d’un bouleversement général, et qui épuisait mal à propos les
finances de l’État. Elle convoqua, en nivôse an 6 , les principaux
officiers des janissaires de Constantinople, pour les sonder sur
l ’intention qu’elle avait de faire marcher leur corps (1) contre
Pasvan. Ceux-ci ne parurent pas disposés à seconder les vues du
sultan ; ils représentèrént que les soldats disaient hautement qu’ils
ne feraient jamais la guerre à un Musulman qui n’avait, selon
e u x , d’autres torts que celui de vouloir empêcher que l’on ne
portât atteinte à leurs droits, et que l’on n'introduisît dans l’Empire
des vrais croyans , les usages des infidèles, ennemis de leur
dieu et de leur prophète. •
On crut un moment que le janissaire-aga paierait de sa tête la
mauvaise volonté des soldats ; mais Selim se contenta de l ’éloigner
pour quelques jours' de la capitale, et de l’envoyer à Gallipoli. Il
vint reprendre ses fonctions lorsqu’on fut assuré que son éloignement
ne pouvait, en aucune manière, changer les dispositions
pacifiques des janissaires et de leurs officiers.
On expédia en même tems un ordre aux pachas et gouverneurs
des provinces de l’Empïre, pour qu’ils eussent à fournir divers
corps de troupes, et les fissent marcher au premier avis qu’ils
recevraient. Le grand-visir, à qui le commandement de l’armée
était dévolu, étant vieux et infirme, Selim nomma à sa place le
capitan-pacha, comme si le zèle et la bonne volonté de son grand-
amiral pouvaient, dans ce cas, suppléer aux connaissances et à,
l’expérience qui lui manquaient. Hussein n’avait jamais fait la
gu erre, ni sur mer ni sur terre 5 comment pouvait-il lutter avec
avantage contre un homme qui s’était joué de la bravoure et des
talens militaires des vieux généraux qu’il avait eus à combattre ?
On dit que ce furent les ennemis mêmes du capitan-pacha qui le
firent nommer séraskier de l’armée, tant pour l’éloigner de la
capitale, que pour lui susciter une affaire de la plus haute importance,
dans laquelle ils espéraient qu’il échouerait.
Hussein ne pouvait refuser le commandement de l ’armée sans
(1) On compte plus de cinquante mille janissaires à Constantinople,
déplaire
déplaire au sultan, sans être taxé de lâcheté, sans donner prise
à la malignité du public. Il espérait d’ailleurs, s’il obtenait des
forces imposantes, détruire facilement un rebelle contre léquel on
n’avait pris jusqu’alors que des demi-mesures, contre lequel on
n’avaifcemploÿé que des forces trop peu considérables. Aussi adroit
que ses ennemis étaient perfides, il se présenta à Selim, se pros-,
terna à ses pieds, et lui dit : ce Seigneur, ma vie est â vous;.si
» vous me croyez capable de conduire vos armées de terre comme
» j’ai conduit jusqu’à présent vos armées de mer, ordonnez, je
» suis prêt à vous obéir; je marcherai contre le rebelle, je vous
» apporterai sa tête ou j’y perdrai la mienne; mais le parti de
»Pasvan est nombreux et puissant, ses créatures, ses amis sont
» rép.àjidus partout; ils entraveront mes opérations si je ne suis
» investi d’une grande autorité ; ils feront échouer, mes entreprises
» si je' n’ai des forfces considérables; et tout l ’argent nécessaire
» pour assurer, la subsistance de l ’armée, et pdur détacher, s’il le
» fa u t, du parti rebelle les généraux, aux talens et au Courage
»desquels Pasvan doit les succès qu’il a obtenus contre vos
» armes. » . ;
Selim accorda toutes les demandes du pacha, et l’investit ; d’u n
grand pouvoir ; il donna ordre que tous les corps de troupes , tant
d’Europe que d’A s ie , que l’on pourrait lever > se trouvassent sous
leurs drapeaux au premier printems, et rien ne fut épargné pour,
la réussite de cette grande entreprise.
. On s ’occupa dès-lors, avec la;plus grande activité; à ,la construction
et à l’armement de quinze chaloupes canonières, portant
Un canon de 24 ou de 18 en avant, et un ou deux petits canons,
de chaque côté ; elles étaient destinées à remonter le Danube pour-
seconder par eau l’attaque que l ’on méditait par terre contre
Vidine. On équipa diverses barques pour le transport des canons
et des munitions nécessaires au siège, ainsi que des provisions de,
touche pour le soldat.
Andrinople fut le rendez*-vous général des, troupes de la partie
méridionale de la Turquie européène et. .de Celles d’A sie. Une
partie 4e celles-ci défila par Constantinople;; une autre passa .par,
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