nois le prièrent de passer à pied dans la v ille .
Quand nous fumes sortis, nous pûmes marcher
ou aller a cheval, comme cela convint à
chacun de nous* Notre escorte étoit composée
d’un officier qui avoit Je grade de schtoyagou,
de T e s té et de son frère, de huit soldats, de
nos domestiques, et d’un,grand nombre de
porteurs, palefreniers, etc , que l ’on changeoit
à chaque station. L ’officier étoit un homme
extrêmement complaisant et affable, qui nous
charma par sa conduite. Quand il nous arri—
vo it de nous asseoir pour nous reposer, il pre-
noit toujours place auprès de nous, nousdon-
noit de son propre tab a c , et nous rendoit
toutes sortes de services.
A r riv é s à notre première couchée, je dis à
Teské que notre départ de Matsmaï avoit lieu
le jour même auquel la Russie célèbre la fête
de son empereur. Aussitôt les Japonois, sans
que nous les eussions p r ié s , versèrent de leur
meilleur saki, et nous bûmes rasade à la santé
de sa majesté impériale. Notre exemple fut
su iv i par les Japonois ; ils répétèrent avec
enthousiasme ce cri que Teské leu r interpréta
: V iv e Vempereur Alexandre.
On peut soutenir hardiment que la renom-
jnée d’aucun monarque ne s’e s t, jusqu’à présent,
étendue aussi loin que celle de notre
empereur actuel. J’ai déjà dit plus haut que
les Japonois qui avoient passé quelque temps
en Russie l ’appeloient le père de son peuple.
Nous racontions souvent à leurs compatriotes
que ce prince visitoit fréquemment la cabane
des pauvres , s’entretenoit avec e u x , et
goûtoit même de leurs alimens. Les Japonois
nous écoutoient avec ravissement, et ne pou-
voient comprendre comment un monarque si
puissant étoit si débonnaire. Ils avoient auparavant
entendu leurs compatriotes raconter
ces particularités, mais ils croyoient que ceux-
ci avoient pris un officier pour l’empereur,
et n’ajoutèrent foi à la vérité de leurs récits
que lorsque nous les eûmes confirmés par les
nôtres.
Nous retournâmes àChakodade parle même
chemin que nous avions su iv i en venant, et
nous fîmes halte dans les mêmes endroits;
nous eûmes cependant plus de lib e r té , et
notre nourriture fu t sans comparaison bien
meilleure. M. Moor seul étoit surveillé avec
beaucoup de sé v é r ité , parce que les Japonois
craignoient qu’il ne s’ôtât la vie. Quand nous
nous mimes en ro u te , il fondit en larmes, ensuite
il pleuroit fréquemment. Les Japonois