trée du canal Nadbrta, qui fait communiquer le
Phase avec le lac Paléastome et la Pitchora. Une
grande île coupe ici le Phase en deux. Ouvrez
Agathias (1), et voyez si vous ne retrouvez pas
ici comme je l’ai expliqué dans mon essai historique
, l’île, le canal, le camp, qu’il mentionne
à plusieurs reprises avant le siège que le général
persan Nachoragan va faire de la ville même de
Poti. Le vieux Poti n’était qu’un camp romain où,
pendant toutes les guerres de Khosroës contre
les Romains et les Lazes, les soldats prenaient
leurs quartiers d’hiver, passant d’une rive à l’autre
quand ils voyaient arriver l’ennemi.
Je remarquerai d'abord que le nom de Poti
n’est que la traduction mégrèle de Phasis, par
les aspirées, en se servant des mêmes lettres que
les Grecs : le $ grec est le p aspiré des Géorgiens;
le © est le th aspiré des Géorgiens , et
la transformation de l’a en o , tient au dialecte
mégrèle, comme je l’ai dit plus haut. Les Turcs
ont conservé l’ancienne prononciation en appelant
le Phase, Fache-Souji, et Poti Kalah-
Fache.
S a u f quelques tas de déblais et de briques, le
vieux Poti ne conserve aucune trace d’antiquité;
on en verra bientôt les raisons.
Je descendis à terre pour suivre le bord du
( i ) Agathias, 1. 3 , p. 5g , et p. g5— 96.
canal Nadorta et en examiner la nature ; ce n’était
qu’un petit filet d’eau, sur lequel le gouvernement
russe avait l’intention de bâtir des scieries ;
le local s’y serait prêté, et de superbes bois se
trouvaient sous la main à exploiter ; mais le prince
Dadian, qui est possesseur de ce terrain, aurait
consenti difficilement à le céder. Le canal a été
creusé par les Romains sous Justinien, pour s’en
faire une ligne de défense'et s’enfermer ainsi
comme dans une grande île entre le Phase, la
Pitchora et le lac Paléastome.
Du canal, nous eûmes encore 14 verst jusqu’à
la forteresse de Poli ; en ligne droite par terre
nous n’aurions eu que 8 verst si le pays avait été
tant soit peu praticable. Je ne trouvai rien de
remarquable que deux allées d’arbres touffus
jusqu’à 3 verst au-dessus de la forteresse où je
vis s’ouvrir une vaste plaine sèche en été, mais
inondée ou marécageuse dès les pluies de l’automne
: son niveau ne peut être élevé de plus
de 2| pieds au-dessus du bas niveau du Phase.
Ilfaut descendre ici bon gré malgré et s’enfoncer
jusqu’à mi-corps dans le marécage; que ne fait-
On pas pour l’honneur de la science! mais je
vais seul; personne ne veut me suivre qu’un
soldat auquel je promets un pour-boire. Que de
peine nous eûmes à atteindre un léger tertre que
je voyais toujours devant moi comme une île
bienheureuse ! Enfin nous posons le pied sur