d’ordinaire aux abréviations, comme lorfqu’on marque
primo avec un^, un point, & un petit ° au-deffus.
M il ,
Supérieur , lac ,(Glogr. m o d nom qu’on donne
à un lac de l’ Amérique feptentrionale, dans le Canada.
C’eft un prodigieux lac qui reçoit le fleuve
Saint-Laurent, 6c qui paffe pour avoir trois cens
lieues de tour, fur cinquante, de longueur. ( D . J.)
SUPÉRIORITÉ, f. f. (Gram.) avoir la fupériorité,
c’en exceller fur quelqu’un en quelque chofe. Il a
la Jupériorité fur moi prefque en tout, mais je luis fi
jaloux de fa gloire, que jamais mon amour - propre
n’eft mortifié.
S U P E R L A T I F , v e . adje&if, qui affez fou-
vent eft pris fubflantivement, terme de Grammaire.
'Ce mot a pour racines la prépofition fuper ( au-delfus
de ) , 6c le fupin latum (porter ) ; de forte que fuper-
^//fignifie littéralement, qui f in à porter au-dejfus de.
Cette étymologie du mot indique bien nettement ce
que penfoient de la chofe les premiers nomenclateurs;
1 e fuperlatif étoit, félon eux, un degré réel de comparaifon
, & ce degré marquoit la plus grande fupé-
riorïtë : avoient-ils raifon }
Le fuperlatif h tm , comme fanclijjimus, maximus,
facillimus, pulcherrimus, peut bien être employé dans
une phrafe comparative , mais il n’exprime pas plus
la comparaifon que la forme pofitive ne l’exprime
elle-même. San&ius en a donné jufqu’à quatorze
preuves dans fa Minerve II. xj. fans rechercher à
quoi l’on peut s’en tenir fur la jufte valeur de toutes
ces preuves , je me contenterai d’en indiquer deux
ici.
La première, c ’eft que Pon trouve des exemples
où l’adje&if eft au pofitif, quoique la phrafe énonce
une comparaifon, comme quand Tite-Live dit ( Lib.
X X X V I . ) , inter coeteras pugna fuit injignis , & V irgile
( Æn. IF . ) ifequimur te ffancle deorum, quifquis
es, de la même maniéré que Pline ( lib. X III. ) d i t ,
• inter omnes potentijjîmus odor, & ( lib. IX . ) velocijfi-
mus omnium animalium . . . eft delphinus, en employant
le fuperlatif au lieu du pofitif. En effet, puif-
qu’il faut convenir que la comparaifon doit être marquée
par quelque prépofition , dans les phrafes où
l’adjeâifeft au pofitif, 6c nullement par l’adjeâif
même, pourquoi ne donneroit-on pas la même fonction
aux mêmes préppfitions, dans des phrafes toutes
femblables où JJàdjeclif eft au fuperlatif? La prépofition
/««^-marque également la comparaifon ,
quand -<m dit, inter cateras pugna injignis , 6c inter
omfies potentifjimus odor : pareillement fancle deorum
veut dire fans douteJàncle ( in numéro ou fuprà coete-
ram turbam ) deorum ; 6ç velocifjimus omnium animalium
fignifie de même velocij/imus ( in numéro ou fu prà
cceteram turbam ) omnium animalium.
Perizonius croit ( Minerv. II. x j. not. 2. ) , que
cet argument ne prouve rien du tout, par la raifon
que les pofitifs fe conftruifent auffi de la même maniéré
que les comparatifs avec la prépofition pree,
qui exprime directement la comparaifon; c’eft ainfi,
dit-il, que nous lifons dans Cicéron, tu beatus pree
nobis ; or de cette reffemblance de conftru&ion,
Sanctius ne conclura pas que l’adjeûif comparatif
n’exprime pas une comparaifon , 6c par conféquent
il n’eft pas mieux fondé à le conclure à l’égard du
fuperlatif.
Je ne fais ce que Sanftius auroit répondu à cette
obje&ion ; mais pour moi, je prétends que l’on peut
également dire du comparatif 6c du fuperlatif, qu’ils
n’expriment par eux-memes aucune comparaifon, 6c
cela pourles raifons pareilles qui viennent d’être alléguées.
