bien célèbre dans les récits du peuple arménien
et géorgien. Encore à présent, on ne prononce
qu’avec une secrète épouvante le nom du fameux
brigand Schinderhans, le Cari More de l’Allemagne.
Partout, près deTiflis même, on montre
ses anciens repaires que l’on appelle châteaux; de
Keuroglou, d’où il tombait à la tête des siens
sur les passants et même sur les caravanes pour
les piller.
Mais sa principale résidence, son fort inexpugnable,
était placé sur les rochers à pic, nus,
auquel il a donné son nom : ce n’est qu’avec la
plus grande peine qu’on parvient à ce repaire ;
ce qu’il y a de certain, c’est qu’il existe encore.
Keuroglou ou Karaoglou était fils d’un palefrenier
du schah de Perse, qui eut les yeux crevés;
il naquit environ 4° à 5o an$ avant l’invention
de la poudre.
On raconte qu’étant dans son fameux fort de
Karaoglou, qui a beaucoup d’analogie avec la
Bastei, près de Dresden, il vit de son nid d’aigle
passer une caravane à travers l’Araxe. Il rassembla
ses gens, tomba dessus; le chef de la
caravane, étonné de cette subite apparition,
fit bonne contenance, et invita le fameux brigand
à prendre ce qui lui conviendrait le mieux.
Keuroglou, content de cette soumission, lui rendit
tout son bien. Pendant qu’il était ainsi occqpé,
il vit unhomme qui portait a sa ceinture un pislolel
ou petit fusil, et demanda ce que c elait. On
le lui expliqua. Keuroglou desira voir alors une
expérience, et le porteur du fusil tua un chien
sous ses yeux. Keuroglou n’en pouvait croire
ses yeux. « Adieu, Keuroglou, dit-il enfin, tu
n’as plus rien à faire ici. » Et depuis lors, on ne
le revit plus.
Nous traversâmes au-delà d’Amarat une des
plaines les plus uniformes qu’on puisse voir.
Elle est très-fertile et couverte de champs de
froment et de coton, arrosés par des canaux de
l’Araxe, qui coûtent beaucoup d’entretien, parce
que le terrain est en grande partie un sable volcanique
qui ne tient pas l’eau.
Ceux qui ne connaissent pas bien l’Arménie;
voyant toutes les extrémités de ces canaux revenir
à l’Araxe, se sont imaginé que c’étaient autant
de ruisseaux qui venaient des montagnes ;
et les ont ctassinés comme tels ; celte erreur se
trouve même dans la carte du général Khatof.
La, plaine tout entière n’a d’eau que de l’Araxe
: le premier canal: de déviation, celui .qui
doit longer le pied des montagnes; commence
un peu au-dessous de Karakala, faisant ensuite
un vaste circuit qui l’éloigne de 3o verst du:
fleuve, et recevant quelques-unes des sources
qui jaillissent au pied des montagnes et qui
donnent plus loin naissance au Karasou, comme
on va le voir. Par opposition au Karasou (eau