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ne dois-je pas de ma science à ces heures fortunées.
On se mettait aussi quelquefois à mes inscriptions
géorgiennes et arméniennes : petit à
petit M. Kourganof et le général me traduisirent
ces dernières ; ce ne fut pas sans peine et
sans de nombreuses hésitations, oubliant quelquefois
que le souper nous attendait à 11 heures
du soir. Le repas était l’heure de délassement;
plus de soucis, plus d’inscriptions. Telle était
ma vie d’Erivan.
Cette régularité ne fut troublée que vers la fin
de mon séjour; nous étions en carnaval, et les
blitri (1) russes se mangent à Erivan comme à
Pétersbourg ; ce fut le tour de chacun des employés
de fêter la société, et le général termina
cette série de repas par un grand dîner et par
une représentation de danseurs et de faiseurs de
tours de force allemands, après quoi le carnaval
fut enterré et le lendemain nous partîmes
pour notre excursion.
Notre société, composée du général, de
son secrétaire , de M. Thomas Kourganof, de
M. Pierre Sialski, chef des douanes de l’Arménie
et de moi, était suivie d’une escorte de quelques
cosaques et de trois à quatre domestiques avec le
bagage porté à dos de cheval ; quant à notre cuisine,
et à tout ce qui tient aux premières néces-
(1) Petites omelettes.
sités du voyage, le général avait quatre vigoureux
mulets destinés à cela, et tout était si bien
arrangé, si bien disposé, qu’au premier signal de
halte tout était sous la main. La vaisselle, les
verres, les ustensiles de cuisine, les vivres
étaient disposés dans des caisses faites exprès,
où chaque chose avait sa loge et son coin. Chaque
mulet portait deux de ces caisses.
Notre route nous menait par Etchmiadzin où
nous ne nous arrêtâmes qu’un instant pour recevoir
la députation des moines du monastère
qui venaient féliciter le général à son passage.
Nous poursuivîmes notre route toujours à
travers une plaine dont rarement quelque ondulation
vient couper l’uniformité : le fond de la
plaine est glaiseux; ça et là elle est semée de
cailloux roulés de lave.
Nous passâmes à peu de distance d’Etch-
miadzin la rivière de Kharsakh, coupée en mille
canaux qui vont arroser les domaines du couvent
et du village de Vagarchabad.
L’Alaghèz se présente au nord de cette belle
plaine à gauche; de son cratère ou de ses flancs
ont coulé tous les torrents de lave qui s’avancent
plus ou moins comme des promontoires dans la
plaine, Ou leurs extrémités ont toujours l’air
d’une muraille déchirée dont le pied est jonché
de débris.
Sur ses pentes méridionales l’Alaghèz n’a pas