malgré l’adresse de nos chevaux, nous risquâmes
souvent de faire la culbute dans la boue ou dans
les canaux. Quelques-uns ne s’en tinrent pas
même aux risques, entre autres le pauvre mirza
qui tomba dans l’eau ; nous eûmes de la peine à
le remettre sur son cheval; heureusement que
ce n’était pas loin de chez lui, où il alla promptement
changer de vêtements.
Pour moi, je faisais cette traite le coeur serré,
quand je pensais que c’était la dernière fois que
je me trouvais dans la compagnie du bon général
et que dès le lendemain je devrais continuer
tout seul ma route vers Nakhtchévan.
Cette dernière soirée ne fut pas gaie; le général
et M. Kourganof étaient tristes de me voir
partir; je l’étais bien plus encore de les quitter.
Le général se récréa en faisant écrire pour moi
au vieux mirza plusieurs lettres de recommandation
adressées aux seigneurs persans que je
devais rencontrer sur ma route. Agenouillé sur
les tapis du mirza, j ’en écrivis de mon côté encore
quelques-unes que le général voulait expédier
d’Erivan ; l’une adressée à M, de Steven a
été publiée.
Le lendemain matin nous prîmes congé à
cheval à la porte de la cour du mirza ; le général
qui s’était détourné de sa route pour m’accompagner
sur l’Ararat et me protéger dans ce dangereux
passage de l’Araxe, s’en retourna directement
par Ardachar à Erivan, et moi, prenant
la route opposée, j’allai silencieusement faire
mon pèlerinage au tombeau de Noë, accompagné
d’un seul guide, le même qui m’avait suivi
à Kieghart.
A i 5 verst en traversant la plaine entre les
collines de Khorvirab et la chaîne principale qui
a l’air d’être d’argile feuilletée, on arrive au petit
village de Karala, auprès duquel une petite
colline porte la ruine d’une église en pierre calcaire.
Cinq verst plus loin est Avechar, à l’ouest
d’un groupe de collines qui s’élèvent à 4oo pieds
au-dessus de la plaine, et que compose un banc
de dolomie noire cristallisée, veinée et l'amifiée
de mille manières de calcaire blanc; un dôme
volcanique de mélaphyre noir , compacte, l’a
soulevé et arraché du fond de la plaine. Les
couches de la dolomie sont reconnaissables,
quoiqu’elle soit horriblement déchirée.
Entre ces collines gisent quelques ruines
d’anciennes habitations : à quelque cent pas
au-delà s’étend Dévalou.
De Dévalou on fait 4 verst dans une plaine
marécageuse coupée de canaux, avant d’attein-
le pied de la montagne de calcaire noir à couches
déchirées, ondulées, etc. La route la longe
à distance.
A 20 verst de Dévalou, la chaîne de mon