M O N T - B L A N C ,
quelconque comme après avoir fait une montée rapide. Cependant fc
vue des montagnes me donna une vive fatisfadion, & on en verra les
détails dans le chapitre fuivant.
M ais avant de contempler ces obj ets é lo ign é s , je dois dire un mot
de la forme de cette c im e , & achever de décrire les rochers qui en
font les plus proches.
Forme § . 1 992. O n ne trouve point de plaine fur la cime du Mont-Blanc;
3e la cime. c>ep. une efpece (je dos-d’âne, ou d’arrête alongée, dirigée du levant
au couchant, à peu-près horizontale dans fa partie la plus élevée, & def-
cendant à lès deux 'extrémités fous des angles 'de 28 à 3° degrés.
Cette arrête eft très-étroite, prefque tranchante à fon fommet, au point
que deux perfonnes ne pourraient pas y marcher de front; mais elle
s’élargit & s’arrondit en defcendant du côté de l’E ft, & elle prend du
côtédel’Oueft la forme d’un avant-toit, Taillant au Nord. Toute cette
fommité eft entièrement couverte de neige : 011 n’en voit fortir aucun
¡rocher, fi ce n’eft à 60 ou 70 toifes au-deffous.
D es deux faces de l’arrête, celle au Nord defcend rapidement ,
d’abord fous un angle de 40 à 50 degrés , - mais elle devient enfuite
encore plus rapide, & finit par aboutir à d’affreux précipices. Au midi,
au contraire , cette pente eft fort douce, de 15 à vingt degrés au plus;
& plus bas elle forme un berceau en fe relevant en fens contraire,
du côté du Sud, où elle va former au-deffus de l’Allée-Blanche une
pointe afifez élevée, fous-laquelle eft un avant-toit de neige, & fous
cet avant-toit font les roehers que je voyois du haut du Cramont &
que je prenois pour la cime, parce qu’ils me cachoient la véritable
cime neigée. Cette faillie au midi, eft caufe que quand on regarde
la cime du Mont-Blanc de prof i ldu côté de l’Eft ou de l’Oueft, du
St. Bernard, par exemple, ou de L yon , on voit au-deffous de cette
çime une efpece de crochet ou dç nez retroufle qui fe releve du côté
dp midi.
§. I99h
R O C H E R S E T D É T A I L S , ehap. III. 177
§. 1993. P e n d a n t que j’étois occupé à ces obfervations, J a q u e s
B a lm a t m’offrit d’aller me chercher quelques morceaux des rochers
dont je viens de parler, qui forment la pointe relevée aü-deflus de l’Allée-
Blanche. J’acceptai cette offre avec empreffèment. Comme il s’étoit bien
repofé, il fe fentit toutes les forces, & il crut pouvoir aller là en
courant , mais bientôt la refpiration lui manqua, & pour reprendre
haleine il fut obligé de s’étendre tout de fon long fur la neige. Cependant
il fe remit, & d’un pas plus mefuré , il m’apporta de« trois
genres de pierre fuivants.
i° . D es granits parfaitement femblablcs à ceux que j’ai décrits
§. 1987.
20. Des fîénites ou granitelîes, c’eft-à-dire, des roche« compoféei
de lames de hornblende noire & de feldfpath blanc, auffi lamelleux,
niais l’un & l’autre en fi petites parties, qu’on pourrait tout auffi bien
donnera ces rochers le nom de trapp, d’après la définition que j’ai
donnée au §. 194«.
3°. Un petrofilex primitif ou palaïopetre, gris de perle, translucide
à deux tiers de lignes , à caffure écailleufe, à grandes & petites
écailles, affez dure pour donner de vives étincelles, mais fe
laiffant pourtant rayer en gris par une forte pointe d’acier. Au chalumeau,
011 peut en former des globules de o , 45 ; ce qui indique la
fùfibilité de la gueufe, 126 ou 130 de Wedgewood. C’eft un verre,
g r is , demi-tranfparent, bulleux , qui fur le filet de fappare gagne en
tranfparence & s’affaiflè, mais fans pénétrer ni diffoudre, & même Cms
fe débarraffèr entièrement de fes bulles.
C e t t e palaïopetre renferme des veines d’une à trois lignes de largeur,
qui fe croifent fous différents angles, & de petits nids de hornblende
verd de porreau foncé, confuiéwient cryftallifée, ou en lames rarement
droites, ou en fibres médiocrement groflès,
2 orne IF . Z
Rocher
le plus eleve
au fuel
de la sime,-