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çendant dans la ra v in e , il avoit perdu son
bonnet qu’il avoit fait lui-même avec un bas
de laine. Les Japonois,en trouvant ce bonnet,
auroient v u tout de suite que c’étoit une
pièce de notre garde-robe, ce qui les eût aidés
à nous trouver. Nous appréhendions, en outre,
que les rayons du soleil ne fissent fondre, pendant
le jo u r , la neige qui étoit au sortir de
la caverne ; alors je crois qu’il n’y auroit eu
aucun moyen pour nous de sortir de cet
antre; car, le matin, nous avions eu bien de
la peine à nous y glisser.
Nous restâmes dans cette position jusqu’au
le ve r du soleil; nous parlions de notre sort et
de nos tentatives futures. La journée fut trèîk
b e lle , mais les rayons du soleil ne pénétrèrent
pas jusqu’à n o u s ;la cascade refroidis-
soit encore l ’a ir , au point que souvent les dents
nous claquoient. Durant tout le jo q r nous
entendîmes les coups de hache q u i, de la
forêt retentissoient jusqu’à n ous , car nous
n’en étions pas très-loin. Av an t le coucher
du so le il, nous regardâmes hors de notre cachette,
et nous vîmes beaucoup de monde
sur les montagnes. Il ne se passa d’ailleurs
rien de remarquable, si ce n’est qu’un bruit
soudain se fit entendre, comme si quelqu’un
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descendoit la montagne de notre côté. Le bruit
s’approcha et devint plus fort. Déjà nous
nous imaginions vo ir des soldats envoyés a
notre recherche, et nous nons préparions à
combattre; un ce rf se montre tout-à-coup à
nos regards; à peine nous a-t-il aperçus, q u i l
s’enfuit avec rapidité.
Quand les étoiles commencèrent à b r ille r ,
nous quittâmes la caverne ; e t, nous dirigeant
au nord, nous gravîmes une haute montagne
qui, en quelques endroits, étoit couverte de
buissons. J’étois dans un état affreux. Dans la
grotte, je n’avois pas ressenti des douleurs
bien fo r te s ,‘ parce que j ’avois constamment
tenu ma jambe dans la même position; mais
en marchant, et surtout en montant, e lle s
devinrent insupportables depuis le talon ju squ’à
la hanche. Ce que je souffrois me faisoit
pressentir ce que j’avois encore à en d u re r,
puisqu’il nous restoit beaucoup de montagnes
à franchir. Cependant les conjonctures
nous forçoient à user de la plus grande diligence.
V o yan t que je ne faisois que retarder
mes compagnons, et que je pouvois être la
cause de leur perte, je les suppliai de m’abandonner
à mon malheureux sort; mais qu’ils
étoient loin d’y consentir ! Je leur représentai