nikoff et moi, dans une grande salle où tous
les fonctionnaires publics, l ’académicien et
les interprètes se trouvoient réunis. Ils étoient
plus de v in g t, assis sur deux rangs, des deux
côtés de la salle. Bientôt après le bounio entra
avec sa suite. I l prit place ; chacun lu i témoigna
son respect ; nous lu i fîmes un salut
à l ’européenne, il nous le rendit. T ou t se
passa suivant l’ancien ordre, seulement le
porte-sabre du gouverneur ne posa pasf cette
arme près de lu i; il la tint des deux mains,
le fourreau en l ’air. Le gouverneur tira de
son sein une grande feuille de papier, la leva
en l’air et dit : «C ’est l ’ordre du gouvernement.
» Les interprètes nous traduisirent ces
paroles. Toutes les personnes présentes baissèrent
les y e u x et semblèrent inanimées. Alors
le gouverneur déploya le papier et le lu t tout
haut. C’était la pièce que nous avions déjà trad
u ite , et dont on a vu la copie plus haut (1).
E lle portoit que la conduite criminelle de
Chvostoif avoit été cause de notre captivité,
mais que le bounio s’étant convaincu que cet
officier avoit agi de son ch e f, nous mettoiten
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liberté par ordre de l ’empereur du Japon, et
qu’en conséquence nous devions nous embarquer
le lendemain.
Les interprètes nous ayant expliqué le contenu
de ce papier, et ayant dit au bounio que
nous le comprenions, ç e lu i-c i dépêcha un
des plus anciens officiers avec Koumaddjéro
pour en donner connoissance aux matelots.
Ensuite il tira de son sein un autre papier
qu’il lut aussi tout h au t, et ordonna à Teské
de nous l ’interpréter, puis de nous le remettre.
C etoient des félicitations que le bounio nous
adressoit. Cette pièce étoit ainsi couçue :
« Depuis trois ans vous v iv e z dans une
« v ille frontière du Japon, et sous un climat
« étranger; maintenant vous allez jo u ir du
« bonheur de retourner dans votre patrie -
« cet événement me comble de joie. Vous
« M. Golovnin, comme le plus âgé de vos
« compagnons, vous avez eu le p lus de souci;
« mais enfin vous avez atteint le but qui fait
« votre contentement, cela me comble aussi
« de joie. Vous avez appris à connoître un
« peu les lois de notre pays ; elles interdisent
« tout commerce avec les étrangers, et o r -
« donnent d’éloigner leurs bâtiinens de nos
« cotes ; faites connoître ces dispositions
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