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 d’Europe  et  d’Asie  ,  cependant  les  derniers  sultans  ont  préféré  
 leurs  palais  du  canal,  parce  qu’en  été  le  courant  d’air  qui  vient  
 régulièrement  chaque jour de la Mer-Noire,  procure mie fraîcheur  
 dont  on  jouit bien  moins  à  K a vac-séra i  :  d’ailleurs  ,  un  lieu  si  
 voisin  des  cimetières  de Scutari  était bien plus  propre  aux méditations  
 qu’aux  délassemens  et  aux  plaisirs. 
 Nous  vînmes ,   en nous promenant,  sur  le  sol  qu’occupait autrefois  
 Calcédoine,  où nous ne  trouvâmes  rien  de  bien  intéressant,  
 si ce n’est quelques restes de murs et un petit temple sous te rre,  qui  
 paraît  avoir  été  construit  dans  lé  tems  que  les  Chrétiens  étaient  
 persécutés.  Nous  passâmes  le reste de la journée auprès d’une fontaine, 
  pour jouir  de la  fraîcheur  sous  l’ombrage  épais de plusieurs  
 platanes. Notre caïque nous  attendait là depuis long-tems ;  un Grec  
 intelligent avait préparé un ample pilau et quelques  friandises  pour,  
 nos janissaires et nos bateliers ;  et pour nous, un dîner qui fut assaisonné  
 par un  bon appétit, et égayé par nos  réflexions et par  le  site  
 charmant sur lequel nous nous trouvions. 
 Si les habitans de Mégare, en fondant sous le nom de Procerastis  
 une  ville  à l’entrée méridionale  du  Bosphore ,  eurent  l ’intention  
 d ’en faire un établissement de commerce, on a eu raison de lui donner  
 par dérision le nom  de Calcédoine  ou  V ille  des aveugles, puisqu’il  
 existait  à deux  pas  de là une  position  qui offrait les avantages  
 d ’un  port  immense  et  très-sûr; mais,  comme  ville agricole,  Calcédoine  
 jouissait  d’un  territoire  étendu  et fertile ,  et  d’une  position  
 infiniment agréable  :  placée sur  un  promontoire  en face  de la Propontide  
 ,  abritée  des  vents  du nord,  à peu de  distance  des  îles  des  
 Princes,  il n’est  pas  surprenant  que  cette  ville  soit devenue  puissante  
 ,  et  qu’elle  ait-rivalisé  avec  Bysance,  fondée  quelque  tems  
 après.  Calcédoine  d’ailleurs avait deux petits  ports,  dont  on  reconnaît  
 encore les jetées,  qui  devaient suffire  à  son  commerce  et à ses  
 besoins. 
 •  Contens  de  notre  journée,  nous  entrâmes  dans  le  caïque  avant  
 le  coucher du  soleil,  pour nous rendre à la ville.  Toute cette éôte, 
 élevée 
 élevée de quelques  toises au  dessus  du niveau  des  eaux,  était  couverte  
 alors  de plusieurs  plantes  et  de  divers  genêts  fleuris  qui faisaient  
 le  plus  bel  effet,  et ornaient  singulièrement  le  tableau  que  
 nous  présentaient  les  cyprès  de  Scutari  et  les  premières  collines  
 d’Asie.  Ici  la  mer  n’est  jamais  assez  agitée  pour  ronger  la  côte  
 dans  une  grande  étendue,  et  former  une  grève  un  peu  considérable. 
   Lorsque  le terrain le permet,  les  végétaux croissent et  fructifient  
 à  peu de  distance des eaux,  sans  en  être  incommodés. 
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