c’est-à-dire qu’elle doit fournir en nature ou en
argent des logements pour les employés civils et
militaires. L’accumulation de ceux-ci et le peu
de logements existant relativement à la population
ont rendu ces charges extrêmement onéreuses,
et les habitants sont rebutés par cette
imposition qui pèse également sur toutes les
grandes villes soumises à la Russie.
Je me trouvai à Tiflis à cette époque de tournoiement
des grandes villes pendant les fêtes d e
Noël et du nouvel an. Et Tiflis ne m’a point paru
privilégié, ni plus paisible que le reste de l’Europe
civilisée.
Le jour de Noël je fus rendre mes devoirs au
général-gouverneur, baron de Rosen, et je fus
étonné de trouver dans les grandes salles un
tres-grand nombre de personnes réunies pour
le complimenter. Le baron reçut en premier les
voeux d’une vingtaine de généraux dans une des
salles où je fus aussi appelé à lui rendre mes homr
mages : puis ce fut une présentation générale,
au milieu d’une foule, d’une presse, où cependant
le baron sut fort bien distinguer ceux à
qui il voulait adresser quelques paroles. La
baronne reçut ensuite. Il y eut ce jour-là grand
dîner de plus de cent couverts, où tous les costumes
civils et militaires, indigènes et étrangers
formaient la guirlande la plus variée.
Au nouvel an ce fut de même. Le 2 janvier
grand bal. Le J janvier, qui fut le jour lé plus
froid de cet hiver et où le thermomètre tomba
à — 70 Réaumur, la bénédiction des eaux du
Jourdain se fit sur les rives du Cyrus, au centre
d’un grand carré de troupes en parade et au
son des salves d’artillerie»
La maison du gouverneur - général était,
comme de droit, le centre des affaires, comme
celui des délassements : elle donnait le ton. Pendant
tout l’hiver, il y eut réception, jeux., conversation
, souper, tous les dimanches. Là se
rencontraient toujours les personnes avec lesquelles
011 désirait causer; et j ’ai retrouvé dans
la maison de M. de Rosen pendant ces fêtes le
genre des salons de Paris.
Le*jeudi était jour de concert. Bal de temps
en temps. Combien de dames européennes auraient
désiré être à ma place pour jouir dans ces
beaux salons, si bien décorés, de la variété des
figures et de toute la bizarrerie des scènes et
des costumes qui se présentaient à mes yeux,
surtout au bal.
Quel contraste entre une tzarine, fille du
fameux roi Héraclius II, ayant conservé son
costume géorgien dans tous ses détails, quoique
avancée en âge ne manquant jamais une de ces
fêtes, et madame la baronne en toilette française
la recevant avec tous les honneurs !
Voyez-vous s’avancer cette figure timide,