les voyant de loin, on ne peut s’imaginer ce que
ce peut être.
Les freres Zoubalof, chez l’un desquels je
logeai, me contèrent que leur père avait été pris
jusqu a trois fois par les Lesghis, et que chaque
fois ils avaient été obligés de le racheter contre
une forte somme d’argent. Néanmoins, comme
je l’ai dit plus haut, leur industrie leur a fait réparer
toutes ces pertes, et trois d’entre eux,
André, David et Jacob, avaient été les premiers
à se bâtir de fort belles et bonnes maisons qui
contrastaient assez au milieu des huttes de terre
qui les entouraient.
Gori est une des plus belles positions qu’on
puisse voir dans une grande ville ; c’était là qu’il
fallait plaeer la capitale du Cauease, au lieu,
d’aller la resserrer entre les parois desséchées et
schisteuses de Tiflis. Iermolof le remarqua bien-
quand il y vint pour la première fois; aussi
avoua-t-il que s’il avait d’abord débarqué à Gori
au lieu d arriver a Tiflis, il n’aurait jamais songé1
à faire de cette dernière la Capitale du pays.
Mais il était trop tard ; on avait déjà tant construit
à Tiflis, qu’il aurait été absurde d’abandonner
tous ces établissements pour aller les recommencer
à Gori.
Gori étant plus rapproché du pied du Caucase,
n’est pas exposé aux chaleurs étouffantes de
Tiflis ; d’ailleurs une espèce de Ioran des Alpes
vient rafraîchir sans cesse l’air, et assainit la
contrée. Mais ce vent, précieux sous certains rapports,
est une des choses dont précisément on se
plaint, parce qu’il souffle souvent et parce qu’il est
d’une violence extrême, Gori n’étant abrité d’aucun
côté au milieu de cette plaine uniforme qui
s’étend jusqu’à 3o et 4o verst, vers le pied du
Caucase. A l’ouest au-delà du Liakhvi, le groupe
de collines tertiaires qui commence à Rouissi
l’encaisse. A l’est, en-deçà de la rivière, c’est un
autre groupe qui court du Kour vers le nord le
long de la Medjouda.
Il n’y a pas de doute que cette plaine n’ait été
ci-devant un lac dans le temps que le Kour était
barré par la molasse de Mtzkhètha. Ce lac a dû
s’élever à 5o ou 60 pieds au-dessus du niveau
actuel du Kour, et à 3o pieds au-dessus de la
plaine de Gori, à en juger par une bande ou
ceinture uniforme de cailloux quelquefois combinés
en masses compactes déposés horizontalement
sur les couches renversées de la molasse et
du tertiaire et qu’on peut suivre partout autour de
l’ancien bassin. On jouit du haut de la forteresse
d’une fort belle vue sur les cimes neigeuses, déchirées
et hérissées de pics et de plates-formes,
qui bordent au nord le fond de ce bassin. Cette
partie de la chaîne, à laquelle on donne le nom
de Broutissabzèli (paille hachée), ne consiste