Le long du rivage nous vîmes en plusieurs
endroits de grands feu x dont nous ne sûmes
pas d’abord le motif, et nous crûmes que c’é-
toiènt les soldats de service qui les aVoient
allumés; nous découvrîmes bientôt que c’é -
toient des signaux p ou r les bâtimens à la
■voile; ca r , dès que c eu x -c i hissoient leurs
lanternes, aussitôt on allumoit le feu a terre*
Le 2 9 a v r il, l’aurore nous fit encore rentrer
dans le haut du pays. A u jour nous nous
trouvâmes sur le sommet d une montagne
pelée, qui ne nous offroit aucun refuge. T o u t
autour de nous passoient des sentiers qui
conduisoient des villages dans la foret. Nous
allâmes donc d’un autre côté, dans une ravine
profonde et boisée, où couloit un ruisseau.
Cachés dans un endroit re tiré , nous allumâmes
du feu pour nous sécher et nous
chauffer, car le temps étoit fro id , et le vent
üouffloit. Nous fîmes cuire aussi du poireau
sauvage et de l ’angélique que nous avions
cueillis*, mais cette plante nous causoit du
dégoût, à moins de la manger avec d’autres
mets , nous y ajoutions souvent une poignée
de haricots ou de riz. Quant à m o i, je
perdis presque entièrement l ’appétit, et ma
so if s’accrut ; partout ou je trouvois de l’eau ,
je buvois avec avidité. Cette extrémité nous
fit songer11 aux moyens de nous procurer des
vivres. Notre état e:Xigeoit aussi que nous
découvrissions un lieu sûr dans la forêt pour
y construire une cabane, afin de réparer u n
peu nos forces épuisées par le manque de
nourriture et' par l ’excès de la fatigue. Malheureusement
les montagnes, à quelque distance
du rivag e , étoient entièrement nues.
Les côtes orientales de Matsmâï sont couvertes
de bois jusqu’au bord de la mer ; ce qui nous
avoit fait croire qu’il en étoit de même sur la
côte occidentale;quel contre-temps pour nous,
de trouver tout l ’opposé de ce que nous imaginions
! Depuis la côte j usqu’au milieu de
l ’île , toutes les forêts sont exploitées pou r
fournir du bois à brûler et du charbon. Les
Japonois font un grand usage de ces d eu x objets,
car il s n’ont pas de poêles et entretiennent
le feu constamment allumé au foyer. L ’h iv e r
étant froid et long , et la population considérable,
la quantité de bois et de charbon
q ui se consomme est prodigieuse. Le manque
de bois dans la partie occidentale de Matsmaï,
prouve que les Japonois se sont d’abord établis
dans cette partie , et ne sont allés que
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