y avait encore un bon | de la montagne à escalader
Ils sont outrés de ce qu’en Europe on puisse
croire aux récits de M. Parrok Voyez, disent-
ils, on prétend que nous mentons, et jamais nous
n’avons dit un mensonge aussi gros que l’Ararat.
M. Chopin, induit en erreur par l’unanimité
des témoignages de ceux qui avaient accompagné
M. Parrot, a voulu récuser la véracité du
professeur, qui s’en est plaint au ministre du
culte a St-Petersbourg. Le ministre a ordonné de
faire une enquete sur les lieux. Le général Pan—
kratiev l’a poursuivie avec impartialité, et certes
si l’on n’en voulait croire les procès-verbaux
que M. Parrot a publies lui-même, la chose serait
fort douteuse. Dans l’interrogatoire, les soldats
avouèrent qu ils avaient trouvé la croix bien
lourde à porter, et qu’ils avaient dit être déjà au
sommet pour en etre plus vite débarrassés. Mais
abstraction faite du caractère de véracité connue
de M. Parrot, je le répète, il est impossible de
douter, d’après son travail, qu’il n’ait atteint la
cime de l’Ararat, et heureusement pour lu i,
l’ascension de M. AutonomofF a mis le sceau à
1 authenticité de ce fait. Cependant j ’avoue que
tant que j ’ai été en Arménie je ne l’ai pas cru.
Par un sacrilège que vous ne pardonnerez
sans doute pas, Mesdames, on a changé le harem
en caserne, et les braves soldats russes mangent
du chtchi et de la kapousta (1) dans les chambres
où résidaient jadis des beautés géorgiennes,
arméniennes, e tc ., entourées des parfums de
l’Orient.
Ce harem est une grande cour, longue de
200 pieds, large de 125 pieds (2), Elle est traversée
par un grand canal en pierres de taille,
rempli d’une eau courante, avec toutes les dispositions
pour s’y laver, s’y baigner. Chaque côté
de la cour est fermé par des bâtisses, où l’on ne
voit que des appartements plus ou moins brillants.
Quatre salons ouverts , dans le genre de
celui des glaces, mais moins somptueux, forment
le centre des façades. C’était là que les
belles se réunissaient autour de leur adorateur;
c’est la qu’un geste décidait du malheur ou du
bonheur ; c’est là qu’on se jalousait, et c’est là
que les soldats sèchent maintenant leurs chemises.
Entrez dans ce petit salon, à droite du grand
salon qui donne sur l’Ararat. En regardant par
cette fenelre, vous vous retrouvez au bord du
rocher de lave, et vous avez au fond du précipice
la Zenga. Et voilà de l’autre côté, près du grand
pont, la pierre sur laquelle était assis ce pauvre*
(1) Deux- espèces de soupes aux choux, mets favoris des
soldats russes.
(2) Voyez Atlas, IIIe série, pl. 27.