Du Mont.
Cervin à
Zer-Matt.
portant le baromètre qu’on le mefurera ; car fes flancs efcarpés 110
préfentent aucune poflibilité d’accès, & ne donnent même pas de
prife à la neige.
L a valle'e de glace, couverte de neige, que nous avions a defcendre
pour aller de St. Théodule à Zer-Matt, vue de cette hauteur, paroit
d’une étendue immenfe.
I c i, encore point de granits en maffe, & point de couches verticales.
Le haut de St. Théodule & les rocs que je vifitai au Nord
au-deffus de,ce col, font compofés de couches alternatives, & peu
inclinées de ferpentines, de pierres calcaires & de quartz. Quant au
Mont - Cervin , je ne l’ai pas obfervé de bien près i cependant en
montant du Breuil à St. Théodule, j’avois fait un détour d’une
lieue fur la gauche,, ou au Nord, pour aller obferver les débris de
cette montagne fur un glacier qui en defcend; je ne trouvai là que
des granits veinés, & des roches feuilletées de quartz & de mica,
puais point de granits en maiTe.
■ §. 222i. Nous avions mis une heure à monter la pente méridionale
du glacier; nous en-mîmes à-peu-près deux à defcendre fa pente
feptentrionale. Les mulets n’enfonçoient dans la neige que jufqu’au
jarret, & fe tiroient fort bien d’affaire; ils faifoient, pour avancer,
des efforts qui marquoient leur empreiTement à fortir de ces régions
glaciales, & nous avions de la peine à marcher affez vite pour les
fuivre. Il eft vrai que la furface de la neige fe trouvant plus dure que
le fond ; tantôt elle nous foutenoit, tantôt elle nous laiffoit enfoncer
jufqu’au genou; & ces alternatives, ces demi-chûtes continuelles,
qu’on efpere toujours d’éviter, forment une allure également fatigante
& ridicule. Nous marchâmes1 d’abord au Nord-Eft, puis au
Nord-Nord-Eft, qui eft la direftion moyenne de la vallée de Viëge,
au haut de laquelle eft Zer-Matt où nous allions coucher. La vue
de ce village, entouré de bofquets & de belles prairies, donne un
plaifir vif au moment où on le découvre du milieu du glacier; il
tepofe doucement les yeux & l'eTprit fatigués de ne voir que des
neiges & des rochers ftériles.
Nous mîmes trois heures trois quarts depuis le bas du glacier
jufquà Zer-Matt; il ëft vrai que nous perdîmes quelques moments
à chercher & à ramaffer des fchorls cryftallifés de différentes couleurs
que nous rencontrions fur la route. La pierre dominante dans ces
montagnes eft une ferpentine demi - dure , ferrugineufe , verte en
dedans, mais qui rougit à l’air ; elle eft difpofée en couches à-peu-près
horizontales. '
Nous eûmes une peine extrême à trouver une maifon où l’on
voulut nous loger; les cabaretiers étoient ou abfents ou de mauvaifq
volonté. Le Curé qui loge quelquefois les voyageurs, nous fit répondre
qu'il ne voulait rien nous vendre. Enfin, notre brave guide Jean-
Baptifte Erin, chez qui nous avions logé aux chalets du Breuil, &
que je recommande à ceux qui feront ce voyage, força un çabaretier
à nous recevoir.
L a cime du Mont-Cervin, quoiqu’éloignée de ce village d’environ
deux ou trois lieues, paroît s’élever majeftueufement au-deffus de
lui ; auffi lui donne-t-il fon nom dans le pays de Vallais, où on la
nomme Matter-Hern ou Corne-de-Matt. Elle gît au Sud-Ousft, ou
plus exaétement à y j degrés du Sud par Oueft, du village.
§. 2222/ L e lendemain, i f août, en quatre heures trois quarts de De Zet.
marche, notis vînmes dîner à St. Nicolas, grand village de la valléeJV1at£ à
deViége, élevé de f6<stoifes; & de, là, en quatre heures un quart,.
coucher à Viêge, ou Fiesh-Bach, chef-lieu delà vallée de ce nom,
& dont l’élévation eft de toifes. La vallée de Safs, Saffer-Thal
en allemand & Val-Sofa en italien, dont l’extrémité fupérieure
aboutit, comme je l’ai dit ailleurs, au Mont-Rofe, vient fe joindre
a la vallée deViége vis-à-vis du village de Staider, que nous traver-
fâmes à une heure trois-quart au-deflus de Viége. La direéfion fous