règne de Jean Paléologue, et fut prise par Soliman, fils d’Orcan.
Elle contient dans ses murs environ quinze ou seize mille habitans
grecs, musulmans et juifs. Elle est située sur un banc de rochers
que les eaux ont minés. Elle s ’avance, et forme une espèce de cap,
à l ’extrémité duquel est placé un fanal pour guider les marins, et
leur indiquer la route qu’ils doivent prendre lorsqu’ils entrent de
nuit dans le canal. On en voit un autre pour le même objet, presque
vis-à-vis, sur la côte d’Asie. Le canal se rétrécit tout’-à-coup
devant Gallipoli, au point qu’il n’a pas une lieue de largeur. La
mer forme une anse au sud de la ville, qui sert de port aux bateaux
qui viennent y mouiller, ainsi qu’aux navires contrariés
par le vent.
L a montagne dont j’ai parlé plus haut, a baissé insensiblement,
et fait place à des collines privées de culture et de tout ornement.
Celle d’Asie au contraire s’est rapprochée, et présente un paysage
naturel de la plus grande beauté. •
Lampsaque, devant laquelle nous nous trouvons presqu’aussitôt,
possède un territoire charmant, extrêmement fertile et arrosé.
Cette v ille , jadis bien plus considérable que Gallipoli , était renommée
par. ses jardins, par ses vignobles et la bonté de ses
vins, par ses temples, et surtout par le culte que les habitans rendaient
au dieu Priape. Ce n’est plus aujourd’hui qu’un mauvais
village habité par quelques Grecs et quelques Turcs : elle conserve
encore quelques vignes sur les coteaux voisins j mais ses
beaux jardins ont disparu : sur les débris de ,ses. temples , on a
élevé une mosquée, et le culte rendu au Dieu conservateur de
l ’Univers est remplacé par des offrandes à la Panayia.
Jusqù à la pointe de Nagara, sur laquelle on remarque encore
les décombres d’Abydos, l’Hellespont n’offre rien de remarquable
que les collines fertiles et verdoyantes qui le bordent, et quelques
vallons plus ou moins cultivés. Quoiqu’il y ait encore plus de
quinze milles de distance de Lampsaque à Abydos, notre marche
était si rapide, que nous eûmes bientôt franchi cet espace, et que
nous pûmes jeter l’ancre, vers une heure après midi, à l’excellent
mouillage qui se trouve au sud de ce cap. Nous nous empressâmes
de débarquer nos effets, et d’aller à la ville, distante à peu
près de deux milles. Le citoyen Bermond, vice-consul de la
République , nous attendait depuis quelques jours ; il avait eu
l’honnêteté de nous faire préparer un logement dans la maison
consulaire : il a eu la bonté de nous accompagner dans toutes nos
courses, et- n’a rien négligé pour nous rendre le séjour que nous
avons fait aux Dardanelles, aussi agréable qu’utile.