D’énormes fissures oni aussi fendu la coulée ,
en ouvrant ainsi dans ses flancs des ravins sauvages
latéraux à l’Araxe. C’est sur l’angle de
deux de ces fentes sur l’Araxe qu’ont été
bâtis Sourmali et Karakala, jadis Tigrano-
certe.
La lavé noire, semée de cellules longues, a
été divisée par colonnes qui imitent parfaitement
les piliers basaltiques ; toutes ces colonnes sont
verticales.
Tigranocerte (1) ou Karakala était plus fortifié
par la nature que Sourmali ; car une ramification
d’une grande fente dans la coulée de lave l’isolait
complètement : deux côtés étaient-défendus
par un fossé naturel très-profond; un troisième
côté par l’Araxe; il ne restait plus qu’un isthme
étroit où l’on avait accumulé les tours et les murailles
: et pour plus de précautions, les points
de la coulée de lave qui étaient tant soit peu
abordables étaient bordés de murs. Le château
ou la citadelle proprement dite occupait le point
le plus étroit de l’isthme; le reste était la ville
haute, ou l’on ne voit plus que des tas de pierres
et des murailles noires de lave éparses. Les deux
(1) La terminaison cert, kert ou gherd, que l’on retrouve
chez les noms de ville arméniens, signifie un lieu
fortifié, et répond aux gard, grad, gorod des nations sla-
vonnes qui ont la même signification.
tours qui défendaient la porte de la ville sont à
pèine reconnaissables.
Mais la citadelle ayant servi depuis la destruction
de Tigranocerte de point de défense tantôt
aux Arméniens, tantôt aux Persans, il est resté
dans les murailles du château actuel de Karakala
de grands lambeaux de tours et de murailles
anciennes qui contrastent pittoresquement avec
les nouvelles constructions modernes ; car on ne
peut rien voir de mieux construit que ces anciennes
tours qui sont en pierres de taille superbes,
les lits de lave noire alternant avec ceux de
porphyre ponceux rouge. Je trouvai quelques
croix sculptées dans ces anciennes constructions.
Les nouvelles sont presque toutes en cubes grossiers
de lave noire, ce qui a fait donner au château
moderne le nom de Karakala (château noir).
Quand nous y passâmes, il n’était habité que
par quelques familles arméniennes qui s’étaient
logées dans le labyrinthe des murailles du château
délaissé par les Persans. On nous offrit,
dans une salle persane abandonnée, un dîner
somptueux principalement composé de laitage.
Au devant de la forteresse vers l’ouest s’étendait
un vaste cimetière où l’on reconnaissait les
tombes de toutes les nations qui avaient passé
par-là, des Arméniens, des Persans : quelques-
uns de ces tombeaux étaient fort intéressants, et
je fus étonné d’y trouver des figures de béliers