La forteresse communiquait avec l’autre rive
de l’Araxe par un pont dont il ne reste que
quatre piliers un peu disloqués en grès rouge.
A la tête du pont sont les ruines d’habitations
qui bordaient l’Araxe.
Traversant l’Araxe à gué, j ’allai visiter le cimetière
d’Erovantagerd sur une petite colline
adjacente à celle du château; près d’une carrière
de meules qu’exploitaient les anciens habitants,
je trouvai nombre de tombes encore dressées
en lave noire, et très-bien conservées. Le temps,
les guerres, les tremblements de terre, ont tout
ravagé, nivelé en Arménie ; les tombeaux seuls
sont restés intacts et bravent l’oubli.
L ’uii de Ces tombeaux porte pour inscription :
« Ce tombeau est celui de Martyrus, i 424> "
gravé avec nombre de croix sur une longue
pierre, haute de 6 pieds.
Elle prouve qu’en i 424 > cette ville était encore
habitée.
Les ruines des édifices de la ville sont très-
nombreuses jusqu’à l’Arpatchai, au - dessous
d’Hadji-Beïramlou. Ce sont de simples murailles
liées avec de la terre.
Nous eûmes, au passage de l’Arpatchai, à peu
près le même sort que Tournefort. (Voy. III,
362. ) Le gué est difficile et très-dangereux à
cause de la multitude de gros blocs de lave qui
sont entassés; la rivière abondante est fort
rapide. Nos chevaux cosaques\ qui étaient de
haute taille, avaient de l’eau jusqu’au ventre.
Le courant rendant leur marche incertaine, et
le mien montant tout à coup sur une grosse
pierre, je faillis me noyer avec lui, quand les
Cosaques effrayés accoururent à mon secours.
Les habitants d’Hadji-Beïramlou ont profité
du courant de l’Arpatchai pour y établir plusieurs
moulins.
L ’Arpatchai ou Akhouréan fait la frontière
entre la Russie et la Turquie, excepté ce petit
coin de ruines d’Erovantagerd que les Russes
ont encore sur la rive droite.
J’avais prié le général de me permettre d’aller
jusqu’à Pakaran et jusqu’à Ani ; mais comme ces
ruines sont sur la rive droite de l’Akhouréan et
par conséquent sur territoire turc, et qu’il m’aurait
fallu enfreindre les lois sanitaires, le général
me le refusa sans rémission; je ne pouvais m’en
plaindre ; je savais combien ce refus lui coûtait.
Etre à 26 verst d’Ani et ne pas voir ces ruines
magnifiques ! Ce que l’Arménie offre de plus curieux
et de plus admirable! Nombre de ses
églises sont encore debout, ainsi que ses murailles
d’enceinte, ses portes, ses palais : des
inscriptions, des sculptures partout.
Je me consolai de ce cruel contre-temps en
visitant sur la rive gauche de l’Akhouréan, vis-à-
vis d’Erovantagerd, les restes d’Erovantachad,