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C H A P I T R E X V I .
C I M E D E L A P R O S E .
j®“ 4' §• i84®- L a Profe, Prof a, eft la fommité qui domine du côté de
1 Eft 1 hofpice des Capucins, comme Fieüt le domine, mais de plus
loin à l'Oueft. Je n’étois point monté fur cette cime, en 1775 , & je
réfolus de la vifiter en .1785. Aucun voyageur n’y étoit encore allé;
les bons Capucihs regardoient même cela comme impoffible. Le plus
jeune d’entr’eux, le P. C a r l o , qui fe difoit très - avventurofo dans
les montagnes, afluroit quil avoit inutilement tenté d’y parvenir; &
lorfque mon nouveau guide, Lazaro Eufebio, s’offroit à m’y conduire
& le vantoit d’y être monte, les Peres le trairaient d’impol-
teur, & foutenoient que cette cime étoit abfolument inacceffible.
J’avois bien moi-même quelques doutes, fur-tout àcaufed’un épais
brouillard, qui depuis deux jours que j ’avois patlés à l’FEoipice n’avoit
pas celle de régner, & qui de l’aveu même du guide rendoit, s’il ne
fediffipoit pas, cette entreprife impoffible. Le a ï juillet, au matin, le
brouillard régnoit encore, & la durée de' mon voyage étoit limitée
de maniéré qu’il falloit faire cette courfe ce jonr-là, ou-y renoncer
pour toujours. J etois fur le point de prendre ce parti & de defeen-
dre le St. Gothard, lorfque je vis le brouillard s’élever un peu, &
laiffer à découvert le pied de la montagne.
Je pris alors le parti d’aHer au moins voir ce pied, & de monter
jufques à l’entrée du brouillard. Ma confiance fut récompenlèe, le
nuage s’élevoit en même tems que moi. Si je m’y engageois pour ufl
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moment, il me devançoit enfuite ; & la cime fe dégagea entièrement.
| limitant même où j’y arrivai. Nous fîmes rouler de groffes. pierres,
& nous parvînmes à nous faire entendre des Capucins, qui ne pou-
vôiènt pas en croire leurs yeux, lorfqu’ils nous .virent fur la cime au
bout de leurs lunettes.
I l eft vrai qu’une partie de la pente eft extrêmement roide; nous
renl'ontrames le corps d’une vache, qui s’étoit précipitée en paif-
fant fur le bas de cette pente ; & quoique cet animal ne l'oit pas le
fymbole de la légéreté, je crois qu’il y a peu de, naturaliftes de la
plaine, qui ofaffent le fuivre fur nos Alpes par-tout où il va. Il n’y
a cependant fur cette montée, ni précipice, ni paffage vraiment difficile
& dangereux.
: §• 1841. A p r è s demi-heure de marche, depuis l’Hofpice, en arrivant Nature
au pied du roc vif de la montagne, je rencontrai des feuillets de j . T ?
granit, veiné, ondé, dans une fituation très-inclinée ; leurs plans font
codhtne ceux du. bas de la montagne, dirigés du Nord-Eft, au Sud-
Oueft, & en appui contre le Sud-Eft. Les veines intérieures de la
pierre parallèles à ces plans, démontroient que c’étoient bien des
couches, & non point des Silures accidentelles.
flfTRois quart-d’heure après, je trouvai d’autres couches de la même
nature, mais qui couraient du Nord au Sud.
S- '842. L a cime eft de granit en malle, en gros blocs entailles Nature
leSfuns fur les autres, comme ceux de Fieüt ; le. plus élevé de ces rion'cMa
blocs, lür lequel je m’établis, repofoit fur d’autres; on voyoit même cime,
le jour par dellous.
HrJe mis, pour y arriver, deux heures & demie, de la marche lente
â|un obfervateur, le baromètre, corrigé de l’action de la chaleur, fe
iiliteuoit à 2,0 pouces j- lignes , & le thermomètre en plein air à £ 4