autorise ceux-ci à avoir tel nombre d’esclaves qu’ils desirent, et
elle ne les soumet à aucune sorte de formalité. Les enfans qu’ils
obtiennent sont libres, et participent, comme les autres, au partage
de leurs biens après leur mort.
La loi ne defend point aux Musulmans d’épouser une femme
de religion différente, pourvu que les conjoints s’obligent à élever
leurs enfans dans la religion du père; mais elle l’interdit expressément
aux femmes, à moins que l’homme n’embrasse auparavant
la religion de Mahomet. Elle punit de mort un Juif ou un Chrétien
surpris avec une Musulmane, dans un lieu ou de telle manière à
faire soupçonner un commerce charnel. Il ne peut se sauver qu’en
embrassant la religion musulmane et en épousant cette femme si
toutefois elle y consent, et s’ils sont l ’un et l’autre hors les liens du
mariage. Dans le cas contraire, l ’homme est traduit au supplice;
la femme n échappé à une punition moins forte qu’en déclarant
qu elle a été forcée ou surprise, ou en niant qu’il se soit passé
entr’eux quelqu’indécence.
Si la femme est- mariee, le sort de celle-ci dépend du mari : il
peut porter sa vengeance jusqu’à la punir de mort ; mais souvent
la crainte des parens retient son bras prêt à frapper : il se contente
alors de la répudier.
Il n entre point dans notre plan d’examiner quels furent les
motifs qui determioereot Mahomet à permettre quatre épouses aux
sectateurs de. sa religion, indépendamment de tel nombre de concubines
qu’ils pourraient nourrir. A -t-il voulu plaire à un sexe aux
dépens de l’autre P A-t-il cru par-là obtenir une plus grande population
? Enfin a-t-il voulu sanctionner un usage qui existe dans
l’A rabie depuis un tems immémorial 1
L a polygamie offre des inconvéniens sans nombre et si frap-
pans, que 1 on doit être étonné que des législateurs l’aient permise
ou tolérée. Le premier de ces inconvémens, et le plus grand sans
doute, c’est qu’elle nuit à la population d’un État; c’est qu’elle
favorise la pederastie ; c ’est que plusieurs femmes ne peuvent partager
tranquillement entr’elles les. plaisirs trop peu fréqueus que le
mari leur distribue : les méfiances, les jalousies, les haines, les
Querelles, doivent nécessairement établir leur empire dans un
harem et en bannir les vrais plaisirs.
D semble au premier coup-d’oeil, que la polygamie soit favorable
h la population; car quoique les facultés physiques de l ’homme
soient bornées, il peut néanmoins, dans un espace de tems assez
c o u r t, féconder plusieurs femmes, et obtenir un grand nombre
d ’enfans pendant le cours de sa vie.
Mais comme le nombre des femmes est à peu près égal à celui
des hommes, ce ne peut être qu’aux dépens des pauvres que les
riches en prennent plusieurs : un homme ne peut avoir quatre
femmes, que trois autres n ’en soient privés ; et certes, on ne présumera
pas que quatre femmes, enfermées dans un harem avec un
seul homme, quelquefois vieux ou infirme, puissent avoir le même
nombre d’enfans que lorsque ces femmes ont chacune un mari,
dont elles obtiennent seules les faveurs.
Les harems, il est v ra i, ne sont presque remplis que d’étrangères
, d’esclaves géorgiènes, circassiènes et éthiopiènes que le commerce
amène annuellement; mais il amène aussi un plus grand
nombre d’esclaves mâles ; ce qui doit faire supposer qu’en général
le nombre des hommes en Turquie, est pour le moins aussi grand
que celui des femmes. Mais ce qui prouve que la polygamie nuit
à la population de cet Empire, c ’est que, malgré ce grand nombre
d ’esclaves des deux sexes qui viennent des contrées européènes,
de l’Asie et de l ’A fr iq u e , cet Empire se dépeuple considérablement
, quoiqu’il n’y ait pas d’exemples d’émigration de la part des
Musulmans ; quoique les guerres, depuis long-tems, y soient peu
fréquentes et peu meurtrières. La population des Grecs, des Arméniens
et des Juifs, au contraire, se soutient nonobstant leur émigration
et la tyrannie des Turcs à leur égard : mais ceux-ci, comme
on sait, n’épousent qu’une femme, et il leur est très-expressément
défendu d’avoir des esclaves ou des concubines; ce qui fait qu’ils
se marient de bonne heure, et que peu d’entr’euK restent célibataires.
L ’impuissance dans laquelle se trouve l ’homme de satisfaire aux
désirs d’un grand nombre de femmes, a fait inventer les verrous,
M n