S’il eft auffi impoffible avec l’un qu’avec l’autre
d’analyfer uue phrafe comparative, tans y introduire
une prépofition qui énonce la comparaifon ;
il eft également néceflaire d’en conclure que ni l’un
ni l ’autre n’exprime cette comparaifon. Or on trouve
plufieurs phrafes effectivement comparatives
où la comparaifon eft explicitement énoncée
par une prépofition , fous quelque forme que pa-
roiffe -l’adjeCtif: i°. fous la forme pofitive : ô felix una
■ ante alias priameïa virgo J ( Virg. ) Pree fèformofis in-
vidiofa dea ejl. ( Propert. ) Parvam albam pree eâquee
condereturfore (L iv . ) i ° . fous la forme comparative:
Pigmalion f celere ante altos immanior omnes (Virg.) •
P rater cateras altiorem. . . crucemJlatui ju fit ( Suet. ) ;
Pra coeteris feris mitior cerva ( Apul. ) : 30. fous la
forme Juperlaiive : Ante altos pjtlcherrimus omnes Tur-
nus ( Virg.) ; Famofifima fuper cateras cana ( Suet.) ;
Inter omnes maximus ( Ovid. ) ; E x omnibus doclijji-
//?«ƒ( Val. Maximus. ). Il eft donc en effet raifonna-
ble de conclure que ni le pofitif, ni le comparatif, ni
le fuperlatif n’expriment par eux-mêmes la comparaifon,
6c que, comme le dit Sanctius, ( II. xj. ) vis
comparationis non ejl in nomint, fed in proepofitione.
Mais Perizonius fe déclare contre cette conclufion
de la maniéré la plus forte : ferre vix pojfum quod auc-
tor cenfet, vim comparationis ejfe in prapofitionibus ,
non in nominibus. ( not. 12 in Minerv. IF , vj. ) A quoi
ferviroit donc, ajoute-t-il, la formation du comparatif,
6c que fignifieroit doclior, s’il ne marque pas
directement 6c par lui-même la comparaifon ? Voici
ce que je réponds. Dans toute comparaifon il faut
diftinguer l’aCte de l’efprit qui compare, & le rapport
que cette comparaifon lui fait appercevoir entre
les êtres comparés : il y a en effet la même différence
entre la comparaifon 6c le rapport, qu’entre le télescope
6c les taches qu’il me montre lur le difque du
foleil ou de la lune ; la comparaifon que je fais de
deux êtres eft à m oi, c’eft un aCte propre de mon ef-
prit ; le rapport que je découvre entre ces êtres pa£
la comparaifon que j’en fais , eft dans ces êtres mêmes;
il y étoit avant ma comparaifon & indépendamment
de cette comparaifon, qui fert à l’y découvrir
6c non à l’y établir ; comme le télefeope montre
les taches de la lune ,fans les y mettre ; cela pofé, je
dis que la prépofition pra , qui femble plus particulièrement
attachée à l’adjeûif comparatif, exprime
en effet l’aéte de l’efprit qui compare, en un mot, la
comparaifon*; au lieu que l’adjeftif que l’on nomme
comparatif, exprime le rapport de fupériorité de
l’un des termes comparés fur l’autre, & non la comparaifon
même , qui en eft fort différente.
J’avoue néanmoins que tout rapport énoncé, &
conféquemment connu, fuppofe néceffairement une
comparaifon déjà faite des deux termes. C ’eft pour
cela i°. que l’on a puappellerco/Hpara/ï/slesadjeâifs
doclior, pulchrior, major , pejor, minor, 6cc. parce
que s’ils n’expriment pas par eux-mêmes la comparaifon
, ils la fuppofent néceffairement. C ’eft pour
cela 20. que l’ufage de la langue latine a pu autorifer
Pellipfe de la prépofition vraiment comparative/»r<e,
fuffifamment indiquée par le rapport énoncé dans
l’adjedtif comparatif. Mais ce que l’énergie fupprime
dans la phrafe ufuelle, la raifon exige qu’on le réta-
bliffe dans la conftruétion analytique qui doit tout
exprimer. Ainfi ocior venus ( Hor. ) fignifie analytiquement
odorpra vends ( plus vite en comparaifon
des vents ) ce que nous rendons par cette phrafe,
plus vite que les vents. De même fi vicinus tuus melio-
rem equum habetquàm tuus ejl ( C ic. ) , doit s’analyfer
ainfi,y? vicinus tuus habet equum meliorem proe eâia-
tione fecundum quam rationem tuus equus ejl bonus. Ego
callidiorem hominem quant Parmenonem vidi neminetn
( Ter. ) , c’eft-à-dire, ego vidi neminem hominem callidiorem
pra eâ ratione fecundum quant rationem vidi
P armenonem callidum. Sirnilior fum patri quant ntàtri
( Minerv. II. x. ) , c’eft-à-dire, Jum Jimilior patri pra
eâ ratione fecundum quam rationem fum (iniilis ntatru
Major fum quam eut pojjît fortuna nocere ( Ovid. ) y
c’ eft-à-dire, major fum pra eâ rationefecundîirii quam
rationem ille homo, cui homini res ejl ita ut fortuna
pojjît nocere, ejl magnus. Major^ quant pro re, loetitia
( Liv.. ) , c’eft-à-dire, loetida major ^ pree. eâ ratione fe cundum
quam rationem loetitia debuit ejfe magna pro re.
