de Nicomédie, et à midi nous avions doublé le cap Bouz-Bournou.
Cette côte est belle, variée, un peu montagneuse; le terrain paraît
fertile, boisé : nous aperçûmes des champs ensemencés, quelques
troupeaux de moutons et plusieurs villages peu considérables.
Après avoir doublé le cap , le vent jusqu’alors favorable, dut nous
être contraire ; 'il nous obligea de louvoyer une partie de la nuit.
Nous eûmes de la peine à venir mouiller à demi-lieue du village de
Ghemlek y à deux encablures de la côte sud.
Le mouillage, au fond du golfe, est excellent : les ancres tiennent
bien partout ; mais en hiver, il est prudent de s’approcher du chantier
situé au sud, et de jeter l’ancre à un cable et demi ou deux
cables du rivage; car si l’on venait mouiller du côté du village, on
serait exposé à une plus grosse mer par un vent d’oueSt un peu fort,
et on pourrait courir le risque d’être jeté sur les rochers qui bordent
cette côte, si les câbles étaient trop vieux ou trop faibles (p l. 3 ).
Le villa g e , nommé K io s par les Grecs, et Ghemlek par les
T u rcs, est situé en amphithéâtre, au fond du golfe, vers la partie
nord : il est bâti sur les ruines de l’ancienne d u s , et paraît avoir
environ deux mille ames de population. Les habitans, la plupart
Grecs, sont occupés à la culture des terres : peu d’entr’eux sont
marins ; plusieurs sont employés malgré eu x, comme ouvriers, depuis
que les Turcs ont établi, à un quart de lieue de là , un chantier
pour la construction des vaisseaux de guerre.dl y avait, à notre
arrivée, un vaisseau de quatre - vingts pièces de canon presque
achevé., dont la construction avait été dirigée par un ouvrier
français.
- Ge qui détermine les Turcs à construire une partie de leurs vaisseaux
au fond de ce golfe, c ’est la facilité de retirer des bois de
construction des montagnes qui avoisinent l ’Olympe, de celles qui
se trouvent entre les golfes de Mundania et de Nicomédie, et de
celles situées au sud du lac Ascanius. On emploie deux espèces de
chênes et deux espèces de pins : les premiers servent à la quille,
aux membrures et au doublage ; les seconds servent également aux
membrures et à toutes les pièces de l’intérieur.
; Les deux espèces de chênes qui servent aux constructions navales,
sont le chêne à cupule chevelue {p l. 12), et celui à grappe. Le premier,
qui paraît être le quercus cerris de Linné, est plus commun
du côté de T o ca t, de Sinope et de Trébisonde. C ’est celui que l’on
apporte à l’arsenal de Constantinople des côtes méridionales de la
Mer-Noire, et qu’on emploie le plus ordinairement à la charpente
des maisons. On le trouve aussi dans une grande partie de l’Asie
mineure et de la Syrie. Il s’élève à une grande hauteur et fournit
un bois excellent. Ses feuilles sont profondément découpées, lisses,
d’un vert foncé en dessus, un peu blanchâtres ef pubescentçs en
dessous. La cupule a ses écailles en filets alongés, terminés en
pointe (1).
Le chêne à grappe ou chêne à fruits pédonculés est plus commun
que l’autre aux environs de Mundania et de Constantinople. Il
s’élève à une hauteur considérable, prend une belle tige et fournit
un bois très-dur. Cet arbre, dont le feuillage diffère peu du chêne
roure au premier aspect, se fait néanmoins remarquer par ses fruits
alongés, portés sur un pédicule mince, long de deux à trois
pouces (2).
On se sert communément du pin à pignons , p in u sp in ea , et d’une
espèce qui approche du laricio des Corses. Le premier est commun
vers les côtes maritimes de l’Asie mineure et de la Syrie : il croît
aussi dans toute la Grèce. Il acquiert une grosseur considérable,
et son bois, dur et résineux, est fréquemment employé dans les
constructions navales que l ’on fait à Mundania, aux Dardanelles,
à Mételin et à Rhodes.
(1) Quercus orientalis f latifolia 9 foliis ad costarti pulchrè incisis9 glande
maximay cupula crinita. Tournefort’j Coroll. pag. 4°> <*■* id . Voy. au Levant,
torn. 1 ; pag. 43o.
Quercus cerris. Linn. ?
Pockoke Trawels , tom. 2 , tab. 86. •
Chêne à cupule,. chevelue , quercus crinita. Lam. Encycl. Bot. tom. 1 ?
pag. 718, n°. 4.
(2) Quercus orientalis } glande cylindriformi > longo pediculo insidente. Tournef.
Coroll. pag 40.
Chêne à grappe , quercus racemosa. Lam. Encycl. Bot. tom. 1 ? pag. 715 , n°. 1»