
 
        
         
		Ktoiles  vi.  
 iibles  en  
 plein  jour. 
 j "M  O  N  T  •  B  L  Â  N  C,  
 femblables  entr’elles :  je  laifTai  l’une  de  ces  fuites  entre  les  mains  de  
 M.  S e n e b i e r ,  à  Geneve,  l’autre  à  mon  f i ls ,   à  Chamouni,  &  j emportai  
 la  troifieme.  A  midi,  du  jour  où  j’étois  fur  la  cime,  le  ciel,  
 au  zénith  à  Geneve,  paroiffoit  de  la  feptieme  nuance;  à  Chamouni,  
 entre  la  cinquième  &  la  fixieme,  &  fur  le  Mont - Blanc,  entre  la  
 première  &  la  fécondé,  C’eft -  à  - dire,  tout  près  du  bleu  de  roi  le  
 plus  foncé. 
 Depuis  lors,  confidérant  cette  intenfité de  la  couleur du  ciel comme  
 un  élément  intéreffant de la météorologie,  j’ai fait un travail fuivi fur fçs  
 variations, &  j’aielfayé de les  mefurer  en les comparant  avec  une  fuite  
 de  nuances  dont  l’intenfité  s’accroît  par  des  degrés  déterminés  avec  
 précifion.  J’ai  commencé  par  un  bleu  fi  pâle,  qu’il  fe  confond  avec  
 le  blanc,  à  une  diftance  où  l’on  ceffe  d’appercevoir  un cercle blanc,  
 d’une  grandeur,  &  dans  une  fituation  déterminée ;  j’ai  paffé  delà  à  
 un  bleu  plus foncé,  mais  qui  cependant  ne  différé  du  premier  qu’autant  
 que  celui-ci  différé  du  blanc;  &  ainfi  de  nuance  en  nuance  
 jufqu’à  un  bleu  mêlé  de  noir,  &  rendu  ainfi  tellement  foncé  qu’il  ne  
 différé  du  noir  pur  que  par  une  nuance  égale  à  la  première.  Ainfi,  
 l’intervalle  entre  le  blanc  pur  &  le  noir  pur,  s’eft  trouvé  divifé  en  
 y 1  nuances,  dont  la  couleur  du  ciel,  fur  le  Mont - Blanc,  formoit  
 la  trente - neuvième.  On  verra,  dans  le  voyage  au  Col-du-Géant,  
 quelques  réfultats  des  obfervations  que  j’ai  faites  avec cet  inftrument ,  
 auquel  j’ai  donné  le  nom  de  cyanometre. 
 Malgré  l’intenfité  de  la  couleur  du  ciel,  les  ombres  fur  la  cime  
 du Mont-Blanc  ne paroiffoient  nullement  colorées.  Il  eft  vrai  que  les  
 heures  que  j’y   paffai,  n’étoient  pas  favorables  à  cette  obfervation. 
 L a  grande  pureté  &  la  tranfparence  de  l’air,  qui  font  les  caufes  
 de  iTifiteiifité  de  la  couleur  bleue  du  ciel,  produifent  vers  le  haut  du  
 ■Mont-Blanc  -un  fingulier  phénomène,  -c’eft  que  l’on  peut  y  voir  les  
 'étoilés  en  plein  jour ; mais  pour  cela,  il  faut  être  entièrement  â  
 l'onSbre,  &  avoit  même,  au-deffus  de  fa  tête,  une  maffe  d’ombre 
 O B S E R V A T IO N S   M É T É O R O L O G IQ U E S ,  Chap.  V I .   ,.99  
 d’une  épaiffeur  confidérable ;  fans  quoi,  l’air  trop  fortement  éclairé  
 fait  évanouir  la  foible  clarté  des  étbiles.  L’endroit  le  plus  convenable  
 pour  faire  cette  obfervation  le  matin,  étoit  la  montée  qui  conduit  
 à  l’épaule  du  Mont-Blanc,  §.  1985;  quelques-uns  des  guides  ont  
 affuré  avoir vu  de-là des  étoiles;  pour  moi, je  n’y fongeai  pas  :  enforte  
 que  je  n’ai  point  été  le  témoin  de  ce  phénomène ;  mais  l’affertion  
 uniforme  des guides  ne  me  laiffe  aucun  doute  fur  fa  réalité. 
 Un  autre  effet Jingulier  de  la pureté  de  l’air &  de  la  couleur  foncée  
 du  ciel,  qui  en  eft  la  fuite,  fut  un  mouvement  de  terreur  qu’il  
 infpira  à  quelques  guides  dans  une  des  premières  tentatives  qu’ils  
 firent  pour  atteindre  la  cime.  Comme  ils  graviffoient  une  pente  de  
 neige  rapide,  ils  virent  tout-d’ün-coup  le  ciel  par  une  efpece  d’em-  
 brâfure  qui  terminoit  le  haut  de  cette  pente;  la  couleur  noire  du  
 cielîeur  fit  prendre  cette  embrâfure  pour  un gouffre;  ils  rebroufferent  
 ¿’épouvante,  &  rapportèrent  à  Chamouni  qu’ils  n’avoient  pas  pu  
 avancer, parce qu’ils avoient vu un gouffre horrible  s’ouvrir devant eux. 
 §.  201 o.  On  fait  que  Beau  de  chaux  fe  trouble,  ou  du  moins  fe Eau de 
 couvre  d’une  pouffiere,  &  même  d’une  pellicule  pierreufe.,  loriqu’elle «S?1 ’  ? 
 eft  en contait  avec  l’air  fixe  ou  acide  carbonique.  tique. 
 C omme  j’étois  curieux  de  favoir  fi  ce  gaz,  dont  la  pefanteur  eft  
 prefqye  double  de  celle  de  l’air  commun,  s’élève  jufqu’à  la  hauteur  
 du Mont-Blanc,  je  portai  de  l’eau  de  chaux  fur  la  cime,  &  je  la  
 mêlai  avec  parties  égales  d’eau  diftillée,  pour  que,  s’il  paroiffoit  une  
 pellicule  à  fa  furface,  on  ne  fût  pas  dans  le  doute  fi  ce  n’étoit  point  
 l’effet  de  l’évaporation.  Je  remplis  ainfi,  de  ce  mélange,  deux  petits  
 gobelets  de  verre,  que  jepofai  fur  la  cime,  loin  de  la  place que  nous  
 occupions,  &  en  prenant  bien  garde  à  ne  pas  diriger  fur  eux  ma  
 refpiration.  Au  bout  d’une  heure  irois-quarts,  je  trouvai,,  fur  chacun  
 des verres ,  une  pellicule  couleur  d’iris, nageant  à la  lyrface  de  l’eau>  
 qui  commençoit  à  fe geler fur  les  bords.