mure d’un ruisseau dans l ’éloignement me
procuroit quelque soulâgement, et m’excitoit
a doubler le pas. A peine avois-je b u , que
mon malaise rev en o it, et je passois continuellement
d’une incommodité à une autre ;
mais je ne pouvois pas manger.
L e i , er mai, nous nous reposâmes sur un
coteau le long du torrent dans une forêt sombre
, tout près d’un village situé sur une langue
de terre sablonneuse. Nous vîmes beaucoup de
gens à cheval et à pied traverser le to r ren t,
• et ^ ai*tres passer par un chemin peu éloigné
de n o u s , ce qui nous força de rester toute la
journée sans feu. En sortant, à la nuit , nous
rencontrâmes plusieurs personnes avec des
lanternes, et nous nous cachâmes derrière les
arbres pour les laisser passer. Nous entendîmes
frapper l ’heure dans un village dont
nous nous étions approchés; nous en conclûmes
qu’il devo its’y trouver des soldats qui
pourroient aisément nous découvrir, parce
q u i l ne faisait pas encore bien sombre, et
nous jugeâmes qu’il falloit nous arrêter, Sur
ces entrefaites, nous aperçûmes, dans une
prairie , un cheval attaché ; nous voulions le
prendre et l ’emmener dans la forêt pour le
tuer ; déjà nous avions? coupé la corde pour
cette opération, quand un poulain se mit tout-
à-coup à bondir et à hennir si fort, que nous
fûmes obligés de renoncer à l ’idée de nous
emparer de la jum en t, parce que le bruit que
faisoit le poulain auroit pu attirer les Japo-
nois. Nous songeâmes ensuite à traire la mère
dont le lait nous eût certainement été bien
salutaire, mais elle accueillit d’une si violente
ruade le matelot qui s’avança, que nous perdîmes
l ’envie de goûter de son lait.
La n u it étant devenue plus sombre , nous
passions devant un village sur le bord de la
m e r , quand des chiens en sortirent et coururent
sur nous. De crainte que leurs aboie-
mens n’attirassent l’attention des gardes qui
nous eussent aisément aperçus au bord de
l ’eau , nous fûmes obligés de nous coucher
derrière un grand tas de sable. Les chiens s’arrêtèrent
en nous regardant et en grondant.
Nous nous levâmes pou r"con tin u e r notre
route , ils s’élancèrent vers npus en*aboyant,
et nous contraignirent à reprendre notre première
position; ce ne fu t qu’au bout d’une
demi-heure qu’ils s’éloignèrent; nous pûmes
alors traverser le village sans nouvel obstacle.
Dans un des hameaux que nous rencontrâmes
en su ite , nous vîmes un bateau à f lo t , et tout