nous engagea de nous embarquer dans son canot; ce qui nous
«évitait le désagrément d’aller à pied ou de monter , comme îa
veille, sur des ânes qui n’avaient ni brides ni licous, et sur lesquels
on avait mis, pour selles, des bâts fort incommodes, garnis de
quatre pièces de bois longitudinales, tels que nous les avons vus
dans presque toutes les îles de l’A rchipel.
Lorsque nous eûmes doublé le cap le plus voisin de Milo, vers
les huit heures du matin, le vent de nord qui nous était contraire,
et la mer un peu trop agitée pour un simple canot, nous obligèrent
de débarquer près de ce c ap , dans un endroit où nous trouvâmes,
à quelques toises au dessus du niveau de la m e r , une couche dô
terre contenant des coquilles fossiles, à moitié décomposées, du
genre de la Perne, semblables à celles du Piémont, figurées par
Langius, dont l’analogue n’est pas connu des naturalistes. Ces
coquilles sont très - épaisses : on trouve souvent les deux valves
ensemble, mais presque toujours cassées et en mauvais état.
Comme il était déjà tard, nous doublâmes le pas, afin de disposer
le plus tôt possible nos ouvriers, selon les fouilles que nous voulions
entreprendre. Nous fîmes déblayer aUx uns une catacombe que
nous soupçonnâmes sé trouver à peu de distance de celle que nous
avions vue la veille. Les autres creusèrent sur le tertre même où.
nous avions trouvé déjà quelques figures.
La catacombe entièrement déblayée, nous ne vîmes, au fon d ,
qu’un sarcophage taillé dans le banc de lave, et un vase de poterie
grossière, à col étroit, qui fut brisé par la mal-adresse de l’ouvrier.
Ceux qui travaillaient sur le te rtre, fouillèrent dans plusieurs
fosses, à la profondeur de trois pieds, sans trouver autre chose
que des Cendres , des charbons, quelques restes d’ossemens et
des fragmens de Vases de terre de toute forme et de toute grandeur.
Nous regrettâmes beaucoup, entr’autres, un grand vase
brun ', dans le genre étrusque , sur lequel étaient plusieurs figures
d ’hommes peintes en rouge. Nous fîmes encore quelques tentatives
«tus %rïVifùnS sans rien découvrir d ’intéressant.
Nous apprîmes les jours suivans, que tout ce terrain avait été
fbwitté plusieurs fois, tantôt par les habitans de l’île , qui croyaient
y trouver des trésors enfouis par leurs‘ancêtres ; tantôt par quelque
voyageur que la curiosité avait, comme nous, amené dans l’île.
Le citoyen F au ve l, que nous avons vu quelques années après à
Athènes, nous dit avoir fait aussi, par ordre de M, de Choiseul,
ambassadeur, diverses fouilles à Cimolis, qui lui avaient procuré
quelques pièces de monnaie et quelques omemens à l ’usage des
femmes. « _
Indépendamment de la tradition, des sépultures et des fragmens
de briques et de poterie, qui indiquent, d’une manière incontestable,
le site de l’ancienne ville, il y a sur la côte, à cet endroit,
des travaux assez considérables, des coupures, des canaux dans
le banc de lave, pour donner probablement passage à des bateaux,
et des grottes pour les mettre à l ’abri de la pluie et dix soleil. A
deux ou trois cents toises de la mer, on voit dés cavernes creusées
à main d’homme dans une couche de pierre-ponce, qui ont été
probablement des lieux d’habitation ou de sépulture à des époques
que l ’histoire a passées sous silence. Nous aurons souvent occasion
de parler de semblables cavernes dans le cours de nos voyages , et
de présenter nos conjectures à cet égard.
. Les habitans de cette île sont si misérables , qu’ils ont bien
souvent de la peine à payer i 5 ou 1600 piastres d’impôt que le
eapitan-pacha prélève annuellement sur eux. Le coton est presque
le sexd objet qui leur procure quelque argent. Les femmes sont
occupée spendant toute l ’année, lorsque les travaux de la campagne
le permettent, à le filer aù rou e t, quelquefois à la quenouille,
et à tricotter des bas pour les Européens. Les marins
trouvent dans tontes les saisons, des porcs, des volailles et des
oeufs à acheter pour la .provision de'leurs navires ; ils trouvent
quelquefois aussi des plaisirs qui les retiennent tro p , lo n g - tems
dans la rade, et leur font oublier leur devoir ainsi que les intérêts
de leurs armateurs.
L ’habit des femmes \p l- 11 ) est aussi remarquable dans cette
île , qué dans presque toutes les Cÿclades : la jupe n’atteint pas le
genou ; .la chemise descend à peine jusqu’à mi - jambe , et laisse
voir une large culotte fixée d’une port à la ceinture, et de l ’autre