tonnera plus de voir cette forêt d’arbres gigantesques,
et des hêtres et des charmes de plus de
cinq pieds de diamètre, implantés sur des tours
changées en tertres pierreux.
Jean Tzibus, qui fonda Pétra , sut fort bien
profiter de l’embouchure de la Natanébi, Ylsis
d’Arrien, qui pouvait lui servir de port, comme
c’est encore le cas aujourd’hui pour le Gouria.
C’est ici que les Turcs de Batoum, de Trébi-
zonde, viennent charger du buis , du maïs, des
noix, et quand je passai par St-Nicolas, dix petits
bâtiments turcs étaient à l’ancre dans la rivière.
La seule chose qui me paraisse encore énigmatique
, c’est ce nom d^Ouri que la tradition
attribue aux anciens habitants de Pétra. Les
Géorgiens s’en servent encore de nos jours pour
désigner les juifs, et dans leur tradition au sujet
d’Oudjenar, j ’ai bien vu qu’ils prenaient ces cOuri
pour une puissante colonie de juifs qui avait
rempli jadis le Gouria et ses villes ruinées. Les
Perses, en s’établissant dans ce pays sous Justi-
nien, avaient-ils emmené effectivement des
juifs pour le peupler, ou les Géorgiens ont-ils
confondu ici les Perses et les juifs sous une
même dénomination? Peut-être l’un et l’autre.
Cependant ce nom d’cOuri me paraît toujours
extraordinaire pour désigner des juifs, et convenait
beaucoup mieux aux Perses et à leur culte
du feu.
Hoûr ou khour-chid, ou Jchoûr-chad, signifie
le soleil, selon Hyde, de Religi Veter. Pers.
Oxon. in-4°, 1700, c. IV, p. 106.
Koros est l’ancien nom du soleil en persan ,
selon Ritter (1).
Our est une racine hébraïque qui exprime le
feu, la lumière, selon Court de Gébelin.
L’on sait que le principal but de Khosroës, par
ses conquêtes et ses colonies, était d’établir le
culte du feu : °Ouri ne signifierait-il point les
adorateurs du f e u ?
Parmi les rapprochements que ce même nom
me fait trouver, en voici encore deux qui me
paraissent bien remarquables.
« Et Taré, dit la Genèse, X I , 3i , prit son
fils Abram et Lot, fils de son fils, et Saraï sa belle-
fille, et ils sortirent ensemble d''‘Our des Chal-
déens, pour aller au pays de Canaan, et jls
vinrent jusqu’à Haran et y demeurèrent. »
Zoroastre part aussi du pays à?1 Our pour son
grand missionnariat de la lumière et du feu ;
(1) M. Ritter, dans ses Propylées d’une histoire des
peuples du Caucase avant Hérodote, a fait ressortir avec
une profonde sagacité et avec une vaste érudition, les rapports
religieux qui enchaînaient nombre de peuplades ,
des extrémités de l’Inde aux rives septentrionales de la
Mer-Noire. Koros, Khour, le dieu du soleil, l’ancienne incarnation
de, ce dieu , est le culte par lequel elles fraternisent.
Voy. chap. III et IV.