v enaient de. reunir à leur Empire : ils en concédèrent à perpétuité,
sans redevance, quelques portions auprès des villes et dans leur
enceinte, aux officiers et aux soldats dont fis voulaient récompenser
le zèle et la bravoure : ils en destinèrent un assez grand nombre au
culte religieuxj ils en réservèrent, comme apanage, pour les grands
emplois administratifs et judiciaires ; ils érigèrent les autres en
seigneuries, sous les noms de zairn et de tin lu r , pour être données
à v ie , comme recompenses et encouragemens militaires.
Presque tous les riches Grecs furent dépossédés de leurs propriétés
: la plupart des hommes opulens furent impitoyablement
massacres et leurs biens confisqués. Quant aux terres divisées en
petites portions, quelques-unes furent la proie du vainqueur, les
autres restèrent entre les mains de leurs anciens propriétaires, avec
la faculté pour tous de les transmettre à leurs héritiers, de les vendre
et de lès échanger ; mais elles furent grevées d’une redevance annuelle
; savoir, d un cinquième des produits pour les rayas ou
infidèles , et d un septième seulement pour celles qui échurent aux:
Musulmans.
Ceux qui possèdent an zaïm ou un timar, sont honorés du titre
d’aga •- ils sont tenus à un service militaire personnel, et obligés
d’emmener avec eu x , à la guerre, un ou plusieursgébéüs, cavaliers
ou fantassins, armés et équipés suivant le revenu et l ’étendue de
la seigneurie. Le timar ne diffère du zaïm qu’en ce qu’il est de
moindre valeur , et que l’aga qui le possède, n’arme pas autant de
Cavaliers et de fantassins que l’autre.
Le nombre des zaïms, dans la Turquie européène, est de neuf
cent quatorze, et celui des timars est de huit mille trois cent cinquante
six. On en compte à peu près un pareil nombre en Asie ; ce
qui fournit, avec les gébélis, une milice de plus de soixante mifla
hommes plus instruits et plus aguerris que les spahis et les janissaires.
Cette milice a fait pendant long-tems la principale force de
l ’Empire othoman ; c’est à elle principalement que les premiers
Sultans ont dû les succès éçonnans de leurs armes, et les progrès
rapides qu ils ont faits en peu de temps en A s ie , enEurope et même
en Afrique,
A la mort d’un ziamet ou d’un thnariot, le sultan doit retirer une
année de revenu de lâ seigneurie, et la céder néanmoins de nouveau
au fils d’un aga, d’un spahis ou de tout autre militaire, à celui surtout
q u i, par quelqu’action d’é clat, s’est signalé dans une bataille ;
qui le premier est monté à l’assaut, a pénétré dans les retranchemens
ennemis, a tué un grand nombre d’infidèles ou contribué à les
mettre en déroute. Mais depuis que les sultans préfèrent aux fatigues
de la guerre, aux dangers des combats, la tranquillité de leur
sérail, les plaisirS de leur harem; depuis surtout qu’une basse et
mal-adroite cupidité a fait mettre à l ’enchère les places destinées
autrefois à la valeur et au mérite, les seigneuries sont devenues le
patrimoine des riches et des intrigans. Le courage du soldat n’a
plus été stimulé que par l ’espoir du pillage, celui de faire des prisonniers
ou d’obtenir quelques pièces de monnaie que le général
fait quelquefois distribuer après la bataille, à Ceux qui ont apporté
des têtes ennemies. C’est ainsi que les meilleures institutions dégénèrent
; c’est ainsi que le Musulman, autrefois intrépide et valeureu
x, n’est plus qu’un vil pillard ou un féroce assassin; c’est ainsi
que les armées othomanes , si redoutables à leurs ennemis, sont
devenues un objet de mépris ou dé pitié, èt que ce vaste Empire
n ’existerait déjà plus si quelques puissances européênes n’étaient
pas intéressées à le maintenir. \
L ’aga obtient aujourd’h ui, de son vivant, avec assez de facilité,-
la concession de la seigneurie dont il jouit, en faveur d’un ou dé
plusieurs de ses fils, moyennant une somme d’àrgent inférieure à
celle qui se paie lorsqu’elle est à l’enchère ;' mais s’il néglige cette
précaution, à sa mort son fils est évincé s’il ne couvre l'enchèré
des conCurrens, ou s i, fortement protégé, il ne paie au moins 1«
prix offert par un autre.
La plupart des agas , peu accoutumés aux fatigues de la guerre
et aux privations qu’elle nécessite, se dispensent depuis long-tems,
sous divers prétextes, du service militaire : ils trouvent toujours les
pachas et les sangiaks-beys disposés à recevoir un présent de leur
p a r t, et à leur accorder l’exemption qu’ils demandent. Us se font
souvent remplacer par quelque volontaire, ou s’ils joignent eux