répandus avec profusion et entassés sans ordre. Le figuier, le
grenadier et le prunier y sont un peu moins abondans. On ,y
remarque aussi le pêcher, l'abricotier, l’amandier et le mûrier
noir. Le rosier est cultivé partout dans les bonnes terres,; comme
dans celles de médiocre qualité. L ’aubergine, la kepnie, le melon,
le concombre ,, la pastèque, occupent les espaces qui ne sont point
plaptés,. . . .
Ces jardins sont arrosés par quelques "sources qui descendent
des,montagnes voisines, ou par des puits dont l’eau est'eleyee au
moyen d’une roue et de deux cordes , auxquelles sont adaptés
des pots de terre placés à la suite les uns des autres.
Au-delà de cette plaine, et dans toute la partie méridionale de
l'île , les terres sont presque partout susceptibles de culture, quoiqu’elles
soient. en • général de médiocre qualité. Le sol est moins
élevé, moins inégal que dans la partie nord, et la population y
est plus considérable.
D ’après les registres du gouvernement, la population de Scio
doit être évaluée à cent dix mille habitans. On en compte trente
mille à la capitale; savoir : trois, mille cinq cents Tur'çs , mille
cinq cents Grecs catholiques romains, et vingt-cinq mille Grecs
sehismatiques : on peut ajouter à ce calcul environ cent Juifs. Il
y a soixante-huit villages dans l ’î l e , tous- habités par des Grecs.
Les villages qui fournissent le mastic, au nombre de vingt- quatre,
sont les pins peuplés et les plus riches; P irg h i, situé à l’ouest, .est
le plus grand de tons. N in ita,. Calamoti et Calimatia, vers le sud ,
sont après lui les plus considérables de l’île. .Kolisso , placé sur
le rivage de la mer, vis-à-vis P sdra, se fait remarquer par l’air
grossier, presque sauvage de ses habitans. Tous les villages au
reste, quelles que soient leur étendue et leur situation, sont assez
bien bâtis,, et ont presque tous une enceinte capable de les garantir
d’un coup de main, de la part, d’un corsaire.
Le législateur qui voudra observer l ’influence ¡des institutions
et des lois sur les moeurs, le caractère et l ’industrie de l’hpipme,
doit principalement tourner ses regards vers un peuple qui, vivapt
sous le même cjel, sur le même so l, professant la même religion,
diffère cependant de lui-même, au point qu’il paraît méconnaissable.
Après avoir franchi un petit bras de mer, je pie suis cru
transporté dans une autre région, sûus Un autre climat; j’avais
vu le Grée courbé sons le joug du plus affreux despotisme : il était
fourbe, grossier, timide, ignorant, superstitieux et pauvre (1) :
il jouit ici"d’une ombre de liberté; il est probe, civil, hardi, industrieux,
spirituel , instruit et riche. Je ne retrouve plus ici ce
mélange de fierté et de bassesse qui caractérise les Grecs de Cons-
tantinople et d’une grande partie du Levant; cette timidité, cette
poltronnerie qu’occasione une crainte perpétuelle, cette bigoterie
qui n’empêche aucun crime. Ce qui distingue les habitans de Scio
des autres Grecs, c’est un penchant décidé vers le commerce; un
goût v if pour les arts, un désir d’entreprendre ; c’est un esprit
enjoué, plaisant, épigrammatique; c’est quelquefois une sorte de
gàieté folle et burlesque y qui a donné lieu au proverbe suivant :
I l est aussi rare de trouver un cheval v e rt, qui un Scio te sage.
Quelque vrai que soit le sens outré de ce proverbe , à l’égard
de quelques habitans de Scio, il en est un plus grand nombre qui
savent allier la prudence la plus circonspecte à l’enjouement le
plus v if et le plus aimable. Nulle autre ville dans le Levant ne
présente une si grande masse d’instruction; nulle autre ne renferme
autant d'hommes exempts de préjugés, pleins de bon sens et de
raison, doués d’une tête mieux organisée.
On peut néanmoins reprocher à quelques - uns d’entr’eux un
orgueil ridicule, un fanatisme déplacé. Nous avons vu des sots
tirer vanité d’un riche porte-feuille , d’une belle maison, d’un
nombreux domestique. L ’ignorant, qui n’avait point de titres
personnels à faire valoir dans la société, croyait être quitte envers
elle en rappelant ceux de ses ancêtres. La lutte qui existe entre les
deux églises, a souvent donné lieu à des scènes scandaleuses, dont
les Turcs seuls ont profité ; et l ’influence des prêtres est peut - être
trop grande dans un pays qui veut, être commerçant et agricole.1
Malgré leur grotesque vêtement {p l. 10 ), les femmes sont plus
(1) Il y a quelques (acceptions à faire à la capitale.