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D e même au Snd-Oueft, le Mont-Zuc, la Rogne, & les autres
montagnes primitives au Nord du haut de l’Allée - Blanche, forment
un grouppe qui a auffi quelque choie de triangulaire, féparé du Mont-
Blanc par la vallée du glacier de Miage, & qui ne tient non plus au
Mont-Blanc que par la bafe des montagnes qui ferment au Nord
ce glacjer.
E n f i n , le Mont-Blanc lui-même forme une maiTe prefqu’ifolée,
dont les différentes parties ne font point fur la même ligne, & ne
paroiffent avoir aucun rapport de fituation avec les deux autres grouppes.
En portant mes yeux plus au loin, je confirmois la même obfcr-
vation; les montagnes primitives de l’Italie & de la Suiffe, dont j’étais
affez rapproché pour que mes yeux plongeaffent fur elles, ne me
préfentoient que des grouppes ou des maffes féparées fans ordre &
fans formes régulières. Je ne voyois reparoître l’apparence de chaînés
que dans celles dont la diftance étoit affez grande, pour que la vue
devint à-peu-près rafante.
C ette obfervation exclut toute idée d’une formation régulière, ou
la renvoie du moins à une époque antérieure à celle où nos montagnes
ont pris leur forme & leur arrangement actuel.
Structure g. 1956. C ependant , malgré cette irrégularité dans les formes &
montagnes, ^^ns les diftributions des grandes maffes, j’obfervois des reffeniblancés,
auffi certaines qu’importantes, dans la ftrudure de leurs parties. Tout
ce que je voyois diftindement, me paroiffoit compofé de grands
feuillets verticaux, & la grande généralité de ces feuillets dirigés de la
même maniéré, à-peu-près du Nord-Eft au Sud-Oueff.
J e us fur-tout un grand plaiiîr à obferver cette ftrudure dans
ïaiguille du Midi. On a vu, Chap. XVIII du fécond Volume, avec
quelle peine & quels dangers je m’étois traîné autour du pied de
cette aiguille, pour étudier fa forme, & avec quel regret je Pavois
O B S E R V A T I O N S G É O L O G I Q U E S , Chap. § Ë j g i
vue oppol'er, à mon ardente curiofité, les murs inacceffibles de granit
qui entourent la bafe. Là, je la voyois fous mes pieds, & je détaillais
à mon gré toutes lés parties.
Dis' le fécond jour du voyage, en arrivant au bord du plateau de
neige fur lequel je paffai la nuit, : je voyois au Nord- Eft, un peu
au-défieras de moi, des. efpeces de crenaux déchirés ; je demandai à
Piene Balmat ce que c’étoit; & quand il médit, ce que je reconnus
bientôt moi-même, .que c’étoit la cime de l’aiguille du Midi, je
reffentis une fatisfadion que j’aurois de la peine à rendre,.
En continuant de monter, je ne la perdis pas de vue, & je m’affu^i
qu’elle eft, comme les aiguilles de Blaitieres, §. 66f , entièrement
compofée de magnifiques lattes de granit, perpendiculaires à Phôriion ,
& dirigées du-Nord-Eft au Sud-Oueft. Trois de ces feuillets^ fépàrês
lesttns des autres -, forment fa cime : & d’autres femblables i dè'croiffiirit
graduellement de hauteur, forment fa face méridionale^du côté du
Col-du-Géant,
Je crois donc que .c’étoit une illufion, lorfqu’en Tobfervant de bas
en.hauf, il me jèttbloit la voir'compofée de famés appliquées autour
d’un axe comme les ièuîrtés’ d’tirt' artichaûdT ou'du moins s’il y a
quelques feuillets difpofés dans cet ordre, ce -ne font que les plus
bas': car en plongeant, ppur ainii dire; dans Ion intérieur, je voyois
tous fés feuillets parfâitenient parallèles entr’euif. '
J’ai donné les détails de eettfe cime comme'un exempte; toutes
celles que je pouvois voir diftindement, | me montraient à-peu-près
la même forme & la même diredion. S’il y avoit des exceptions,
elles étoient locales & de peu d’étenduè.
C e grand phénomène .s’e xp liq u e , comme j ’efpere Iç faire voir
dais 'a théor ie , par le .refoulemept .q u i a redreffé ; ces couches,
originairement horizontales.