î8o D E S N U 4 Ç ES E T O R A G E S , &c. Ckap. IX ;
C H A P I T R E I X .
DES N U A G E S , DES ORAGES E T DE QUELQUES
AUTRES PHENOMENES MÉTÉOROLOGIQUES.
Nuages §• 207°- O n connoit ces nuages que l’on a nommés parafites, qui
parafites. s’attachent à la cime des montagnes, & qui iouvent comme ceux de
. la montagne de la Table au Cap de Bonne-Elpérance , font lés précur-
feurs de grains ou d’orages. M. d u C a r l a a publié dans les Journaux
de pbyfique de l’année 1784 , un grand nombre de faits intérêt,
fants fur les nuages parafites,
Qn voit fréquemment des nuages de ce genre fe former fur la
cime du Mont-Blanc; & là aufli on les regarde comme des indices
de mauvais tems. Mon féjourfurle Col du Géant, où j’étois fi voifin
de cette cime , me donna la facilité de les obferver avec foin.
C es nuages parodient immobiles, & ils le font réellement dans leur
totalité : ( 1 ; mais fi l’on en obferve un de près, & arec attention,
on y diftinguera un mouvement inteftin extrêmement vif. On verra
que fes petites parties & fouvent des flocons plus obfcurs que famaffe
font entraînés avec beaucoup de rapidité dans la diredion du vent. Il
Q1 ] C’cft dans ce Cens qu’Homere a employé l’image de ces nuages pour donner la
plus haute idée de l’immobilité des Grecs, en foutenant l’impétuelité des Troyens.
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Àrgi/xxç~ lUad, Y7. 523.
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N U A G E S E T O R A G E S , Chap. / X. 28*
efi donc évident que ce ne font point les mêmes parties qui demeurent
en place, mais que ces parties fe renouvellent continuellement. Sans
doute qu’un vent chaud, prefque faturé d’humidité , rencontrant la
cime glacée du Mont - Blanc fe refroidit allez pour ne pouvoir pins
tenir en diffolution les molécules d’eau, qui fe précipitent alors 3t
prennent la forme véficulaire ; mais elles font auifi-tôt entraînées par
le vent hors de la fphere d’adivité du froid de la montagne ; alors
elles fe diflolvent & difparoiflfent de nouveau. Cependant peu-à-peu
l’air fe fature, même hors de la fphere d’adivité du froid, le nuage
s’accroît foit en hauteur, foit en étendue, & l’on voit fouvent le vent
détacher du nuage principal des lambeaux qui, entraînés au loin finit
fent par fe diffoudre jufqu’à ce qu’une grande maffe d’air étant raturée
, il tombe enfin de la pluie.
C omme ces lambeaux de nuages que le vent détachoit de la çims
du Mont-Blanc, alloient quelquefois rafer d’autres cimes dont je con-
noiifois la hauteur & la diitance ; j’eus une fois la curiofité de mefurer
leur vîteife , je la trouvai d’environ 60 pieds par fécondé. J’aurois
voulu auffi mefurer le tems que ces nuages mettoient à fe diffoudre ,
mais je n’y réuflis pas; lorfque je les prenois trop petits, ils étoient
fondus avant d’avoir atteint une cime connue ; & lorique je les prenois
trop grands , ils dépaffoient ces cimes avant leur diffolutioii.
L ’ e x p o s é de ces faits prouve, qu’au moins au Mont-Blanc, les
nuages parafites ne font pas produits par un vent afeendant qui porte
les vapeurs du bas au haut d’une montagne ; car là certainement ,
c'eft un vent horizontal qui les dépofe fur les fommités. On ne voit,
comme dans le paragraphe fuivant, des nuages monter le long de là
pente d’une montagne , que quand cette pente a été réchauffée par
l’aition du foleil. Et ce n’eft pas une émanation du calorique fortant
de la cime d’une montagne qui détermine la formation du vent & des
nuages ; c’eft au contraire le froid de la montagne qui produit les
nuages en condenlànt les vapeurs que tient en diffolution un vent plus
chaud que le corps ou la cime de cette montagne.
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