ensuite pour en faire un seul vase scellé avec de
1 argile à potiers, et que l’on recuit ensuite au
four.
Le vin se transporte au fur et à mesure que la
consommation l’exige, dans de grandes outres
d’un seul cuir de chèvre ou de buffle que l’on
tue d’une manière particulière pour avoir la peau
entière; l’intérieur qui est celui du poil, est soigneusement
goudronné de naphte noire de
Bakou, ce qui donne au vin qu’on y conserve
un gout désagréable de goudron aux premiers
jours qu’on en boit; mais on s’y habitue bien
vite. J’ai vu un consul français fraîchement débarqué
qui, le premier jour de son arrivée, ne
parlait de ce vin goudronné qu’avec une critique
amère, dès le troisième jour le trouva buvable,
et plus tard fort bon.
D ailleurs ce vin a deux qualités précieuses,
admirables : il ne fait pas mal à la tête (quand il
n est pas falsifié, s’entend), et non seulement il
ne donne jamais la goutte, mais il la guérit,
qualité qui a été éprouvée et confirmée par les
expériences de M. le docteur Conradi de Péti-
gorsk, qui s’est guéri lui-même de cette manière-
là. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il n’y a pas
de pays ou il y ait moins de goutteux qu’en
Géorgie.
Le vin de Cakhétie a en général une couleur
rouge magnifique que les habitants lui donnent
non seulement en faisant cuver leurs raisins
dans leurs grands bassins en bois, mais en y
ajoutant aussi une espèce de raisin qu’on cultive
exprès et qui donné une couleur superbe : on
l’appelle le sapêravi (le teinturant) ; grains ordinairement
ronds, feuilles qui deviennent rouges
de sang en automne, tandis que les autres feuilles
jaunissent; il teint les doigts quand on l’écrase.
J’ignore, d’après cette description qu’on m’a
faite, quelle est cette espèce de raisin, et je
doute même qu’elle existe. Ne serait-ce point
la Phytolacca? Mais certainement ce n’est pas
le petit sureau (hièble) qu’on emploie ici ; le vin
qui eu est mêlé donne de violents, maux- de tête,
et les Géorgiens sont fort habiles à reconnaître
le vin falsifié de cette manière.
Le vin transporté dans ces grandes outres de
buffle, offre le spectacle le plus étrange ; placées
sur le dos, les quatre jambes en l’air, gonflées
de vin, s’animent et se balancent avec un air de
vitalité, au moindre mouvement du char tiré
par d’autres buffles.
La seconde espèce de vin est celle que font les
colons allemands, qui le traitent à la façon*de
leur pays et le gardent dans des tonneaux ; cette
espèce n’a pas le goût de goudron bt moussé
plus ou moins; mais elle n’est pas recherchée à
Tiflis des Géorgiens qui préfèrent leur goût de
goudron ;s peut-être cela vient-il aussi du prix