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que l’an c ien , c’étoit parce qu’il tenoit à une
famille plus distinguée. Au Japon, les places
de gouverneur sont remplies par des nobles ;
les personnes de cette classe tiennent le premier
rang après les princes héréditaires, et
sont désignés par le nom de cadamodo ; les
rangs se règlent entre eu x par les services et
l ’ancienneté des familles, et c’est ce qui détermine
leurs nominations aux emplois. Cet
arrangement ressemble à la couttiftie qui
régnoit en Russie avant l’introduction des
troupes régulières.
‘ Le nouveau gouverneur étoit plus âgé que
l ’ancien, il avoit soixante-quatorze ans; le
dernier n’en avoit que cinquante, et tous deux
paroissoient beaucoup plus jeu n e s , ce qui est
toujours le cas au Japon. Le nouveau gou verneur
éto it, pour la ta ille , un géant parmi les
Japonois* c’est-à-dire qu’il étoit aussi grand
que nos matelots. Ses compatriotes le regar-
doient comme un homme d’une taille prodigieuse.
Quand ils apprirent qu’il étoit nommé
gouverneur de Matsmaï,ils nous dirent qu’il
alloit arriver un géant, et que nous pourrions
nous convaincre par nos y e u x qu’il y avoit
au Japon des gens aussi grands que nous. Nous
vîmes aussi un officier des troupes du prince
de Nambou q u i, chez nous, auroitpassépour
un homme de grande taille.
Depuis notre visite aux deux gouverneurs,
les Japonois qui nous approchoient, changèrent
de manière d’être envers nous. T e sk é
nous apprit que M. Moor et A lex is avoient été
obligés, après notre fu ite , de retourner dans
notre ancien logement que l ’on alloit arranger
pour nous. On construisoit une chambre particulière
pour e u x , ce q u i forçoit d’attendre
qu’elle fû t finie pour nous installer (1). T e s t é
nous confia aussi que l ’empereur du Japon,
en donnant au nouveau gouverneur son au dience
de congé, lu i avoit recommandé d’av
o ir le plus grand soin de notre santé, et d’améliorer
notre position aussitôt son arrivée
à Matsmaï.
Sur ces entrefaites , il arriva un événement
q u i mit dans le p lu s beau jour le bon coeur
et la générosité de Teské. Quand j’allai à terre
à K oun a schir, j ’avois par hasard dans ma
poche une lettre que je voulo is laisser au x
Japonois dans le cas où ils voudroient ab-
(1) Nous avions d’abord cru que l ’on nous sépareroit;
mais ensuite nous apprîmes le contraire. Cependant
M. Moor supplia instamment pour qu’on le mît avec
Alexis dans un logement particulier.
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