y2g A G E N D A,. &c.
dans l’attitude de la petite figure qui eft à gauche au haut de la même
vignette; car en côtoyant ou en de'cendant une pente rapide, ou en
marchant fur une corniche au bord d’un efcarpement, il faut toujours
s’appuyer des deux mains, en tenant le bâton du côté de la montagne
& non point du côté du précipice , comme font ceux qui n’ont
pas^appris l’art de marcher dans les montagnes.
i8°. Pour ne pas gliffer fur les neiges dures, les glaces & les gazons
ras, qui font plus dangereux encore , j’avois confeillé des crampons
que j’ai fait graver dans la planche III du premier volume, & je m’en
fuis pendant long-tems fervi avec fuecès. Cependant dans mes derniers
voyages j’ai préféré des fouliers dont l’épaiffe femelle de cuir eft armée
de fortes vis à 8 ou 9 lignes de diftance l’une de l’autre ; les têtes de
ces ris font d’acier & ont la forme d’une pyramide quarrée. J’en ai de
petites dont la pointe n’a que 2 3 lignes de hauteur fur une largeur
à peu près égale, pour les glaces, les rochers & les gazons, &
d’autres d’une dinjenfion double pour les neiges dures.
190. Enfin , pour la nourriture, lorfque l’on doit féjourner un peu
long-tems dans des déferts éloignés des habitations & même des chalets
, on peut porter quelques pièces de viande lalée ou affaifonnée ;
mais le falep de pommes de terre de M. P a r m e n t i e r , avec des
tablettes de bouillon & du pain forment la nourriture la plus reftau-
rante & du plus petit volume. Un petit réchaud de fer, un petit fac
rempli de charbon, & une calferole de cuivre ou de fer étamé, forment
ma vaiifelle de montagne. On trouve des écuelles & des cuillers
de bois dans les derniers chalets.' Il conyient cependant de porter habituellement
dans fa poche un gobelet de réfine élaftique pour étancher,
fans aucun apprêt, la foif importune que l’on éprouve fi fouvent dans
ces voyages. .
O w voit d’après cet expofé que l’étude de la géologie n’eft faite ni
pour des pareffeux , ni pour des hommes fenfuels ; car la vie du géologue
eft partagée entre des voyages fatigants , périlleux, où l’on
eft privé de prefque toutes les commodités de la vie, & des études
variées & approfondies dans le cabinet. Mais ce qui eft plus rare encore
, & peut-être plus néceffaire que le zele qu’il faut pour furmon-
ter ces obftacles, c’eft un efprit exempt de préventions , paffionné
de la vérité feule , plutôt que du defir d’élever ou de renverfer des
fyftêmes, capable de defcendre dans les détails indifpenfables pour
l’exaditude & la certitude des obfervations, & de s’élever aux grandes
vues & aux conceptions générales. Cependant il ne faut point que
ces difficultés découragent ; il n’eft aucun voyageur qui ne puilfe
faire quelque bonne obfervation & apporter au moins une pierre digne
d’entrer dans la conftruftion de ce grand édifice. En effet, on peut-être
utile fans atteindre à la perfedion : car je ne doute pas que fi l’on compare
avec cet agenda les voyages minéralogiques, même les plus eftimés ;
& à plus forte raifon, ceux de l’auteur de cet agenda , l’on n’y trouve
bien des vuides, bien des obfervations imparfaites, & même totalement
oubliées ; mais j’en ait dit la raifon dans 1 introduélion ; d’ailleurs,
plufieurs de ces idées ne me font venues que depuis que j’ai fait ces
voyages. C’eft pour cela que j’ai travaillé avec intérêt à cet agenda, dans
l’efpérance de mettre des jeunes gens, dès l’entrée de leur carrière, au point
où je ne fuis arrivé qu’après trente - fix ans d’études & de voyages.
F I N du quatrième & dernier Volume.