Géorgien qui contemplait tristement les fenêtres
inabordadles du harem. C’est de cette fenêtre
que son amante le reconnut, qu’elle se précipita
de désespoir et qu’elle alla retomber sur ce
saule qui étendait ses rameaux au bord de la
Zenga pour recevoir l’infortunée. Vous rappelez-
vous ce charmant épisode du roman d’Hadji-
Baba que nous avons lu ensemble ? Rien n’est
plus vrai. Voyez le dessin que j ’ai fait de cette
scene, pris de la place où était le sardar Hous—
sein lorsque la belle et trop fidèle Géorgienne se
précipita sous ses yeux. Tant d’amour sut le
toucher. Ne séparons pas, dit-il, des coeurs si
étroitement unis , et il les renvoya comblés, de
présens en Géorgie.
L ’intérieur de la forteresse renfermait deux
mosquées. L ’une a été convertie en église russe,
en y ajoutant ces quatre portiques monotones,
qu’on retrouve d’un bout de la Russie à l’autre :
la seconde, la plus belle en même temps, a été
changée en arsenal (1). C’est un luxe de construction
que vous ne connaissez pas,Mesdames; toute
la façade imitant une mosaïque avec des briques
émaillées, est couverte de vases et de guirlandes
’superbes de fleurs et de pages entières de l’Al-
Koran. Vous ne vous faites pas une idée de la
beauté et de la richesse d’un pareil édifice. Le
(1) Voyez Atlas, IIIe série, pl. 24.
dôme entier est aussi émaillé et semé d’ornements.
L’intérieur, ouvert du côté du nord, est
imposant par sa simplicité. C’est là, lorsque nul
toit, nulle terrasse, nulle cave, ne résistait à la
pluie de feu des bombes innombrables des
Russes, que s’était réfugiée une population effrayée,
qui supposait que Dieu et Mahomet ne
permettraient pas que les bombes dès Russes les
poursuivissent jusque dans leurs parvis. Tout à
coup une bombe perce le dôme et éclate à
ta* pieds au-dessus du sol, sur ces milliers de
têtes pressées. Qu’on juge de l’épouvante et de
la consternation. Dieu les abandonnait ; il fallut
se rendre, et dès cet instant on capitula.
Ces mosquées ouvertes vers le nord sont pour
l’été; on y jouit de la fraîcheur; mais pendant
l’hiver, on fait sa prière dans une plus petite
mosquée qui est en face, tournée vers le sud.
La grande mosquée de la ville d’Eri^n (1)
est dans le genre de celle quë je viens de décrire,
mais beaucoup plus vaste et à triple dôme. Sa
cour Carrée est plantée de beaux arbres au milieu
des fontaines, et ce qui n’est pas mosquée
d’hiver ou d’été est occupé par des habitations
deshadjis, des mollahs, etc., qu’on entend prier
du matin jusqu’au soir.
On ne connaît pas les toits dans Ce pays, et
( 0 Voyez Atlas, IIIo série, pl. 23.