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J’avois fait cette même expérience au bord de la mer; & là , dans
le,même efpace de tems, il s’étoit formé une croûte beaucoup plus
épaiffe.
P our varier cette expérience | je trempai des bandes de papier
dans de l’alkali végétal, ou potaflfe cauftique, préparée par mon fils
avec le plus grand foin. Ces bandes, en fortant du flacon qui ren-
fermoit l’alkali cauftique, ne faifoient aucune effervefcence avec les
acides; mais après qu’ellçs eurent été expofées à l’air fur la cime de
la montagne, pendant une heure & demie, elles fe trouvèrent deifé-
chées, & firent alors une très-vive effervefcence. J’avois pris pour
elles les mêmes précautions que pour l’eau de chaux. Il paroît donc
certain qu’à cette hauteur, l’air athmofphérique eft encore mélangé
d’une quantité fenfible d’acide carbonique.
Il m’eft cependant furvenu un doute. Je me ibis demandé s’il ne
feroit pas poifible que ce gaz ne fût produit dans l’air & dans Je
lieu même, peut-être par l’aclion de la lumière. Pour lever ce doute,
j’ai pris un flacon de verre, que je pouvois fermer exactement avec
un bouchon ufé à l’émeril; j’ai épuré l’air de ce flacon en y feeouant
de la chaux vive ; enfin, j’y ai renfermé des bandelettes de papier
trempées dans la même liqueur alkaline cauftique, & j’ai expofé ce
flacort à l’aCtion des rayons du foleil ; mais ces bandelettes ne font
point devenues comme à l’air libre, fufceptibles d’effervefcence-
D’où vient donc cet acide carbonique? Certainement il n’eft pas
proàuit dans les folicudes qui entourent la Cima du Mont-Blanc. Les
rochers ftérilçs n’en produifent point ; il n’y a la ni combuftion, ni
fermentation; les neiges & les eaux qui en découlent l’abforberoient
plutôt.
Il faut donc qu’il vienne des vallées & des plaines, d’où les vents
& les coûrrants d’air afcendants l’entraînent avec eux. Mais je ne
crois pas que ce Toit par. une aCtion purement méchanique, car fa
pefanteur le fépareroit ; je penfe plutôt quç les. différents gaz fe
diffolvent
O B S E R V A T IO N S M É T É O R O L O G IQ U E S , Chap. VIf jzoi
diffolvent mutuellement, & demeurent unis dans certaines proportions,
jufqu’à ce que des affinités fupérieures les féparent en les combinant
avec d’autres fubftances.
C e t te confidération me donneroit des doutes fur cette conjeihire
de M. L avoisier , que peut-être les régions fupérieures de l’athmof-
phere contiennent des gaz à nous inconnus, que leur grande légéreté
tient conftamment éloignés des couches denfes que nous habitons. II
me femble que ces gaz feroient mêlés, par des caufes méchaniques,
avec l’air que nous refpirons ; que malgré leur légéreté, il y demeureraient
diflous en partie, & donneraient, dans des analyfes foignées„
quelques figues de leur préfence.
§. aoi i. Une des expériences que j’avois le plus à coeur de tenter EbulUtiorç
fur la cime du Mont-Blanc, c’eft le degré de chaleur de l’eau bouil- de
lante. On fait qu’elle peine fe donna M. de L uo pour atteindre la
cime du Buet, dans le but unique d’y faire cette expérience; & jamais
depuis lors elle n’avoit été tentée à une plus grande hauteur. Or, le
Mont-Blanc étant élevé de plus d’une moitié en fus, il étoit bien
intéreffant de voir fi la formule de M. de Luc s’y vérifierait encore.
J’avois pour cela fait conftruire , par M. Paul , un appareil très-
foigné, avec un thermomètre armé d’un micromètre, par le moyen
duquel je pouvois diftinguer jufques à une millième de degré. Et
comme M. de L uc avoit éprouvé tant de difficulté à faire brûler du.
charbon fur le Buet à caufe de la rareté de Pair; j’avois lieu de craindre
de ne pouvoir point y réuffir du tout fur la cime du Mont Blanc.
Pour écarter cet obftacle, j’avois fait faire une lampe à, efprit-de-vin,
fur les principes de celles de M. A r o a n d , & d’un grand diamètre,
avec une cheminée de toile, au-deffus de. laquelle s’adaptait la
bouilloire où fe faifoit l’expérience. Je m’affurai .à plufieurs reprifes
que mon thermomètre montait exactement à 80 degrés dans l’eau que je
Jaifois bouillir dans cette bouilloire, quand le baromètre était à 27 pouces:
Je portaienfuitecet apparsil au bord delà mer, le 22 avriii.TS?-,,
Tome IV. ' C e