité des menus bcfoins dont ils fou-
lagent les troupes. On les oblige à fe joindre aux convois
, afin que leur enlevement par les partis ennemis
n’appcrte pas la cherté dans l’armée. (D. J.)
Subsistance des pièces fe dit dans VArtillerie
d’une certaine fomme que le roi paye pour chaque
piece de canon Sc de mortier, que l’on met en batterie
dans les fieges. Il y a un prix fixé pour mettre
chaque piece en batterie, Sc un autre pour fa fubfifi
tance chaque jour.
Le roi paye ordinairement 3 00livres pour chaque
piece de canon mife en batterie. Au fiege de Philif-
bourg en 1734, il y eut 84 pièces de canon de 24 en
batterie, 97 de 16, 2 de 12 , Sc 4 de 8. Il a été payé
300 livres pour chaque piece de 24 Sc de 16 , à l’exception
de 14 mifes en batterie dans l’ouvrage à
corne , qui ont été payées 400 liv. Sc 20 liv. pour
la Jubjiflancs pendant vingt-quatre ' heures de chacune
de ces pièces. Il a été payé pour chaque piece
de douze & de huit mifes en batterie 200 liv. Sc 16
liv. pour leur fubjiflance auffi pendant vingt-quatre
heures4
Après que lès frais néceffaires pour les batteries
font acquittes , le grand-maître fait une répartition
du revenant-bon, aux officiers Sc aux ouvriers qui
ont ferviaux batteries. Voye? les mémoires deS.Remi.
(<2 )
SUBSTANCE , ( Pkilüf: Log. Mitaph. ) c’eft l’af-
femblage de plufieurs qualités , dont les unes fubfif-
tent toujours entr’elles, & les autres peuvent fe fé-
parer pour faire place à de nouvelles. Sous ce point
de v û e , rien n’eft fi fimple que l’idée de la fubjlance
dont on a tant difputé, Sc dont on difputera encore,
fans pouvoir rien dire de plus clair fur fa nature.
L’on veut donner un nom à cet affemblage de
qualités ; pour cela l’on néglige celles qui varient
d’un moment à l’autre ; l’on ne porte fon attention
que fur les plus durables. Elles deviennent pour le
commun des hommes effentielles à l’être , ou plutôt
à l’affemblage défigné fous le nom général de fubftance
, Sc l’on les appelle elles-mêmes fouvent malà
propos les fubjlances, Sc mieux les attributs effen-
tiels, tandis que les autres qualités qui varient, qui
peuvent être ou n’être pas dans cet affemblage , ne
font regardées que comme des maniérés d’être que
l’on appelle modes. Voyez C article Modes. Mais .les
Philofophes, ou ceux qui cherchent à donner un
fens plus refferré aux mots, ayant remarqué que
parmi ces'qualités durables de la fubjlance il y en a
de fi effentielles, qu’elles ne fe féparent jamais , Sc
qu’elles font mêmè fi inhérentes que l’on ne peut en
concevoir la féparation, fans comprendre que l’être
en feroit non-feulement changé , mais entièrement
détruit ; ils ont réfervé le nom de fubjlance, à défi-
gner Yaffemblage de ces qualités premières, effentiel-
lement inféparables ; Sc quant aux autres qui font
durables, mais qùi cependant- peuvent être retran-
chéesfans que-les premières foient anéanties-, ils les
ont nommées fubflances modifiées. Un exemple qui
indiqueroit toute la gradation des qualités d’une fubftance
, ferviroit auffi à expliquer ce que l’on peut dire
de plus fimple fur ce fujet. lettons les yeux fur un