CHAPITRE Vin.
$
Description de la prison. — Manière dont les Japonois
divisent le temps.— Les Russes sont conduits au gouverneur.—
On les invite, et ils consentent à se recon-
noître coupables pour avoir fui. — Manière dont on
les traite en prison. — Humanité de plusieurs soldats
japonois.— Mauvaise conduite de M. Moor. — Nouveaux
interrogatoires.— M. Golovnin tombe malade.
— Sort des Russes amélioré.— Arrivée d’un nouveau
gouverneur.— Les Russes lui sont présentés.— On leur
annonce qu’ils seront mieux traités.— Beau trait de
Teské. — L ’ancien gouverneur fait ses adieux aux
Russes.
L a prison de la v ille étoit située au pied
d’un rocher élevé , et entourée de deux; palissades
en bois, ainsi que d’un mur en terre
surmonté de chevaux de frise. Nous aperçûmes,
dans la cour intérieure, un hangar immense,
arrangé à peu près comme celui dans
lequel nous avions été enfermés à notre arrivée
à Matsmaï-, à cette différence près, qu’il
contenoit quatre cages, une grande et trois
petites. Entrés dans le hangar, l ’inspecteur
de la prison (i), nommé Kisiski, nous délia l ’un
après l ’autre, et nous fouilla de la tête au x
pieds; opération pour laquelle i l fallu t ôter
tous nos vêtemens, sauf notre chemise. Après
qu’il m’eut fouillé le premier, il me fit entrer
dans la plus petite cage, qui n’avoit quo
s ix pas de lon g , cinq de large, et à peu près
d ix pieds de h au t, et qui etoit placée dans
un coin obscur du bâtiment. M. Chlebnikoff
fut enferme dans celle qui suivoit la mienne,
et qui étoit un peu plus grande et plus claire*
Dans celle qui venoit ensuite, se trou voit un
Japonois ; les matelots furent mis tous les
quatre dans la quatrième » qui étoit la plus
grande et la meilleure par sa position plus
rapprochée de l ’air du dehors et de la lumière*
On pouvoit de celle-là apercevoir beaucoup
dobjets exté rieu rs , tandis que de la mienne
0 ) Au Japon, 1 inspecteur d une prison a lè rang
d’un soldat impérial ; il jouit de la prérogative de por*
ter un sabre et un poignard. Son emploi consiste aussi à
infliger aux criminels les punitions et les supplices. J’ai
vu les Japonois parler a Kisiski et rire avec lui j mais ils
ne vouloient ni manger ni fumer ën sa compagnie) ils
évitoient même d’allumer leurs pipes au feti dont il
s’étoit servi pour la sienne» >
T om. II. 5