par la providence pour opérer la conversion de
celui qui l’avait si cruellement martyrisé.
Sa prison, comme si Tiridate avait voulu faire
un sacrifice vivant à ses dieux, était à quelques
pas d’un temple fameux dédié à Aramazt/le
même que l’Ormouzd des Persans et le Jupiter
des Grecs. Une forteresse entourait le temple,
et une ville était bâtie au pied, sur les bords de
l’Araxe, là où s’étendent les huttes du village
actuel. On donnait à ce temple le nom de Ache-
lichad , c’est-à-dire beaucoup de sacrifices, à
cause de la multitude d’offrandes que la piété
des Arméniens vouait à leur dieu principal, qui
l’était aussi des peuples géorgiens.
Le nom d’Achelichad fit place, lors de l’introduction
du christianisme, à celui de Khorvirah
(puits sec), par lequel on consacra le martyre de
saint Grégoire. Grégoire Magisdros en fit apporter
le corps tout entier de Constantinople, et on
le plaça au fond du puits ; sa tête, déposée au
dedans de la sainte table , servit aux guérisons
(1).
11 est singulier que Chardin et Tavernier, qui
n’étaient pas savants de profession comme Tour-
nefort, aient été mieux informés que celui-ci des
particularités de Khorvirab. Tous les deux (2) le
(1) Géographie du Vartabied Vartan , traduite par
M. de S.-Martin, Mém. sur l’Arménie, t. II, p. 4 i 9-
( i ) J. Tavernier, Six Voyages, etc. t. I, p. 4$ 1 édition
citent comme le théâtre des martyres de l’illu-
minateur, tandis que Tournefort qui a été, le
9 août, à Corvirap ou Corervirab, en fait le théâtre
du martyre de saint Jérôme.
Pour preuve des i 3 ans que saint Grégoire a
passés au fond de ce puits au milieu des serpents,
on vous montre les pierres usées d’une niche où
le saint faisait ses prières, comme si les pèlerins
qui s’y agenouillent sans cesse n’avaient pu-y
contribuer...
L’évêque ou prieur du monastère de Khorvirab
nous retint pour prendre une tasse de thé;
nous n’osions refuser cette politesse malgré qu’il‘
se fit tard et que nous eussions 10 verst de chemin
à faire jusqu’à Targalou, où l’on nous attendait.
Les cigognes étaient arrivées à Khorvirab le *5
mars.
A la nuit tombante, nous nous mîmes en
route à travers une plaine salée, coupée de
marécages et de canaux. A peu de distance du
monastère nous trouvâmes notre nouvel hôte,
qui tout vieux, tout-cassé qu’il était, avait voulu
venir à notre rencontre. C’était l’ancien mirza
ou secrétaire d’Houssein-Sardar. La nuit toujours
plus sombre nous cachait notre route, et
in-8°, 1712.
éd. in-fol.
Voyage du ch. Chardin, etc. t, I , p. 260,
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