Cette néceffité de fuppléer eft toujours la même ,
jufques dans les phrafes où le comparatif femble être
'employé d’une maniéré abfolue, comme dans ce
vers de Virgile ( Æn. 1. ) : trijlior, & lachrimis oculos
fuffufa ni tentes, c’eft-à-dire, trijliorprtz habitu folïto.
Ceux qui ne fe font jamais mis en peine d’approfondir
les raifons grammaticales du langage,les Grammairiens
purement imitatores, ne manqueront pas de
s’élever contre ces fupplémens, qui leur pâroitront
des locutions infoutenables 6c non autorifées par l’u-
fage. Quoique j’aie déjà répondu ailleurs aux feru-
pules de cettefauffe 6c pitoyable délicateffe> je tranf-
crirai ici une réponfe de Perizonius, qui concerne
dire&ement l’efpece de fupplément dont il s’agit ici.
(Minerv.III. xiv. not. y. ) horridiora ea funt foepè^fa-
teor,fed & ideireb ,feu elegantioe majoris gratiâ, omijfa
funt. Nam Ji uteremur integris femper 6* plenis locutio-
nïbus , quam maxirnè incomta & prorfus abfona foret
latina oratio. Et un peu plus bas : vides quam alienâ ab
aurium voluptate & orationis concinnitate Jînt hoec fup-
plementa ; fed & ideireb et'tam proecifa fu n t , ut d ixi,
retentâ tantum illâ voculâ , in quâ vis tranjiùonis in j
comparando conjîjlit, fed quoe vis non nifiper ilia fup-
planent a ex plie art 9plane & ut oportet, potejl.
Je reviens au comparatif, puifque j’ai cette occa-
fion d’en approfondir la nature, 6c que cela n’a p oift
été fait en fon lieu par M. Dumarfais. Si l’adjeaif ou
l’adverbe comparatif, par la raifon qu’il énonce un
rapport, fuppofe néceffairement une comparaifon
des deux termes ; on peut dire réciproquement que
la.prépofitionproe , qui eft comparative en foi, fuppofe
pareillement que l’adjeâif ou l’adverbe énonce
un rapport découvert par la comparaifon ; ce rapport
eft en latin celui de fupériorité, comme le feul
auquel l’ufage ait deftiné une terminaifon propre, 6c
le leul peut-être auquel il ait été fait attention dans
toutes les langues. De-là viennent i°. ces locutions
fréquentes, où la comparaifon eft très-fenlible, quoique
l’adjeâif ou l’adverbe foit au pofitif, comme
nous avons vu plus haut : proe nobis beatus ,proe fe formofis
, parvant proe eâ quoe conderetur. De-là vient 20.
que les Hébreux ne connoiffentque la forme pofitive
des adjeélifs 6c des adverbes, & qu’ ils n’expriment
leurs comparaifons que comme on le voit dans ces
exemples latins, ou par la prépofition/mc« ou nie qui
en eft l’abrégé, 6c qui a la lignification extraâive de
ex ou celle de proe, ou bien par la prépofition al qui
veut dire fuper ; c’eft ainfi qu’il faut entendre le fens
de ce paffage (pf. cxvij. 8.g . ) y bonum e(l confiderein
domino quàm confidere in homine ; bonum ejl fp,erare in
domino quàmf per are inprincipibus ; le quàm latin étant
ramené à fa valeur analytique, proe eâ ratione fecun-
ditm quam rationem bonum ejl, rend la valeur de la
prépofition hébraïque, 6c prouve qu’avec bonum il
faut foufentendre magis que les Hébreux n’expriment
point; c’eft encore par un hebraïfme femblable qu’il
eft dit (pfi exij. 4. ) excelfus fuper omnes gentes domi-
nus, pour excelfiorproe omnibus gentibus. De-là vient
3°. que l’on trouve le fuperlatif même employé dans
des phrafes comparatives , dont la comparaifon eft
énoncée par une prépofition, ou dëfignee par le régime
néceflaire de la prépofition', fi elle eft foufen-
tendue ; ante adospulcherrimus, famofijfima fuper coe-
teras , inter omnes maximus, ex omnibus doBiJpmus ,
la prépofition eft exprimée ; quod minimum quidem
eflomnibusfeminibus (Matth. xiij. 3 2.), la prépofition
proe eft indiquée ic i par l’ablatif qui en eu le régime
neceffaire.
