cbide : il n’y avait plus de chemin dans le bazar 5
la neige était plus haute que les appentis des
boutiques. Les chevreuils et les cerfs ne pouvaient
plus marcher; on les prenait à la main.
Les soldats s’attachaient des planches aux pieds
et allaient ainsi à leur recherche. Plusieurs personnes
périrent à de petites distances des habitations,
parce qu’elles ne pouvaient plus avancer
; on les entendait crier sans qu’on pût leur
porter secours.
L ’Imérétien et son caractère.
Le peuple imérétien est bon et doux en général
; il est serviable et hospitalier ; si les paysans
se montrent méchants quelquefois, ce sont leurs
princes qui les forcent souvent à faire le mal ,
sous peine de les maltraiter eux-mêmes.
Cependant l’Imérétien s’emporte aussi malgré
sa douceur ; il se passa pendant mon séjour plusieurs
actes de violence qui en sont une preuve.
Deux Imérétiens se disputaient : l’un voulait
arracher une haie, son voisin prétendait qu’il
n’en avait pas le droit, parce qu’elle était sur
son terrain. « Ne touche pas à ma haie, lui disait
il, ou cela te coûtera cher. » L’autre ne voulut
pas entendre raison et continua son travail.
Voyant cela, le plaignant, irrité, furieux, court
chez lui, prend son fusil et étend son ami roide
mort au pied de la haie. Jugé, il fut condamné
à six ans de pénitence d’église, c’est-à-dire qu’il
fut forcé pendant ce laps de temps d’aller seryir
comme esclave dans un monastère et d’y remplir
les fonctions les plus pénibles.
Je ne reviendrai pas sur ce que j ’ai dit plus
haut de la féodalité en Iméreth; l’état des paysans
s’est sensiblement amélioré depuis la prise de
possession par la Russie. Ceux qui dépendent
directement de la couronne sont les plus heureux
; ils paient 4 francs de capitation, font les
corvées des chemins, et du reste sont parfaitement
libres ; les serfs des seigneurs leur portent
tous envie.
La plus grande sécurité régnait en Iméreth
quand j ’y ai voyagé; on pouvait parcourir le
pays dans tous les sens sans aucune crainte ;
l’ancienne manie du commerce des esclaves si
longtemps en vogue y est déjà oubliée, et l’on
n’entend plus parler de vente ni d’enlèvement.
L ’Imérétien a gardé quelque trace de son
ancienne civilisation sous les Bagratides ; il
tient à gloire l’histoire de ses ancêtres, et l’on
trouve des gens assez instruits pour aimer à
étudier leurs anciennes chroniques.
Cependant le bonheur tel que le recherchent
ces peuples est encore fort matériel. Avoir beaucoup
de serfs, parader suivi d’une foule de
vassaux dans les beaux habits chamarrés de ga