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 Mais  ces  Mettes,  charriés  là  malgré  eux  par  les  vents,  engourdis  
 , prefqu’immobiles,  n’arrivoient  fur  ces  neiges  que  pour  y mourir  
 de  faim  &  de.foif.  Nous  en  vîmes  d’autres,  au  contraire,  qui  habi-  
 toient ou  paroiiïoient du moins habiter,  par  plaifir,  la  neige qui s’êtoit  
 coniervée  par  places,  fur  la  cime  du  Breit-Horn. 
 Ces  Mettes  font  noirs,  brillants,  très-petits  &  couverts fur  le  dos  
 d’écailles  pointues ; ils font pourvus  d’antennes  allez  longues & recourbées  
 en-dehors ; ils font  fouples,  agiles,  &  faucoient  lorfqu’on  vouloit  
 les  prendre; je ne penfai pas  à  examiner en les  décrivant li c’eft à  l’aide  
 d’un  reflfort  placé  fous  le ventre qu’ils  exécutent  ces  fauts ;  mais  d’après  
 la  réunion  de  tous  les  caratteres  que  j’en  ai raffemblés,  il paroît  
 qu’ils  appartiennent iau  genre des  F(¡dures.  Cette  efpece paroît  là  très-  
 vive  &  très-bien  portante ;  elle  couroit  avec  beaucoup  de  vivacité  
 entre les  grains  de  neige.  Comme  cet Mette n’a  point  dalles,  il  faut  
 qu’il nailfe & meure fur ce  rocher,  & l’on ne voit là que des  lichens  qui  
 puiffent  lui  fervir  d’aliment,  à  moins  qu’ils  ne fe nourriifent  de  terre  
 ou  de neige,  dont  l’eau fe décompofe  dans- leur  corps ;  c’cft du moins  
 L’opinion de  M.  G éofroi ,  qui dit  que  les  podures paroiifent fe nourrir  
 de  l’humidité  de la  terre. 
 Etat  de  §•  2Mo.  Pour  nous ,  fans  être  auffi  vifs  &  auffi  agiles  que  ces 
 la  refpira-  p0Cîures,  nous  étions  très -  heureux  &  très - bien  portants  fur  cette 
 cime ;  nous y paflàmes 2  heures § très-agréablement ;  aucun  de  nous ne  
 fut  incommodé  de  la  rareté  de  l’air,  fi ce n’eft notre guida  du Breuil,  
 J.  B.  Erin,  qui  en  montant  le dernier rocher  fe  plaignoit  de  ce  que  
 nous  allions  trop  vite,  &  qui  s’endormit  fur  la  cime dès  que nous  y  
 firmes  arrivés.  Cependant  le  repos  lui  rendit  la refpiration  plus facile  ,  
 &  nous  dînâmes  là  tous  enfemble  de  fort  bon appétit. 
 Vue du  §.  2151.  Du haut du Breit-Horn  la  vue  plonge dans  le  grand  gla-  
 Swa  cier  qui  defcend  à  Zer-Matt ;  (1 )  la  cime  eft  précifément  dans  la 
 ( i )  Il  paroît que  c’eft  cette  vallée  de  |  nom  de  Muttià  ValUs,  Jt.  Alp.  t.  II,  p* 
 dont  parle  S ch eu ch z e» ,  Tous  le  I  303.  G eü k e r   en  parle  auffi  dans  fa  dtj. 
 C I M E   D U   B R E I T - H O R N ,   Chap.  V 1.  +Ï1 
 direttion  de  ce glacier au  Nord-Eft,  ayant  le Mont-Cervin  à gauche,  
 le Mont Rol'e  à  droite;  enforte  que  ces  hautes  cimes,  leurs  chaînes  
 & leurs  glaciers  préfentent  de  là  un  magnifique fpettacle. 
 Je  confirmai  les  obfervations  que  j’avois faites la  veille fur laftruc-  
 ture  du Mont-Cervin.  J’avois  côtoie  une  couche  brune  horizontale,  
 vraifemblablement  de  ferpentine ,  qui paroiifoit  former  au-defius  du  
 glacier  la  baie  de  l’ojbelifque du Mont-Cervin;  &  je  dôutois  fi  elle  
 étoit  en avant de la montagne,  ou  fi réellement  elle faifoitcorps avec  
 elle-  Mais  de  la  cime  du Breit-Horn,  comme  mes  yeux plongeoient  
 dans  cette  bafe,  je reconnus  difiinttement  que  cette couche ne faifoit  
 point  corps^ avec la  montagne ,  mais qu’elle étoit  détachée  & fort  en  
 avant  du  côté du glacier. 
 I l   ne feroit pas même impoflible que ce ne fût un mouvement de cette  
 couche  qui a  donné  lieu au fait rapporté  par  G r u n er.  En  effet  les  
 gens  du pays ,  aifurent qu’autrefois le chemin pafloit  tout près de l’aiguille  
 du Mont-Cervin; & que c’eft depuis un mouvement deJa montagne  
 que  l’on a été obligé  de  s’en éloigner,  &  d’alonger le  chemin en  
 paifant  par  le Col  que l’on traverfe  attuellement. 
 Le  Mont-Cervin  &  les  hautes cimes qui  lui font attenantes du côté  
 du  Nord, vues  du Breit-Horn,  paroifTent former une chaîne  concave  
 &  efcarpée  du  côté  du  glacier,  contre  la  chaîne  oppofée,  qui  fait  
 partie  de  l’enceinte  extérieure  du Mont-Rofe.  Et  l’on remarque dans 
 cription  des  glaciers  de là   SaiJJe ,  t. I ,  p.  
 230.  Le  village  qu’il nomme Paraborque  
 eft celui  que  les  Allemands nomment Zer-  
 Matt ,  &  les Italiens  Praborn.  Il rapporte  
 un  fait  remarquable, mais  fans  aucun détail  
 &  fans  citer  fes  autorités.  Le  Mont-  
 fe rv in  v der  hphe  Mattemberg%.  dit - il  ,  
 s'eat t'ouvrit  en  1595,  forma une  crevajje  
 de  6  pieds  de  largeur ,  qui  rendit  
 impraticable  le  paffage  qui  conduifoit  
 par là  en  Italie}  enforte qu'on fu t obligé  
 dy çonfruire un pont.  Le  traducteur fran«  
 qois  de  cet  ouvrage  à  omis,  je  ne  fais  
 pourquoi  ce  paffage ,  qui  auroit  dû  fe  
 trouver à  la  page  KS7. de  fa traduction.