nons qui se trouvaient dans la forteresse (1). Elle
fut reconstruite par les Turcs, et le Dadian de
Mingrélie leur vendit alors les pierres de la capitale
de Sakharbet en raison de 4 paras l’oc-
que. On les transportait par la Tsiva et le Phase
jusqu’à Poti; c’est ainsi qu’on démantela tout
ce qui restait des ruines et édifices à Sakharbet,
afin d’avoir plus vite fait. On enleva aussi pour
cette construction tout ce qu’il y avait de briques
et de pierres aux alentours de Poti, emportant jusqu’aux
derniers fragments des ruines anciennes :
il n’y a donc rien d’étonnant de retrouver à Poti
dans les matériaux de la forteresse des briques
du genre de celles du castel que j ’ai décrit. Quant
au plan de la forteresse, c’est exactement celui
de Soukoum-kalé.
Depuis 2 1 siècles que Poti est bâti, déjà la mer
a reculé ses rives et abandonné ses murs : elle
est à 2 verst de distance, ce qui a nécessité la
construction d’un petit fort plus rapproché de
l’embouchure du Phase.
Si la mer se retire davantage, il arrivera à
Poti ce qui est arrivé à l’ancien castel : il sera
recouvert d’eau et de marais ; déjà actuellement
le sol de la forteresse n’est pas élevé de plus de
3 pieds au-dessus du niveau du fleuve. Nos descendants
diront qu’il s’est enfoncé.
( i) Chardin, p. i 4 3 , éd. in-fol.
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Depuis 1829 que les Russes ont conquis Poti
sur les Turcs, on y a envoyé en garnison un bataillon
d’infanterie. Jamais bataillon n’eut à lutter
contre un climat plus infernal que celui de Poti.
Acculés dans ce delta humide entre le Rion et le
lac stagnant du Paléastome ; avoisinant un canal
infect et les bois plus infects encore qui s’étendent
entre la mer et le lac, où la mer verse ses
ondes, que l’ardeur du soleil corrompt avec rapidité
; entourés de toutes parts des marais stagnants
de la Nabada, de la Pitchora, de la Mol-
tavka, empestés par un air fiévreux et corrompu,
de quelque côté que le vent soufflât, les soldats
tombaient comme les feuilles qu’emporte le vent
d’hiver ; les fièvres typhoïdes faisaient avec rapidité
des vides effrayants dans les rangs de ces
braves qui ne savaient que se plaindre. Et cependant
on a eu le courage d’établir à Poti, comme
colonie , une compagnie de soldats mariés, précisément
le long de ce canal qui sort du lac Paléastome,
de ce canal qui en été est si corrompu,
si décomposé, que tout ce qui se trouve dedans,
poissons, écrevisses, y crève et vient en couvrir
les rives. .
Je n’oublierai jamais l’effet que produisit sur
moi cette colonie militaire quand j ’y passai à la
fin de septembre. Nous détournâmes les yeux,
Nicolas et moi, pour ne pas voir ces figures de
déterrés, ces femmes et ces enfants pâles et blê