Une troisième scène vous montre un fils de
chah , qui, étant à la chasse, séduit une jolie fille
qui se laisse enlever pendant que son vieux père
dort sur leur bagage.
Le quatrième tableau est le plus curieux. C’est
une scène de la vie de Joseph (Joussouf), d’après
l’Al-Koran : tout un chapitre de ce livre
parle de lu i , et même Mahomet raconte de
telles merveilles de ce favori de Dieu, que beaucoup
de bons musulmans commencent à douter
de la vérité. La beauté céleste de Joseph touchait
le coeur de toutes les femmes. Souleikha,
femme du premier vizir Potiphar, en devint
folle à la première vue, et Joseph, après quelque
résistance, était sur le point de céder à ses désirs,
lorsque l’esprit de son père lui apparut et
le rappela à son devoir. Cela n’empêcha pas que
la chose ne se divulguât dans la capitale de l’Egypte,
et toutes les autres dames de la cour se
moquèrent de la faiblesse de Souleikha, qui avait
pu donner son coeur à un esclave.
Souleikha en fut piquée au dernier point, et,
pour se vengêf, eUe invita toutes ces impertinentes
dames chez elre. Toute la société était assise,
occupée à manger des grenades, quand Joseph
entra tout à coup dans l’appartement pour leur
servir le cherbet ou sorbet. Les dames furent si
saisies de sa beauté, qu’elles ne surent plus ce
qu’elles faisaient, et qu’au lieu de mordre dans
leurs grenades, elles mordaient dans leurs doigts.
Ainsi le raconte l’Al-Koran, et telle est la scène
que le peintre persan Mirab-Douraizak, l’auteur
aussi des trois autres tableaux, a voulu représenter.
L’effet de l’apparition est magique. L’une
de ces dames est tombée à la renverse évanouie;
la seconde déchire ses vêtements; la troisième
mord en effet dans ses doigts au lieu de mordre
dans la grenade qu’elle tient de l’autre main ; sur
chaque figure, nouvelle espèce de saisissement,
pendant que Souleikha paraît toute radieuse sur
son trône, et triomphe (1).
J’ajouterai que les mahométans prétendent
que Souleikha atteignit au but de ses voeux, et
qu’après la mort de Potiphar elle épousa Joseph,
et fut extrêmement heureuse avec lui.
J’ai ’copié ce tableau avec beaucoup d’exactitude,
pour donner une idée des costumes des dames
d’ici, car on dij qu’ils sont parfaitement imités
dans cette scène. ,
Au milieu du parquet de marbre gris, jaillit,
dans un charmant bassin de marbre blanc, Un
jet d’eau qui se réfléchit de mille manières de
tous côtés.
(1) Voyez l’esquisse de ces tableaux et principalement
de celui-ci, atlas, IIIe série, pl. 26; et, pour l’histoire de
Joseph, le Magazin fur die Litteratur des Ausiands. Berlin,
i 834, n° 144.