Le fort St-Nicolas est un des points les plus
malsains de la côte ; l’expérience l’a prouvé ; les
Russes qui y avaient envoyé un bataillon forent
forcés de l’abandonner en 1820, après avoir vu
la majeure partie des soldats périr par les maladies.
St-Nicolas n’est entouré que de rivières, aux-
quelles if faut ajouter un marais salé qui le sépare
de la mer. La Natanébi coulait jadis à travers
cette salse ; elle a pris un autre cours et la salse
est restée fermée par deux barres. Ce sol infect
que la mer renouvelle sans cesse était la principale
source'de l’insalubrité du fort et de la quarantaine
qu’on avait eu l’imprudence de placer
entre la salse et la rivière. Ceux qui y entraient
bien portants, couraient grand risque de n’en pas
ressortir.
Pétra ou Oudjenar.
Le chemin long de 25 verst qui conduit à
Ozourghéti, suit le plus souvent les bords de la
Natanébi qui est assez rapide. Nous traversâmes
une plaine continuelle composée de glaise à
laquelle se mêlent de plus en plus les cailloux, à
mesure qu’on approche d’Ozourghéti. De l’autre
côté de la rivière, de légères éminences méla-
phyriques. De nombreux ruissaux se jettent tous
dans la Natanébi.
Partout une végétation superbe. Les 10 premiers
verst ne consistent qu’en une forêt de figuiers,
de vignes, de chênes, coupée de champs
de maïs, avec de petites maisonnettes pour les
défendre contre les ours. La vigne qui se traîne
partout, sur la ronce et sur l’aune noir comme
sur la cime du chêne, donne au paysage une
teinte et des contours particuliers : tout est rond
ou arrondi dans la verdure.
Au quinzième verst on aborde la Skourdébi
que l’on passe au-dessus de son confluent avec
la Natanébi, et 011 monte sur une esplanade couverte
de hêtres gigantesques , et circonscrite
entre ces deux rivières qu’elle domine d’une
vingtaine de pieds. Plus loin recommence et le
maïs et le millet et les arbres ronds chargés de
vigne au milieu desquels est situé Ozourghéti.
Mais arrêtons-nous à ce quinzième verst sous
les hêtres antiques. Des ruines mousseuses que
je distingue sous les racines énormes des arbres
excitent ma curiosité. La tradition du pays me
dit que je foule le sol d’une des plus grandes
villes du Gouria, qui existait il y a bien longtemps,
mille ans peut-être. Les cOuri en étaient
la population dominante; ils ont donné leur nom
au Gouria ou cOuria, avec l’aspiration. Des trésors
partout, mais dont personne, comme toujours,
n’a vu trace. Selon cette même tradition,
Oudjenar était le nom de cette ville.