Le trésor particulier du sultan est administré par le khasnadar-
aga, un des pages de confiance. Ce trésor, grossi par les épargnes
de la plupart des sultans, est alimenté par les bénéfices de la monnaie
et par quelques confiscations.
L a place de tcliélébi - éi'endi n’existait pas autrefois ; elle a été
Gréée sous le règne de Selim III, en même tems que l’impôt sur le
v in , les comestibles et la plupart des marchandises, telles que le
coton , la laine, etc. Le produit de cet impôt, connu sous le nom
de n îzam -d jed it, a été affecté aux nouveaux corps de troupes de
canoniers, de bombardiers, d’artilleurs, de fusiliers que l ’on a
formés, aux bâtimens que l’on a construits pour e u x , à la fonderie
de canons, à la fabrication de fusils, aux affûts,, etc. Le tchélébi-
éfendi est le receveur-général de cet impôt, l’administrateur de ces,
fonds, l’inspecteur-général de ces établissemens, l’intendant des
bâtimens.
J ’ai dit ailleurs que le tersana - émini était le ministre de la
marine.
Le tchiaoux - bachi est secrétaire - d ’état ; c’est à lui qu’il faut
s’adresser pour voir le grand-visir , pour être admis à son divan,
pour plaider à son tribunal. Il a près de lui deux teskeredjis qui
reçoivent les mémoires, les demandes, les requêtes des plaideurs et
de tous ceux qui se présentent, et qui y font droit suivant l ’ordre
du visir.
Le capitan-pacha et le kiaya de la sultane Validé sont appelés
aux conseils extraordinaires ; et quoiqu’ils ne soient pas membres
ordinaires du conseil, ils sont consultés, et ont l’un et l’autre la
plus grande influence dans les délibérations par le crédit que le premier
conserve auprès de Selim, par celui que le second a obtenu
auprès de la sultane-mère. Celui-ci est né pauvre en Candie. On le
dit homme d’esprit et très-adroit : il possède surtout l’art de l ’intrigue
, et joint à des manières aisées, une figure aimable et prévenante.
Selim, occupé d’établissemens utiles, d’améliorations et de chan-
gemens nécessités par les circonstances critiques dans lesquelles -il
se trouvait à son avènement au trône, ne pouvait douter du succès
de ses entreprises en faisant émaner d’un conseil formé par les
hommes les plus puissans et les plus éclairés de l’Empire, toutes
les innovations qu’il voulait introduire, toutes les lois bienfaisantes
qu’il voulait faire adopter. Pouvait-il soupçonner qu’en rendant
les actes arbitraires moins fréquens , les grandes exécutions plus
rares, en diminuant le pouvoir trop absolu, trop tyrannique du
visir, en soumettant à la discussion toutes les opérations du gouvernement,
-en n’émettant aucune loi qu’elle n’eût pour ainsi dire
reçu la sanction de son conseil, le crime deviendrait plus fréquent,
l’ambition plus audacieuse, la rébellion plus difficile à réprimer,
les armées de brigands plus nombreuses ? Pouvait-il croire, en un
mot, que l’influence des puissances étrangères serait plus grande,
et qu’elle viendrait à bout d’arrêter toutes les mesures salutaires qu’il
voulait faire adopter.
Ce conse il, malheureusement composé de membres ennemis
entr’eu x , jaloux les uns des autres, plus occupés d’eux-mêmes.que
du bonheur de l’É tat , est bien loin d’avoir rempli les intentions.de
Selim. On serait porté A croire, en le voyant tantôt dans l’inaction
au milieu des dangers, et tantôt dans une route opposée à celle
qu’il devrait suivre , que la plupart des membres, loin de seconder
les desseins du sultan, travaillent au contraire à les faire échouer.
Depuis sa création, la situation des .affaires devient pire chaque
jour ; l’Empire est menacé d’une dissolution totale ;■ les finances
sont épuisées ; un rebelle menace déjà de placer un étranger sur le
trône. :I1 n’attend peut-être que le moment où le peuple sera préparé
à cet événement extraordinaire et sans exemple dans les
annales turques.
Si-, au lieu d’établir un conseil trop vacillant, trop inepte ou
trop facile à corrompre, Selim avait pu confier l’autorité à un visir
doué d’une intelligence.rare, d’un esprit profond, d’un coeur pur ,
d’un courage ferme, d’une volonté inébranlable , il n’est pas douteux
que tous ses projets n’eussent complètement réussi : l’Empire
othoman eût repris peu à peu spn rang parmi les puissances de la
terre 5 il serait sorti du moins de cet état d’abjection et de nullité
dans lequel il se trouve depuis plusieurs règnes : les troubles de