Réfumons ce premier argument. On trouvé des
phrafes comparatives où l’adjeaif eft au pofitif; là
comparaifon n’y eft donc pas exprimée par l’adjedif,
c’eft uniquement par la prépofition : on trouve d’autres
phrafes où la même prépofition comparative eft
exprimée , ou clairement défignée par fon régime
néceflaire , quoique l’adjeaif loit au comparatif ou
au fuperlatif ; donc dans ces cas là même, l’adjeaif
n’a aucune lignification comparative : j’ai déterminé
plus haut en quoi confifteprécifémentla lignification
du degré comparatif ; pour celle du fuperlatif, nous
l’examinerons en particulier, quand j’aurai ajouté à
ce que je viens de dire , la fécondé preuve que j’ai
promife d’après Sanauis, 6c qui tombe direaement
fur ce degré.
C’eft que l’on rencontre quantité de phrafes où ce
degré eft employé de maniéré qu’il n’eft pas poffible
d’y attacher la moindre idée de comparaifon , ce qui
feroit apparemment impoffible, s’il étoit naturellement
deftiné au fens comparatif. Quand Cicéron par
exemple écrit à fa femme Térence : ego fum miferior
quam tu quoe es miferrima ; lapropofition eft fans contredit
comparative , 6c l’adjeaif miferior, qui qualifie
par un rapport de fupériorité, fuppofe néceffairement
cette comparaifon, mais lansl’exprimer; rien
ne l’exprime dans cette phrafe , elle n’y eft qu’indiquée
, 6c pour la rendre fehfible il faut en venir à l ’a-
nalyfe , ego Jum miferiûr ( proe eâ ratione fecundum )
quam ( rationem) tu , quoe es miferrima, (es mifera) :
or il eft évident que miferrima n’eft pas plus comparat
if , ou fi l’on v eu t , pas plus relatif dans quoe es miferrima
, que mifera ne l’eft lui même dans tu es mifer
ra : au lieu du tour complexe que Cicéron a donné
à cette propofition , il auroit pu la décompolèr de
cette maniéré, où il ne refte pas la moindre trace'd’un
fens relatif : equidem tu es miferrima; fed ego fum miferior
quam tu ; vous êtes malheureufe, j’en conviens
& très-malheureufe ; cependant je le fuis encore plus
que vous.
, Cette explication là même nous met fur les voies
du véritable fens de la forme qu’on a nommée fuper-
lative ; c’eft une fimple extenfion du fens primitif &:
fondamental énoncé par la forme pofitive, mais fans
aucune comparaifon prochaine ou éloignée , direde
ou indire&e; c’eft une expreffion plus énergique de
la èïême idée ; ou fi quelque chofe eft ajouté à l’idée
primitive, c’eft une addition réellement indéterminée
, parce qii’êlle fe fait fans comparaifon : jedirois
donc volontiers que l’adje&ïf, ou l’adverbe, eft pris
alors dans un fens ampliatif, plutôt que dans un fens
fuperlatif, parce que cette derniere dénomination ,
fuppofant, Comme on l’a vu plus haut, une comparaifon
de termes qui n’a point lieu ic i, ne peut
qu’occafionner bien des erreurs , 6c des difeuffions
fouvent auffi nuifibles aux progrès de la raifon, que
l’erreur même.
Que ce foit en effet ce fens ampliatif qui caraélé-
rifela forme particulière dont il eft ici queftion, c’eft
une vérité atteftée par bien des preuves de fait.
i° . La langue hébraïque 6c fes dialeftes n’ont
point admis cette forme ; mais elle y eft remplacée
par un idiotifme qui préfente uniquement à l’efprit
cette addition ampliative 6c abfolue ; c’eft la répétition
de l’adjeétif même ou de l’adverbe. Cette forte
d’hébraïfme fe rencontre fréquemment dans la ver-
fion vulgate de l’Ecriture , 6c il eft utile d’en être
prévenu pour en faifir le fens, malum efl, malumefiy
dicit omnis emptor, ( Prov. x x . /y.) c’eft-à-dire, pef-
fimum ejl. Voyez A men , & Idiotisme. La répétition
même du verbe eft encore un tour énergique,
que l’analyfe ne peut rendre que par ce qu’on nom^
me fuperlatif: parexemple , fiat ! fignifie analyti*
quement cupiq hoc ut nés fiat; mais fiat ,fiat ! c’eft eu*
pio vchementijfiml, &c.
2°, L’idée de cette répétition pour défigner le fens