y faire le cabotage, puissent apprendre les langues'dont ils auront
besoin , s’ils ne veulent être trompés , s’ils desirent traiter les
affaires eux-mêmes et agir à leur gré èt sans obstacles.
Il convient d’établir une seconde école à Paris, plus particulièrement
destinée au drogmanat, dans laquelle on ne recevrait que des
jeunes gens nés ou élevés en France. On y apprendrait non-seulement
le grec, le turc, l ’arabe et le persan vulgaires, mais la langue qui
est consignée dans les livres grecs et arabes, le turc et le persan
que l’on parle à la cour, et dont on se sert dans les actes émanés
du gouvernement.
Quelques années de séjour en Turquie, un ou deux ans d’apprentissage
auprès des commissaires et agens, suffiraient pour que
l’élève drogman saisît la prononciation et connût toutes les tournures
des langues dont il aurait le plus de besoin, suivant qu’il se
destinerait à servir la capitale ou les Échelles, la Grèce oulaSyrie.
D ’ailleurs, il n’y aurait pas de mal qu’il conservât une prononciation
étrangère : le Musulman a presque toujours pour l’Europeen les
égards dont il se croit dispensé envers celui q u i, né en Tu rqu ie,
ne lui paraît qu’un esclave travesti.
Il résulterait une infinité d’avantages si le drogmanat était, dans
le Levant, la pépinière des, agens et des commissaires des relations
commerciales :: on verrait nécessairement en eux,plus de zèle , plus
d’instruction, plus de dévouement et plus de probité (i). Les affaires
dans les Échelles seraient bien mieux traitées et bien plus promptement
terminées si le commissaire savait la langue du p a y s, s’il avait
appris par une longue expérience, à connaître les Musulmans et
tous les sujets du grand-seigneur,
Mais avant to u t, il faudrait obtenir de la Porte que le drogman
français se présentât en habit européen, sous un uniforme particulier,
et qu’il ne fût point soumis aux usages et au cérémonial
.(1) Le citoyen Jì ufi'in . autrefois drogman , chargé aujourd’hui des affaires de la,
"République près la Porte, noGs fournirait, s’il était nécessaire, une preuve incontestable
qu’on ne pourrait mettre quelquefois les intérêts de la nation en de meilleures
mains.
turcs ; car si le drogman continuait à s’humilier devant un pacha,
un mutselim , un simple écrivain de la Porte ; s’il avait toujours à
craindre le bâton, s’il était obligé de leur offrir humblement sa
tête, de baiser le bas de leur robe, comment pourrait-il conserver
cette indépendance d’opinion, cette inflexibilité de caractère, cette
élévation d’ame si nécessaires à un commissaire dans le Levant?
Les affaires courantes et de peu d’importance continueraient à
se traiter par les drogmans du pays , créatures viles aujourd’h u i,
dont toute l’occupation est d’éviter le bâton des Turcs et d’attraper
de l ’argent de ceux qui les emploient, mais dont on pourrait facilement
tirer parti aU moyen des barats sagement accordés.
Je ne veux pas avoir recours à ces Grecs, à ces Arméniens, à
ces Juifs opulens qui n’achètent un barat que pour avoir le'droit
de porter la chaussure des Musulmans, de ne payer que trois pour
cent de douane, et qui mettent par-là leur vie et leur fortune sous
la sauve-garde d’une puissance européène. Jé regarde comme très-
indécent et très - impolitique qu’un ambassadeur puisse vendre à
très-haut prix sa protection à des hommes pareils, qui très-souvent
compromettent son crédit, qui lui prennent toujours une partie de
son tems, et qui portent aux négocians européens un préjudice
notable.
• Lés barats doivent être donnés^ gratuitement à ceux qui se dévoueront
au service des Échelles, qui se chargeront de toutes les
fonctions pénibles et désagréables, et qui, pauvres et sans crédit,
seront presque toujours les agens des négocians. Ces hommes, à
qui le commissaire des relations commerciales pourra faire retirer
le barat parce qu’ils ne l’auront point acheté, seront obligés de se
conduire honnêtement s’ils veulent le conserver et jouir des privilèges
qui y sont attachés.
Une longue expérience avait appris autrefois au gouvernement,
combien il était sage de défendre aux négocians et aux agens qu’il
employait dans le Levant , le mariage avec les femmes du,pays.
Cette loi , que la faveur et la protection, faisaient taire quelquefois,
doit être remise en vigueur et rigoureusement exécutée : l ’intérêt
d u négociant et l’avantage de l ’État la réclament également. Elle est