encore les restes du temple de Bacchus (1) : mais en hiver'ils n’ose-,
raient s’y exposer; ils craindraient, avec raison, d’être jetés sur la
côte par un vent un peu fort de nord-ouest.
L a ville est sur une eminence an bord de la mer : elle était défendue
, sous les princes' vénitiens, par une citadelle et par des
murs que lés Turcs ont détruits en'grande partie. Les Latins,
autrefois maîtres du pays , sont tous logés dans leur enceinte. Les
Grecs occupent la partie qui s’étend à l’est du château, connue sous
le nom de N o u v elle-V ille, Neio-Kopio.'
L ancienne s etendait au nord, vers la fontaine qui porte le nom
d Ariadne. Il y a encore au dessous du château , quelques restes
d un aqueduc souterrain qui amenait probablement à la ville les
eaux d ùue source abondante que l’on voit à quatre ou cinq milles
à l!e s t, et qui sert aujourd’hui à arroser une partie de la plaine
de Naxie.
L a fontaine d’Ariadne n’est qu’un simple filet d’eau, auquel les
voyageurs ne feraient pas attention s’il ne leur rappelait que c’est
là qu Ariadne se livra à tout le désespoir d’une amante délaissée ;
c est de ce rivage qu’elle aperçut le navire qui portait loin d’élle son
amant ; c est au bôrd de cette fontaine où elle venait chaque jour
verser des pleurs, que Bacchus., aussi touché de ses malheurs que
frappé de sa beaute, parvint à la consoler et à lui faire oublier
un ingrat.
Bacchus eut un temple à Naxos : on en voit encore la porte et les
fondemens (2) sur une petite île voisine de la fontaine d’Ariadne.
Un pont bâti sur une file de rochers unissait, dit-on, cette île à'
la grande, et permettait à un aqueduc d’y apporter l’eau nécessaire
aux prêtres qui habitaient l’enceinte du temple.
En creusant dernièrement les fondemens d’une maison et d’un
magasin vers le rivage de la mer, au nord du château, on a trouvé
(1) Voyez la figure que M. de Choiseul en a donnée. Voy. pitt. de la Grèce,
pl. 23.
(2) Toumefort. Voyage, tom. 1, p. 219.
Choiseul, Voy. pitt. de la Grèce, pl. 22.
une statue de-femme , d’une, assez belle forme. Là tête et les pieds
manquaient, -le corps avait'souffert en quelques endroits, mais la
gorge et une partie de la draperie étaient en assez bon état. Nous
' la vîmes dans la cour parmi dés' ordures'. Le maître de la maison
n’en faisait pas grand cas : il avait plusieurs fois été sur le point
de la briser pour en employer les morceaux dans la construction
de sa maison,
- Au nord 'de l’î le , on trouve une statue colossale d’A p ollon,
encore informe, que le sculpteur paraît avoir abandonnée anciennement
: elle est voisine de la carrière d’où le bloc avait été tiré.
Naxos a éprouvé, comme les autres îles de l’Archipel, toutes les
vicissitudes de la fortune. Trop-faible pour être long-tems indépendante,
elle a été successivement alliée des Athéniens, conquise
et ravagée par les Perses, tributaire des Romains, cédée à Rhodes
par Marc-Antoine , soumise'ensuite aux empereurs d’Orient, long-
tems gouvernée par des princës vénitiens,.et réunie enfin à l’Empire
othoman sous le règne de Selim II.
Les Naxiotes ont conservé lé précieux avantage d’être régis par
leurs lois et leurs: coutumes : ils ont une administration municipale
et des juges de leurs choix. Le peu d’importance de leur île et son
éloignement de la côte d’Asie n’oiit pas permis aux Turcs de s’y ;
établir. La Porte se contente d’y envoyer un vaivode pour y exercer
la police, percevoir les impôts et les faire passer à Cônstan-
tinople.
Naxos, plus libre et plus indépendante que Scio,’ est cependant
bien loin d’avoir atteint le degré de prospérité auquel celle-ci est
parvenue. Le commerce n ’y est point assez ' actif ; la culture des
terres y est trop négligée, et l’industrie des habitans y est presque
nullei Faut-il en àttribuer la cause âu mépris que les nobles, possesseurs
des meilleurs terrains, montrent pour le travail, mépris qui
a malheureusement gagné presque toutes les classes de citoyens ?
Fiers de-leur antique-noblesse, pauvres et orgueilleux, dédaignant
également le commerce et l’agriculture , étrangers à l’art
militaire,: ces seigneurs-; issus des premières: familles italiennes,
voient passer insensiblement-; en des mains roturières , leurs châteaux