qu’il leu r avoit dit adieu en passant. Ils sup-
posoient que l ’on alloit nous arrêter.
Caki amenoit avec lu i un jeune homme;
i l commença par me dire qu’il alloit me raconter
quelque chose de singulier. « Hier*
cc a jo u ta - t- il, j ’arrive chez moi et j’y trouve
cc inopinément. . . .devinez q u i . . . .mon fils.
<c Regardez-le; n’est-il pas v ra i qu’il me reste
semble? il m’a donné les nouvelles les
« plus satisfaisantes de ma femme. Elle est
cc revenue bien portante de son pèlerinage, et
« à peine étoit-elle entrée dans la chambre,
cc à peine avoit - elle quitté ses habits de
cc vo y a g e , qu’elle a reçu par la poste la
cc lettre que je lu i avois écrite à mon arrivée
cc à Kounaschir. » Je félicitai cordialement
Caki de ces événemens heureux qui l ’affermirent
dans sa croyance à la prédestination.
Je fis beaucoup d’accueil à son fils ; j ’ordonnai
de lu i montrer la corvette dans le plus grand
détail, et je lu i présentai mes officiers, q u i,
avec le secours de Kisseleff, causèrent familièrement
avec lui.
Pendant ce temps-là, Caki m’entretint de
son ami, qui s’étoit fait ermite. ocTaïscho»,
me d it - il, cc on trouve des hommes sansavoie
te besoin de lanterne. » I l faisoit allusion à
l ’anecdote de Dio gèn e, qu’il m’avoit entendu
raconter au Kamtschatka, et à laquelle i l
avoit pris grand plaisir. En général les traits
de vertu et de grandeur d’ame l ’attachoient
sin gulièrement, surtout ce lui du célèbre
Dolgorouki , lorsqu’il déchira l ’oukase de
Pierre-le-Grand. Quand il l ’entendoit, il porta
it toujours ses deux mains à sa tête en
signe de respect, et répétait avec émotion :
o k i, o l i , c’est-à-dire grand, grand; i l appli-
quoit ensuite sa main sur le coeur, en disant ;
housuri ( cela fait du bien) ; expression qu’i l
employoit toujours quand il voulo it faire un
grand éloge d’un mets qui luiplaisoit.
cc Comment p en se s -tu , me dem an da -t-il,
<c que je puisse m’acquitter avec mon ami?
« I l dédaigne la richesse : il faut que je fasse
cc quelque chose qui soit digne de sa grande
cc ame. T u sais que j ’ai une fille , et que
cc pour sa mauvaise conduite je l’ai privée
« de mon nom : ainsi elle n’étoit plus pour
cc moi au nombre des vivans. T u as bien
cc pris part à son sort. Tes exhortations pour
cc me réconcilier avec elle m’ont souvent
cc ébranlé ; peut-etre a i-je blessé ton amitié
c< en restant inexorable ; car tu ne connois